• Nie Znaleziono Wyników

Widok Ia correction grammaticale, les anomalies sémantiques et la métaphore dans la grammaire transformationnelle-générative

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2021

Share "Widok Ia correction grammaticale, les anomalies sémantiques et la métaphore dans la grammaire transformationnelle-générative"

Copied!
15
0
0

Pełen tekst

(1)

STU D IA R O M A N ICA P O SN A N IEN SIA UAM Vol. 28 Poznaii 2001

M IKOŁAJ N KOLLO Universitc Adam M ickiewicz à Poznań

LA CORRECTION GRAMMATICALE, LES ANOMALIES

SÉMANTIQUES ET LA MÉTAPHORE DANS LA GRAMMAIRE

TRANSFORMATIONNELLE-GÉNÉRATIVE

A b s tr a c t. Nkollo M ikołaj, Ixi correction grammaticale, les anom alies sém antiques et la métaphore dans la grammaire transform ationnelle-générative [Grammatical W ell-form edness, Sem antic A nom alies and Metaphor in Transform ational-G enerative Grammar]. Studia Romanica Posnaniensa, A dam M ickiewicz University Press, Poznań, vol. XXVIII: 2001, pp. 83-97, ISBN 83-232-1144-2, ISSN 0137-2475.

This paper deals mainly with the problem o f semantic anomalies and their role in generative grammar. Once the issue was raised, the solutions brought about by authors varied among them considerably. As far as generative gramm ar is a formal theory, it cannot handle the anomalous uteerances with recourse to m etaphor. Instead, two main approaches were proposed. The first one originates from a semantic theory set forth by Katz and Fodor and has been adopted by Chom sky and his followers. Its focus is laid on formal properties and technical aspects o f the anomalies, without trying to explore their nature and their origin. The other one, argued for by the supporters o f generative semantics, has resorted to extra-linguistic context and to one’s personal beliefs and utterances. Neither C hom sky’s theory nor G S ’s theory are able to cope adequately with the problem, because its nature is strongly elusive to formal rules and its analysis can receive only several a d hoc solutions.

La linguistique generative adm et que parm i les énoncés effectivem ent utilises certains sont bien-form és, tandis que les autres sont agram m aticaux. La distinction est si im portante q u ’une des contraintes im posées à la gram m aire d ’une langue est d ’expliquer et de predire en quoi consiste la difference entre les uns et les autres. Vu que les locuteurs sont capables d ’ém ettre des jugem ents de gram m aticalità au sujet d 'u n ensem ble infini de phrases, m ém e inédites, c ’est que cette appreciation n ’a pas de caractère m ném onique ou experim ental, mais q u ’elle s ’appuie sur un systèm e de règles intériorisées au cours de l’apprentissage de la langue. D one, le linguiste, au m om ent où il construit sa théorie, form ule des hypotheses sur les m écanism es mis en oeuvre inconsciem m ent par le sujet parlant. A chaqué type d ’agram m aticalité va alors correspondre une com posante de la gram m aire. En m èm e tem ps, le principal enjeu de la linguistique generative consiste à perm ettre, au m oyen d ’un nom bre fini d ’instructions, d 'e n g en d rer toutes les phrases correctes, concevables dans une langue donnée, et elles seules. C ependant, la definition d ’une phrase gram m aticale n ’a jam ais

(2)

84

M . N k o l l o

été élaborée d ’une faon satisfaisante tout au long de l ’histoire m ouvem entée du dé- veloppem ent de la théorie en question. P ar consequent, les possibilités de prévoir l ’origine des com binaisons com m e celles qui seront analysées dans cet article parais- sent décroitre au prorata de leur deviation par rapport à la norm e. Du m ém e coup, la form ulation des règles censées expliquer cet état de choses s ’avère une tache ardue et sem ble exiger la com plication de l'appareil conceptuel de la com posante séman- tique, ainsi que la prise en com pte des m écanism es qui sous-tendent la form ation des phrases (jugées) anom ales.

L ’observation des points de vue défendus par les représentants de la gram m aire generative sur le problém e d ’anom alies sém antiques attire l'attention du chercheur sur deux points im portants. Tout d ’abord, elle perm et de delim iter deux positions opposées face au p ro b lèm een question, suivant que leurs auteurs accordent plus d ’im- portance à la syntaxe ou à la sém antique. Ceci facilite, à son tour, la definition, ne fut-elle q u ’approxim ative, d ’anom alie sém antique. La prem ière opinion, dont la pa­ ternità peut ètre attribuée à K atz et Fodor, consiste à declarer q u ’une phrase est ano­ m ale, lorsqu’elle est bien form ée syntaxiquem ent et que les règles de projection sont incapables d ’assigner une interpretation à l’am algam e de deux (ou plus) de ses consti- tuants dom inés par un m ém e noeud dans un indicateur syntagm atique (cf. Katz et Postai, 1964: 26). Deux observations ont perm is de rendre cette definition caduque. La prem ière est l ’existence des phrases com m e C ’est un contresens que de parler des p a in s qui m angent leurs consom m ateurs où la partie déviée est enchàssée dans une m atrice qui «invalide» son contenu sém antique1. L ’autre argum ent évoqué à l ’en- contre de cette prem ière thèse est que, m oyennant un contexte extra-linguistique ap- proprié et un peu d ’inventivité de la part des locuteurs, il est possible de conférer une interpretation sém antique aux phrases qui sem blent, à prem ière vue, «irreparables». C ’est ainsi que l ’énoncé com m e M on encrier a sucé m a m ère dedans peut étre jugé tout à fait naturelle dans un discours onirique, etc. (cf. M cC aw ley, 1971 b: 219). Les variations individuelles des sujets parlants et le bagage des experiences q u ’ils mettent dans le processus d ’interpretation sém antique est la carte m aitresse des partisans de cette solution. Les vices de celle-ci et la replique de Chom sky seront discutes par la suite de cette section. C e dernier argum ent, en dépit de sa sterilite due au recours aux facteurs non-linguistiques, a néanm oins servi à C hom sky (op. c it.: 152) de point de depart de la form ulation de certaines lois qui perm ettent de hiérarchiser les écarts par rapport à la gram m aticalità.

1 Les possibilités d ’apporter à ce type de constructions une solution appuyée principalement sur des critères transform ationnels et sém antiques ont été systém atiquem ent explorées par Chom sky ( 1965: 157). Selon celui-ci, ladifficulté disparaìt dès q u ’on procède à l’inclusion des regles de selection dans la com po­ sante syntaxique. Elle deviendra désorm ais apte à engendrer indirectement (derivatively) les phrases Les pains mangent leurs consom m ateurs, en m éme temps q u ’elle indiquera leur statut non-grammatical. C ’est m aintenant aux regles de projection de prendre la releve et de «neutraliser», au m oment de l ’enchàssement de les pains m angent leurs consom m ateurs dans sa matrice p arler de + A (le symbole postiche indique le lieu de la suite gram m aticale où peut venir s ’insérer la phrase constituante), Ies traits sémantiques opposes des constituants soum is à la combinaison.

(3)

La correction grammaticale, les anomalies sémantiques et la métaphore dans la grammaire

85

C ’est ainsi que la deviation la plus grave vient du non-respect des règles de la com posante catégorielle et consiste à insérer dans une suite pré-term inale le form ant appartenant à la catégorie gram m aticale autre que celle q u 'ex ig en t les règles syntag- matiques. C ’est le cas de II a du respectueux p o u r la tradition. Un écart m oins sen­ sible se produit quand on contrevient aux règles de sous-catégorisation stricte qui divisent les m orphem es appartenant à une seule catégorie en sous-classes suivant les caractéristiques catégorielles de leur entourage. C ’est le cas de 11 très respecte la tradition où Fon a affaire à l ’em ploi incorrect d ’un adverbe d ’intensité destine à m o­ difier les adjectifs2. Enfin, et c ’est la situation à laquelle seront consacrées les re­ flexions qui suivent, la transgression peut résulter de la com binaison des m ots aux traits sém antiques qui s ’interdisent m utuellem ent, p. ex. La table respecte la tradition. C ’est cette dernière catégorie que C hom sky qualifie de sém antiquem ent anom ale. Ce point de vue sur la nature des expressions agram m aticales appelle q u ’on y prete at­ tention. La difficulté tient à la situation frontalière de la phrase analysée entre la syn- taxe et la sém antique. La distinction [animé] vs [non-anim é], censée expliquer la de­ viation de La table respecte la tradition se repercute, m aintes fois, sur la correction (ou non) syntaxique des phrases, com m e en tém oignent les regles qui régissent l ’em- ploi d ’une des form es du pronom interrogatif qui / que. Si Fon se souvient de la definition que donne C hom sky de trait sém antique („W e call a feature «sem antic» if it is not m entioned in any syntactic rule...” , ibid.: 142), la deviation de la phrase en question a un caractère exclusivem ent syntaxique. T outefois, cette opinion est certai- nem ent trop radicale. Or, sans que la definition d ’anom alie proposée tout à l ’heure puisse ètre acceptée sans m éfiance, elle constitue la base sur laquelle les m odifications jugées indispensables viendront se greffer.

La realisation du postulat d ’élaguer la description d ’une langue des expressions qui transgressent la norm e finirait par en donner une im age appauvrie et éloignée de 1’intuition des sujets parlants pour lesquels une m ultitude de phrases non gram m ati­ cales ne sont pas tout à fait incom prehensibles3. C onfronté à cette difficulté, C hom sky a dü se rendre à l ’évidence et il ne s ’est nullem ent préoccupé de prouver le statut prétendum ent marginal des anom alies (cf. ibid.: 150, note 2; B utters, 1970: 106). En m èm e temps il a envisage de concèder sa place à la m étaphore, censée interpreter les

2 II convieni de remarquer que I’opposition entre très et beaucoup, qui explique le deuxième type de constructions non-grammaticales, se neutralise parfois (cf. Il jo u e rudem ent bien au tennis. Il est rudem ent content, Il a baroquem ent com pliqué sa description, Votre récit est baroquem ent com pliqué, etc.), ce qui demande l’introduction dans les regles de sous-catégorisation stricte de la notion de distribution complé- mentaire.

3 L ’exemple en est la formulation des phrases référentiellement absurdes, ce qui paraít etre un des procedes favoris des propagandistes. C ’est ainsi q u ’on a jadis parlé en Pologne de la doryphore imperia­ liste qui vient anéantir les plantations des pom m es de terre. Sans eriger cette observation au rang d ’une règie qui n ’admet aucune exception, on peut dire que l ’attribution à un nom d ’un adjectif aux caractéris­ tiques sémantiques opposées (à l’état libre, le terme imperialiste est destine à se rapporter à une classe d ’individus ou, secondairement, à leurs artefacts) n ’étonne personne et est autorisée dès le m oment où il s’agit p. ex. de produire une qualification injurieuse.

(4)

86

M. N k o l l o

com binaisons des term es qui contreviennent aux restrictions sélectives. Toutefois, selon lui, m ém e la m étaphore ne retrouve son droit de cité que dans la m esure où elle perm et d ’interpreter les expressions déviées grace à leur analogie avec celles qui ont été engendrées en conform ité avec toutes les règles requises de la com posante de base. C ette prise de position est riche de consequences, car, soigneux de construiré une théorie à capacité generative forte, C hom sky a été am ene à constater q u ’elle ne doit pas se lim iter à l ’énum ération de l’ensem ble des phrases gram m aticales d ’une langue. L à où un écart par rapport à la norm e a eu lieu, la description structurale de la phrase est tenue d ’en indiquer le degré et les causes. Ces deux p o in ts- l ’explication des m écanism es qui sous-tendent les expressions déviées et la légitim ité du recours à la m étaphore - feront l ’objet de ¡’analyse qui suit.

En ce qui concerne l ’exigence supplém entaire form ulée à l ’égard des descriptions structurales des phrases, qui consiste à renseigner sur les causes de la deviation et sur le degré de celle-ci, elle sem ble ètre justifiée d ’une double faęon. Le prem ier avantage qui m ilite en faveur d ’une telle decision est lié au besoin de distinguer entre les significations des phrases anom ales. Elles ne s ’équivalent pas Fune à l ’autre. Loin de là, certaines com binaisons dont les term es contreviennent aux restrictions sélec­ tives sont, gràce à leur coincidence avec une phrase bien-form ée, susceptibles de re- cevoir une «lecture dérivée». C ’est le cas de p. ex. J ’ai avalé deux tom es de poésies (pouvant s ’interpreter grace à la parente sém antique de avaler et d ’une des acceptions de ingurgiter, dont les traits sém antiques et syntaxiques se recouvrent largem ent) qui se prète plus à l ’analyse que La table respecte la tradition. Il est, et c ’est le second argum ent qui plaide en faveur de l ’indication de l’origine des phrases déviées, né­ cessaire de ne pas qualifier d ’anom ale toute expression qui s ’é c a rte d e la norme (c.à.d. ne pas croire que les anom alies sont aussi insignifiantes les unes que les autres), ceci en vue d ’éviter la m ise sur un pied d ’égalité des sens de C ’est un contresens que de p a rler des pains qui m angent leurs consom m ateurs et de C ’est un contresens que de p a rler des tables qui respectent la tradition (cf. Jackendoff, 1972: 18). Faute de faire cette stipulation, on obtiendrait C ’est un contresens que de p a rler des anom alies.

L ’autre chose est que les règles syntagm atiques et les entrées lexicales (au sens q u ’a ce term e dans la théorie de C hom sky) ne suffisent pas à prevenir la production d ’une phrase incorrecte ou à rendre com pte des causes qui ont prèside à sa form ation. M ém e si une expression a été engendrée en conform ité avec ces règles, et méme si elle n ’est pas, à strictem ent parler, anom ale, elle peut susciter un certain étonnem ent chez les locuteurs, alors que les causes en restent m éconnues. C ’est ainsi que la phrase N otre entreprise possède deu x grands im m eubles de luxe au centre de Londres, deux gares de fr e t à D o ver et une botte de sardines, loin d ’etre incorrecte - tous les syn- tagm es nom inaux objets, appartiennent à la m ém e catégorie sém antique et ne diffe­ rent q u ’au niveau de ce que K atz et F odor (1964: 496) appellent traits différentiels - va à l ’encontre de ce qui est ju g é susceptible de figurer dans un échange verbal franęais. La seule solution capable d ’en rendre com pte paraít consister à introduire dans les rubriques des form ants lexicaux les renseignem ents concernant les gabarits

(5)

La correction grammaticale, lex anomalies sémantiques et la métaphore dans la grammaire

87

(ou la valeur pécuniaire) des objets auxquels renvoient les term es des syntagm es no- minaux juxtaposes. Toutefois, ces renseignem ents risquent de proliférer d ’une faęon parasitaire et on ne voit pas le point où leur enum eration pourrait s ’arréter4.

Bien que l ’espoir d ’aboutir à des form ulations prédictives au sujet de l ’origine des anom alies paraisse vain, quelques reflexions techniques qui concernent la faęon dont ce type d ’expressions doit ètre analyse s ’im posent. Ces directives ont essentiel- lem ent un caractère inductif et com m encent par l ’observation de l ’usage, done de la perform ance, que font les locuteurs de leur langue. Cet usage perm et d ’attribuer à quelques objets, en dépit de leurs traits sém antiques inhérents, les qualificatifs qui ne leur conviennent m anifestem ent pas, mais qui, dans des circonstances particulières, ne les rendent pas anom ales. C ’est le cas avec le soleil couchant dont la form ation rem onte à une idée précopernicienne du m onde. C ’est le cas encore avec la phrase de Queneau A près une attente gratinée, sous un soleil au beurre noir, j e fin is p a r m onter dans un autobus pistache ou l ’expression un soleil de plom b, etc. L ’analyse de ces phrases suggère de ne pas voir les causes de l ’anom alie là où les sujets parlants attribuent à certains objets des propriétés incom patibles avec les connaissances scien- tifiques (cf. aussi La distance rapetisse les objets). Elle est aussi révélatrice des rap ­ ports entre les anom alies et la vérité factuelle. Si l’expression La lune est un nom bre prem ier esi, en m èm e tem ps, fausse et anom ale, 16 est un nom bre p rem ier n ’est clai- rem ent que fausse, sans ètre anom ale.

L ’autre perspective envisagée par C hom sky - le recours à la m étaphore au m o­ m ent de l ’analyse des anom alies sém antiques - appelle q u ’on fasse quelques rem

ar-4 II existe une certame tradition en matière de l’analyse des problèm es que posent les expressions de ce type. C ’est la rhétorique qui s ’est depuis longtemps occupée des phrases (qu’elle appelle zeugm es) à l’intérieur desquelles les mots (ou combinaisons de m ots) sém antiquem ent incom patibles sont mis en correspondance. C ’est, p. ex., le cas avec Les clés usées p a r les siècles et p ar les douleurs des hommes. Bien entendu, les liens entre la rhétorique et la gramm aire generative sont on ne peut plus laches. D ’autres suggestions sur la voie à adopter lors de l’explication des bizarreries sém antiques qui caractérisent les phrases comm e celle dont il est question sem blent rem onter à Aristote. Celui-ci a postulé de ne pas op- poser homm e à oiseau à l’intérieur de la catégorie bipede, mais homm e et bète à l’intérieur de la catégorie a n im a i De mème, les bottes de sardines et les im meubles de luxe ne s ’opposent pas à l ’intérieur de la catégorie des avoirs d ’une entreprise. Or, peut-ètre qu ’il convient, avant de proceder à l ’élaboration des classifications sémantiques, de se poser la question sur le principe qui prèside à telle ou telle autre carac- téristique des objets et qui est responsable des differences entre eux. Ce principe organisateur peut ètre la destination de certains objets (les fins qu ’ils permettent de réaliser). C ’est la solution, baptisée the mental questionnaire, que propose W ierzbicka (1985:333) à propos de la fameuse decomposition du champ sémantique des objets «pour s ’asseoir». C ’est ainsi q u ’un tabouret est «sans dossier», car il permet de s ’asseoir et de se pencher (p. ex. pour lacer les chaussures), alors qu ’un fauteuil permet de reposer son dos (il doit done avoir un dossier). Bien que les possibilités d ’application de ce type d ’analyse pa- raissent limitées (q u ’en est-il avec les lam pes, reverberes, lampadaires, veilleuses, etc. dont l ’usage ne diffère pas; seuls les raisons esthétiques perm ettent de les opposer), elle semble résister à l’épreuve dans Notre entreprise possède deux grands im meubles de luxe au centre de Londres, deux gares de fr e t a Dover et une botte de sardines. En effet, les instances où l ’on emploie les imm eubles, les gares de fret et les boites de sardines sont com plètem ent differentes.

(6)

88

M . N k o l l o

ques pour analyser 1’influence q u ’elle exerce sur les principes m éthodologiques de la gram m aire generative. La m étaphore, dont un des effets est que plusieurs sens (généralem ent éloignés l ’un de l’autre) des term es form ant une com binaison sont mis en correspondance, sem ble n ’ètre q u ’un expedient dans une théorie aux aspirations form elles. D es que Fon croit possible de dériver, à partir d ’un sym bole initial, toutes les suites susceptibles de recevoir une interpretation sém antique et de relier ensuite celle-ci à une representation phonétique, on doit s ’interroger sur la place que doit occuper la m étaphore dans la gram m aire d ’une langue. Or, on ne voit que peu de chances de conférer aux règles m étaphoriques un m ém e statut heuristique que celui dont jo u issen t les règles lexicales de la com posante de base. Le rapprochem ent, pro­ pose par certains auteurs (cf. T odorov, 1966: 109), entre la m étaphore et la transfor­ m ation d ’effacem ent du term e censé atténuer le gradient de deviation (en Foccurence des m ots et des expressions com paratifs - comme, tel, com m e qui dirait, p o u r ainsi dire) prète flanc à deux critiques. T out d ’abord, si dans certaines situations, le paral- lélism e en question sem ble parvenir à sauver la recevabilité (M on poisson rouge a d ­ m ire les toiles de Van Gogli et M on poisson rouge fa it com m e s ’il adm irait les toiles de Van G ogh), nom breux sont les cas où Fon entrevoit ses lim itations (La table fa it com m e si elle respectait la tradition n ’explique pas grand-chose). M ais, il y a pire. Son application, au lieu de sim plifier Fattribution d ’une lecture à une suite anom ale (m ais interpretable) de form ants lexicaux, finit par com pliquer la tàche et produit parfois des distorsions graves {J ’ai avalé deux tom es de p oésies et J ’ai fa it comme si j'a v a is avalé deux tom es de poésies).

U ne observation plus éclairante que celle dont il vient d ’etre question a été faite par B errendonner (1995:231), cette fois-ci au sujet des verbes à argum ent instrum en­ tal incorporé. C ’est ainsi que dans la phrase q u ’il cite - Il a goudronné sa tarline d ’une épaisse couche de confiture - le sentim ent de bizarrerie éprouvé par le locuteur vient de la reprise, au m oyen de couche épaisse de confiture, de l’inform ation incluse dans le sens de goudronner. La consequence en est la mise en relation de deux unites dont les sém antism es ne sont apparem m ent pas tout à fait com patibles entre eux. Le redoublem ent des argum ents est, à en croire 1’auteur, un des traits saillants des constructions m étaphoriques qui consistent à ju x ta p o se r deux attributs ordinairem ent hétérogènes. Sans aller ju s q u ’à nier la rectitude de ce raisonnem ent, il convieni d ’in­ sister sur le caractère syncrétique q u ’a dans cette phrase la com binaison de goudron et de couche épaisse de confiture. La distinction de leurs sens s ’estom pe gràce à l ’effet neutralisant des traits [poisseux] et [épais], ce qui perm et de conserver la co­ herence sém antique de la phrase où iis figurent. M ais, la plupart du tem ps, une telle analyse lexicale fait défaut à la description de la nature des expressions m étaphori­ ques. A utrem ent dit, la divergence entre les règles qui perm ettent d ’engendrer «indi- rectem ent» les anom alies sém antiques et le m écanism e qui sous-tend la creation de la m étaphore réside dans le caractère form el des prem ieres, mais non des secondes. T andis que la com posante de base fournit une règie (p. ex. la rubrique lexicale de ingurgiter «corrige» l ’em ploi de a valer dans l ’exem ple ci-dessus), capable de servir

(7)

La correction grammaticale, les anomalies sémantiques et la métaphore dans la grammaire

89

d ’étalon qui représente les traits pertinents pour 1’interpretation sém antique d ’une phrase anom ale (et perm et de déceler les traits sém antiques qui ne s ’accordent pas), il en est autrem ent avec la procedure qui donne lieu à la production des m étaphores.

Celles-ci n ’im pliquent pas ¡’existence de la règie à laquelle il soit possible de recourir. En échange, elles offrent un ensem ble disparate de m ots unis entre eux par la contiguità (intuitivem ent ressentie et toujours contingente) de leurs caractéristiques sém antiques. Ceci peut ètre sym boliquem ent representé à l ’aide de la sequence ABCD

V

(B C D E

v

(C D EF

v

(D EFG ))), etc. Les lettres représentent, chacune, un trait sém antique et les com binaisons de quatre lettres sym bolisent les mots de la chaTne. D ans cette perspective, la m étaphore s’appuie sur la substitution, à un des sèmes du mot precedent, d ’un autre sém e, le reste dem eurant intact. Le prem ier m ot de la sequence est presum e représenter le sens littéral. Plus de parentheses entourent les mots de la sèrie, plus ils sont éloignés du sens littéral (et, par consequent, présen- tent un caractère plus anom ai). Il est, bien entendu, possible de faire varier le nom bre de sèmes, ce qui aura pour résultat les divergences dans le type de m étaphore - moins de sèmes seront pris en consideration, plus éloigné de la norm e en sera l’effet. Un écart plus grave doit se produire au m om ent de la juxtaposition des unites non-voi- sines (c.à.d. celles qui ont m oins de sèm es en com m un que les m ots contigus).

Pour reprendre ce raisonnem ent à l ’aide d ’un exem ple, considérons la sèrie: beurre (substance onctueuse, com estible, peu consistante, non-dure); p a te (substance com estible, assez consistante, non-dure, peu solide); goudron (substance consistante, assez dure, assez solide, industrielle); m acadam (substance dure, solide, industrielle, com pressible), etc. C ’est ainsi que l ’em ploi de ces m ots avec couvrir sa tartine de est acceptable pour les deux prem iers elem ents de la sèrie (objets com estibles). C ’est le sens littéral. Le mot qui suit présente plus de problèm es. A insi, l ’usage de goudron peut-il, com m e on le voit dans l ’exem ple cité par B errendonner, ètre qualifié de mé- taphorique. L ’incorrection sém antique est ici partiellem ent neutralisée, ce qui résulte de la presence du trait «consistance». C elui-ci est nécessaire pour q u 'u n m ot puisse suivre couvrir sa tartine de. En tém oigne 1’insertion dans le contexte en question des mots qui font penser, de m èm e que goudron, aux substances pàteuses ou sem i-li- quides (colle, enduit, cf. Il a colle une couche épaisse de confiture su r sa tartine). L ’aberration de couvrir sa tartine du m acadam provient de l ’absence dans ce mot du trait «consistance» (cf. *11 a m acadam ise sa tarline d ’une couche épaisse de confi­ ture). Il en aurait été de m èm e avec pavé, cim ent, beton, etc. Ces m ots, à l ’opposé de goudron et de ses hom ologues n ’ont rien à voir (sauf le trait «substance») avec les objets com estibles peu consistants dont on couvre norm alem ent les tartines.

L ’analyse qui précède perm et de definir la m étaphore com m e l ’expression à mi- -chem in entre les phrases sém antiquem ent correctes et celles qui sont anom ales. Ce- pendant, l’em ploi de cette notion en guise de concept explicatif repose sur les facteurs peu précis et peut facilem ent nécessiter le recours aux données non-form els et, par consequent, inadm issibles du point de vue linguistique. M èm e si l ’on aboutit à pre­ senter sym boliquem ent le m écanism e qui sous-tend la m étaphore, on doit reconnaitre

(8)

90

M. Nkollo

que son pouvoir gén ératif ne garantit pas contre la form ation des series aberrantes et nettem ent gratuites (cf. la note 5 ci-dessous). C et état de choses est du à la volonté d ’expliquer à chaqué instant l ’interpretati on des unites linguistiques au moyen de deux m écanism es intellectuels indépendants: (i) m ise en rapport des unites mutuel- lem ent substituables et (ii) leur adjonction aux unites lexicales coexistantes (cf. Ja­ kobson, 1963: 61-62). A insi, le sens d ’un mot est-il, à la fois, determ iné par l’impact de ceux qui l ’entourent dans la phrase et par le souvenir de ceux qui pourraient le rem placer. Le flou qui rem et en question la valeur de ce raisonnem ent est q u ’une des relations constitutives de cette interpretation - le choix des elem ents de la sèrie - met en oeuvre tantót les règles de selection, tantòt la proxim ité sém antique (intuitivem ent ressentie par les sujets parlants) entre les m ots de la sèrie. Cette operation, apparem - m ent sim ple et claire, se révèle à l ’exam en et à l ’usage redoutablem ent im precise, oscillant constam m ent entre des critères linguistiques, psychologiques ou m ixtes5. Son analyse incline done à croire que la m étaphore a un caractère arbitraire et que son statut heuristique est nul. P ar consequent, elle ne peut pas jo u ir d ’une méme capacité explicative que ceci a lieu avec les règles de la structure profonde. Elle n ’est pas non plus, à l’opposé du m odéle génératif (susceptible de décrire plusieurs phrases potentielles), predictive, ce qui interdit de l ’incorporer au modéle.

U ne fois que la m étaphore est introduite dans le m écanism e formel q u ’est la gram- m aire, il faut tenir com pte de sa soum ission à toutes sortes de variations individuelles, ce qui com plique considérablem ent sa form alisation (m ém e à supposer q u ’elle soit realisable). D ’ailleurs, com m e l’a rem arqué Lyons (1989: 316-317), un recours ex- cessif au sens figure est capable de sauver n 'im p o rte quelle hypothèse, pour naive q u ’elle soit. C ’est la coherence d ’une théorie sém antique qui en reęoit les éclabous- sures. Si ces critiques sont legitim es, elles posent les sém anticiens générativistes face à une alternative. Soit, lorsqu’il en vient au caractère de la com posante sém antique, ils renoncent à son statut d ’algorithm e et se réclam ent des données intuiti ves et des

5 Ce danger peut étre ¡Ilustré par le fragm ent de la réponse d ’un schizophrène paranoì'aque (sans deliquescence de ses facultes intellectuelles), dem andé d ’exprim er son opinion sur les causes de son séjour à l’h ò p ita l:...Lekarze, którzy to zaaprobowali, to jedna klika pozostająca pod rozkazami tych z „Nafty”, naftowców, nafciarzy, nafcików, nafciuchów. To oni chcą mnie zakanistrować, zakastrować, tak jestem kastratem psychicznym, nie wierzę w żadne leki lekarzy, nie ufam ludziom, bo to jest pomacanie, pom a­ c h a n ie , wermachtanie, Wehrmacht (...) Znam (...) to namawianie w knajpach, bo to je st wszystko knajpa, m ówią może śledź, m oże kompocik, może bez kompociku, m oże herbata, może bata” (cit. d ’après Ma­ słowski et Mitarski, 1967: 107. Les italiques - M.N.). On voit que la chaíne n ’em brasse pas seulement les mots apparentés phonétiquement, mais que la proximité sémantique entre les élém ents de la serie se laisse observer aussi (nafta - kanistrować, kompocik - herbata). Ce fragm ent montre non seulement les difficultés que connaissent les demarches entreprises en vue de form aliser la métaphore, mais il est aussi instructif en matière de la valeur heuristique des agram maticalités et des anomalies sémantiques. L ’étudc de celles-ci est, selon Fromkin ( 1971:45-50), révélatrice de l’existence des règles de grammaire, en mème temps q u ’elle témoigne de leur réalité psychologique et illustre lesquelles de ces regles ont été transgres- sées. C ’est, entre autres, grace à l’observation de ce type d ’énoncés qu’a été entreprise la tentative de reconstituer, en term es psycholinguistiques, la frontière formelle et normative entre ce qui est correct et ce qui ne l’est pas.

(9)

La correction grammaticale, les anomalies sémantiques et la métaphore dans la grammaire

91

connaissances extra-linguistiques, soit ils refusent de se rabattre sur l’explication au moyen de la m étaphore. En dépit des objections soulevées de part et d ’autre (cf. W ein- reich, 1972: 39-40. REM . Les reflexions de ce chercheur au sujet des énoncés déviés ont été form ulées concurrem m ent avec la preparation des A spects...), c ’est plutòt vers cette deuxièm e solution que C hom sky sem ble s ’ètre tourné. La prem ière solution, elle, parait avoir été im plicitem ent adoptée par les représentants de la sém antique generative au m om ent de leur analyse du problèm e des anom alies sém antiques et des contraintes sur la co-occurence.

O pposes à C hom sky qui s ’inclinait à considérer les restrictions sélectives com m e un type particulier de règles de la com posante de base de la gram m aire, ils ont pré­ sente plusieurs argum ents, parfois sains et fort pénétrants, contre cette optique pan- syntaxique. Toutefois, certaines de leurs propositions doivent ètre soum ises à un exa­ men critique, car leur acceptation pourrait finir par battre en breche les fondem ents mèmes de la gram m aire generative. C ’est ainsi que L ak o ff (1971: 329) a constate que la com posante de base engendre les couples - phrase et presupposes - où la prem ière n ’est gram m aticalem ent c o n e c te que dans la m esure où elle s ’accorde avec le presuppose véhiculé par le locuteur. C ette position sem ble ètre le résultat du rejet du postulat d ’assigner leur interpretation sém antique à des énoncés en dehors des connaissances q u ’ont les locuteurs du m onde où ils vivent et elle s ’appuie sur la conviction q u ’il est difficile d ’expliquer le sens d ’une phrase sans dire ce q u ’elle devient dans les différents types de situations où on peut la produire. C ’est ainsi que pour celui qui considere les anim aux non seulem ent com m e des ètres vivants, mais aussi com m e capables des fonctions psychologiques supérieures (p. ex. l ’aptitude à avoir des sentim ents), le dialogue A vec qui tu es v e n u l A vec m on chat, ou la phrase Ma petite pieuvre sail que je suis un p iètre cuisiiiier sont tout à fait acceptables. Il en est de mème avec d ’autres anim aux, tout ceci en fonction des jugem ents du locu­ teur et de la connaissance q u ’il a au sujet de la réalité extra-linguistique. Ceci n ’est pourtant, à s ’en rem ettre aux argum ents de Lakoff, q u ’une question de perform ance. La com petence du locuteur, elle, englobe l ’aptitude à apparier les phrases et les pre­ supposes en fonction desquels elles sont bien-form ées. U ne fois adm ise la definition que donne L akoff de la correction gram m aticale (et, corrélativem ent, d ’un de ses pendants q u ’est l ’anom alie sém antique), on est oblige de réviser les principales theses de la gram m aire generative. Pourtant, l ’erreur la plus grave que présente ce raison- nem ent consiste à confondre les taches d ’une théorie linguistique et les m oyens qui perm ettent de les réaliser. La gram m aire generative, de par sa nature, ne peut pas faire appel à l'intuition et espérer expliquer par là la com petence linguistique. Bien au contraire, c ’est au m oyen des m écanism es form éis q u ’elle entreprend d ’expliquer les jugem ents intuitifs (com m e celui qui concerne le statut de M a p etite pieuvre...) portés par les sujets parlants sur la nature des faits de sens. La correction (ou non) des échanges com m e ceux qui viennent d ’etre cités n’est done pas tributaire des j u ­ gem ents individuéis. Ces derniers ne gardent leur validité que dans la m esure où on peut les confronter au systèm e des règles gram m aticales d ’une langue donnée. Ces règles engendrent les phrases et exprim ent le fait q u ’elles renferm ent certains

(10)

pré-92

M . N k o l l o

supposes, sans q u ’il y ait besoin de faire reference à des idées p a rtic u la res de qui que ce soit. Le recours aux données non-linguistiques peut, d ’ailleurs, se tourner fa- cilem ent contre ceux qui le pratiquent. La personnalisation des anim aux aboutit à des tournures de beaucoup m oins acceptables que ceci a lieu avec A vec qui tu es venu'i A vec m on chat. Si les défenseurs de la thèse sur la correction relative veulent l’ap- pliquer au pied de la lettre, ils sont obliges d ’accepter, entre autres, J ’achète uii chat et un anim al, C ’est un cliat, m ais c ’est un anim al, etc.

En dépit de son caractère spécieux, l ’argum entation utilisée par L akoff a le mérite de signaler l ’existence d ’une catégorie d ’expressions qui ont une probabilità d ’occu- rence infim e. P u isq u ’elles sem blent se trouver à m i-chem in entre les anom alies sé­ m antiques et les contradictions logiques, leur statut conceptuel pose des problém es. Les énoncés Q uelques perso n n es sont rébarbatives, m ais quelques étres hum ains sont rébarbatifs ou En dépit de m a visite au M usée d ’Orsay, j ’y séjournais (m oyennant la coréférence de M usée d ’O rsay et de y) n ’outrepassent nullem ent les lois com bina- toires im posées aux phrases franęaises par les traits inhérents et contextuéis des unites qui y figurent. L a gram m aire generative, au lieu d ’expliquer le statut de ces expres­ sions à l ’aide du décalage entre l’expérience et Ies assertions q u ’elles font (c ’est pour- tant la solution vers laquelle tendent plusieurs chercheurs, cf. Jackendoff, op. cit.: 19-20; M cC aw ley, 1968: 129), peut em ployer un concept form el et étudier les en ­ sem bles des inferences (qui interdisent de recourir à la connaissance de la réalité extra-linguistique et s ’opposent, de ce fait, à C ’est un castor, m ais il construit des barrages ou En dépit de sa mauvciise hum eur, il se m et en rogne, à moins q u ’on n ’introduise dans les rubriques lexicales appropriées des renseignem ents prototypi- ques, p. ex. «castor - m am m ifere qui construit des barrages») que ces phrases per- m ettent. Le peu d ’intérét porté par les tenants de la théorie en question aux possibilités q u ’offre ce m écanism e transphrastique est le prix q u ’ils doivent payer pour s ’ètre lim ites uniquem ent à ce niveau d ’analyse q u ’est la phrase prise isolém ent6.

6 Les raisons de la repugnance de Chomsky pour l’incorporation du concept de consequence logique à la gram m aire ont été exposées avant la naissance de la grammaire générative et, à ce qu ’il semble, ne se sont pas désactualisées au cours du développem ent de cette théorie. Le principal reproche formule par Chom sky à l ’adresse des tenants de la vision logiciste des langues naturelles concerne le décalage entre celles-ci et les langues artificielles. Ce qui passe pour l’inférence dans les systèm es mathématiques ne peut ètre exprim é q u ’en termes des listes des postulats de signification (au sens de Carnap, 1964: 423. REM. La prem ière edition de son article a eu lieu en 1939), alors q u ’aucune connaissance méthodique de la nature de cette relation n ’est accessible aux chercheurs qui décrivent le discours quotidien. Si tant est q u ’il soit possible de tirer, à partir de Ceci est rouge, la consequence Ceci est colore, c ’est grace à l’énum ération préalable des inferences possibles. Il n’en est pas de m ème dans les langues naturelles, surtout en raison de la faible correspondance des m ots de celles-ci et des particules logiques. Tandis qu ’on peut légitim em ent, à partir de Cet hom m e est grand et mince, inférer Cet homm e est grand, il serait bizarre de procèder d ’une faęon analogue avec Le drapeau polonais est blanc et rouge (cf. Chomsky, 1955: 39-41). Cette critique garde sa validité aussi en ce qui concerne la synonym ie des phrases enchàssées ( Tout homm e qui parie franęais sait que l ’oculiste est un m édecin des yeux et Tout homme sait que l ’oculiste est un médecin des yeux), argum ent soulevé encore plusieurs années plus tard (cf. Chomsky, 1972: 85-86 et la note 18 de son texte). Il en ressort que les langues artificielles ne sont ni des variantes plus coherentes ni des schemas idéaux des langues naturelles.

(11)

Im correction grammaticale, les anomalies sémantiques et la métaphore dans la grammaire

93

Si le recours à la logique lors de l ’interprétation sém antique des phrases est constam m ent rejeté par Chom sky et dénoncé com m e peu efficace, il ne reste au cher- cheur q u ’à s’en rem ettre aux m oyens q u ’offre l ’analyse du systèm e lexical. Sans q u ’il soit possible d ’aller ju sq u ’à conclure au caractère generai du phénom ène, il convient de noter que certaines expressions ju g ées anom ales ne le sont q u 'e n apparence. Com m e il en a déjà été question ci-dessus, une des présom ptions qui étayent cette analyse est la mise d ’accent sur une certam e disparite qui s ’observe au cours de l’in- terprétation des anom alies sém antiques; alors que les unes se laissent facilem ent ra- mener à une form ulation correcte, d ’autres se m ontrent plus recalcitrantes. C ette re­ marque vaut aussi pour le type dont l’esquisse va ètre brièvem ent présentée ici. Dans la phrase Le caporal hurle des ordres à ses troupes, la transgression (probablem ent, de moins en m oins sentie par les locuteurs) vient de la difficulté que pose l’am algam e du nom doté de [+ H um ain] et du cri poussé par les chiens (les loups, les chacals, etc.). La solution la plus sim ple consiste à chercher l’analogie entre le com portem ent- -stéréotype d ’un caporal qui, com m e on a tendance à se I’im aginer, crie sauvagem ent après ses subordonnés et la form e acoustique que revèt le son produit par les repré- sentants de l ’espèce canine. M ais, cette interpretation parait trop proche du savoir extra-linguistique dont l'im précision lors de la reflexion sém antique dans la gram ­ maire generative a déjà été dénoncée. En tout cas, elle repose sur des données intui­ ti ves et n ’explique que piètrem ent l ’origine de ce type de com binaisons. C ependant, la phrase en question peut ètre «corrigée» si l’on procède par le recours aux variantes stylistiques traditionnellem ent associées aux caporaux et aux chiens. Il existe en fra- nais plusieurs acceptions du mot cabot, dont l’une renvoie aux chiens (style fam ilier et péjoratif) et une autre aux caporaux (m ot argotique et péjoratif, forgé à partir de caporal sous l ’influence de cabot = chien). D ès q u ’on se rend com pte de cette res- sem blance, il ne reste q u ’à se référer au paradigm e des cris d ’anim aux. Il sem ble que ce procède est productif, com m e en tém oignent, entre autres, les phrases Q u ’est-ce que tu as encore ci b r a ir d (adressée à un enfant pleum icheur), Les am oureux qui roucoulent, etc.

D ’autres com binaisons sont décidém ent m oins nom breuses et m oins previsibles, en consequence de quoi, elles ne se prétent pas si facilem ent à la correction. C ’est ainsi q u ’une phrase com m e Jean a versé de l ’espoir à M arie parait relever du type dont l ’origine se couvre d ’une telle obscurité. L e contexte extra-linguistique, à moins q u ’il ne soit très sophistiqué, n ’y peut lien faire. T outefois, une procedure analogue à celle qui vient d ’etre appliquée à propos de Le caporal hurle... s ’avère ètre utile égalem ent dans ce cas-là, si l ’on tient verser pour une variante expressive de donner. En effet, les sém antism es de chacun des verbes sem blent contenir l ’idée de «trans- mettre». C ’est ainsi q u ’une phrase ju g ée fort aberrante peut relever d ’un m écanism e sém antique productif qui consiste à substituer au term e plus generai son hyponym e7.

7 En ce qui concerne les causes de cet état de choses, on peut observer, tout au long du système lexical d ’une langue donnée, une certaine régularité qui consiste dans la plus grande liberté combinatoire d ’un terme moins spécialisé par rapport à celle d ’un term e dont les emplois se restreignent à un moindre

(12)

94

M. Nkollo

Il en est de m ém e avec Dieu insuffla la vie à sa créature qui sem ble s’ètre im planté dans la langue au m oyen d ’un procède analogue. Il convient de rem arquer, en mème tem ps, que les deux phrases different l ’une de l’autre quant au degré de leur accep- tabilité, bien que la règie de selection transgressée ait été la m ème. Il s ’agit dans l’un et l ’autre cas de la com binaison du verbe pourvu du trait contextuel [ - + Nom concret] et du nom etiqueté [non-concret], C ependant, insuffler requiert, en guise de son com plem ent approprié, le nom désignant un corps gazeux, senti, à s ’en rem ettre aux ju gem ents intuitifs des sujets parlants, com m e quelque chose de moins concret q u ’un liquide dont le nom sem ble avoir le plus de chances de se jo in d re à v e rse é .

A lors que les exem ples ju stem en t discutes relèvent de la casuistique et ne preten­ dent nullem ent au statut des lois concernant les causes de la form ation des phrases anom ales (et de leur transfert éventuel à la catégorie de bien-form ées), ils ont le m érite de constituer le point de depart de la conceptualisation des problèm es débattus ici. On vient de voir que m oins un term e est specialise, plus il a de chances de se com biner avec celui qui se laisse decom poser en une sèrie de traits sém antiques opposes. Cette règie s ’observe avec le plus d ’acuité dans les syntagm es nom inaux com poses de sub­ stantiis suivis de nom s de couleurs. Il est possible d ’expliquer au m oyen de cette hypothèse l ’existence en franęais de deux types de form ations: les unes sont claire- m ent idiom atiques et leur figem ent ne présente aucun doute, cf. telephone rouge, p e u r bleue, m atière / substance grise, (voir) des papillons noirs. Le rem placem ent des adjectifs ci-dessus par les nom s renvoyant à une de leurs nuances aboutit à la deform ation du contenu sém antique (cf. *telephone verm ilion / cram oisi / amarante, *peur violette / bleuàtre, *substance / m atière grisàtre). Bien que cette thèse ait un caractère nettem ent spéculatif, la substitution n ’aurait pas été possible, m èm e s ’il existait, dans une langue, d ’autres term es neutres et renvoyant à une m ém e étendue

domaine d ’arguments. C ’est ainsi que donner de l'espoir à q uelqu’un et verser de l ’espoir à q uelqu’un renvoient à une seule situation, mais la seconde phrase n ’est pas neutre stylistiquement et les rapports com binatoires que verser est susceptible de contracter jouissent de moins de liberté que ceux qui carac- térisent donner, m ém e si l’on limite l’analyse aux phrases à structure «transmettre - nom de senti- ment/sensation», cf. donner V impression d ’etre heureux (*verser I ’impression d ’etre heureux), donner le vertige à q u elq u ’un (*verser le vertige...), Elle lui a donne son coeur et son órne (*Elle lui a versé son coeur...). Il s ’ensuit que les form ules de distribution les plus fréquentes (les moins spécialisées) se fixent aux sens les plus frequents (cf. Apresjan, 1966: 52-53).

8 Selon une des hypotheses ardem ment défendues par les tenants du courant dit lexique-grammaire (cf. Giry-Schneider, 1994: 12), les noms de sentim ents accusent une tendance particulièrem ent nette à se com biner avec des verbes qui font penser aux noms de corps à l’état liquide. C ’est ainsi q u ’on dit ètre in o n d éd e jo ie, nager dans I ’extase, etc. Mais, il convient de signaler, en méme temps, que ce phénomene n ’est ni généralem ent répandu, ni beaucoup plus fréquent que la combinaison d ’un nom avec le trait [non-concret] et d ’un verbe qui exige, en guise de son sujet ou de son complement, le nom renvoyant à un gaz, cf. Cette vue anim a d ’un souffle ses passions, Votre declaration a dissipé mes craintes, Tous ses espoirs sont partis / s ’en sont allés en fum èe, Ses suspicions se sont envolées. Il convient de noter, enfin, la presence en franęais de quelques cas àm i-chem in entre liquide et gazeux, cf. Son ardeur s ’est évaporée, Son enthousiasm e p o u r ce p rojet semble s ’ètre volatilise à mesure qu 'il voyait I ’indolence de ses colla- borateurs.

(13)

Im correction grammaticale, les anomalies sémantiques et la métaphore dans la grammaire 9 5

du spectre que ceux qui figurent dans les expressions en question. Les caractéristiques que présentent les locutions idiom atiques doivent ètre clairem ent opposées à celles qui s’observent dans les com binaisons d ’un nom suivi de p. ex. rouge qui renvoie, selon le cas, au com m unism e, danger, interdiction, etc., ce qui peut, sur le plan lexical, étre partiellem ent expliqué grace à la notion de sèm es afférents. D ’autres term es de couleurs se prètent m oins facilem ent à l ’interprétation (cf. p in k en anglais renvoie à un sym pathisant non actif de la gauche)9 et donnent lieu à plus de variations indivi- duelles. Bien que cette deuxièm e variante de com binaisons en question soit moins spectaculaire que la précédente, la substitution des nom s renvoyant à la nuance d ’une couleur au term e general produit, la plupart du tem ps, une anom alie sém antique. Le m écanism e qui im pose, dans la structure nom - qualificatif, le term e superordonné plutòt que son hyponym e connaìt, bien entendu, des exceptions. C ’est ainsi que les expressions critique incisive, scène déchirante, regard poignant, voix (son) m ordant, etc. ne contiennent pas, de preference, d ’hyperonym e b lesserl0. Le principal problèm e que pose cette analyse est que, en réalité, il s ’avère difficile de décider où passe la frontière entre les anom alies sém antiques et les idiotism es. D ire que les prem ieres sont m oins frequentes et ne se rencontrent ni dans l’usage quotidien ni dans des pub­ lications lexicographiques, alors que les seconds y figurent revient à c o n s ta te rl’actuel état de choses, mais ne constitue pas son explication. La conclusion qui s'im p o se est que la plupart du tem ps, dans les expressions anom ales à structure nom - qualificatif, plus l ’adjectif est general, plus il paraìt susceptible de se jo in d re à un nom aux ca­ ractéristiques sém antiques opposées.

Les représentants de la gram m aire generative se sont toujours obstines à prouver que les locuteurs ne se lim itent pas à répéter des phrases, m ais q u ’ils sont capables d ’en produire de nouvelles. Les règles d ’interprétation sém antique et les règles lexi­ cales ont été conues de sorte à assurer la correction des phrases au niveau de la si­ gnification, en m èm e tem ps q u ’il leur incom bait de predire si telle ou telle autre phrase sera anom ale ou non et d ’en expliquer les causes. Il y a alors un paradoxe à

9 C ’est de ce type d ’analyse que semble relever 1’interpretation de la fameuse phrase de Chomsky D es idées incolures vertes dorm ent furieusem ent (1957: 15). L a juxtaposition de vert et de incolore est, bien entendu, une contradiction et n ’appartient pas directem ent au cham p d ’investigation de la sémantique lexicale. Parcontre, si l’idée d ’etre vert est associée, comme ceci se pratique parfois, à fertilité, innovation, printemps, etc., l ’explication de l’expression en question présente des perspectives encourageantes. La combinaison des idées vertes dorm ent peut, sans q u ’il faille recourir aux connaissances intuitives (et, en mème temps, sans q u ’on puisse y apporter des garanties scientifiques), étre interprétée comm e «des idées innovatrices n ’ont pas encore vu le jour».

10 Si la tendance à construiré des énoncés potentiellem ent anomaux à l’aide des term es m oins spe­ cialises plutót qu ’à l ’aide de leurs hyponym es vaut aussi pour la relation verbe + com plem ent d ’objet, et ceci dans deux directions, c.à.d. dans une construction correcte: i) le verbe est moins specialise (cf. boire les paroles de q u elqu'un, et non pas siroter I laper / deg lu tirles paroles de q u elq u ’un), ii) le com plem ent est moins spécialisé (cf. acheter chat en poche, et non pas person / siam ois / matou)\ les contre-exem ples ne m anquent pas (dans deux directions, eux aussi): i) La police l ’a épinglé, La m aladie l ’a cloué à son lit, Ses parents le vissent, etc. (et non pas attacher)-, ii) Il ne risque pas d ’attraper une meningite, J ’ai toujours la colique avant les examens, Vous m e donnez le tournis, etc. (et non souffrance, maladie).

(14)

96

M. N k o i l o

s ’apercevoir du caractère statique de ces règles, réduites à insérer les unites lexicales ayant des caractéristiques sém antiques rigides dans des suites gram m aticales bien form ées, ceci au m oyen d ’un nom bre lim ité de traits de selection. La conclusion qui s ’im pose im placablem ent est que le m écanism e qui sous-tend le phénom ène traité un peu par-dessus l’épaule par les tenants de la théorie generative échappe à la capacité explicative de celle-ci et exhibe les insuffisances de sa com posante sém antique. Avec recours à l ’appareil conceptuel de la gram m aire, le chercheur est voué à en rester à l ’étape de l ’élaboration d ’une taxinom ie de deviations par rapport à la norme, sans q u ’il puisse arri ver à en déceler les causes ou en indiquer le degré. D e méme, les possibilités prédictives concernant la signification offertes par la gram m aire genera­ tive s ’épuisent, sau f quelques cas peu nom breux, quand il en vient à d e c id erà l’avance quel énoncé sera ju g é dévié. Il ne peut pas en ètre autrem ent, car les anom alies ont ceci de particulier q u ’elles ne s ’établissent pas, la plupart du tem ps, à partir du sys- tèm e de règles gram m aticales. Bien au contraire, elles president à la form ulation des jugem ents au sujet de la correction sém antique d ’une phrase. C ’est done par la voie intuitive q u ’il est possible de décider si une règie a été bien (ou mal) appliquée et de distinguer une phrase correcte d ’une anom alie, mais tout ceci rétroactivem ent. Ce d ernier aspect du fonctionnem ent des énoncés anom aux m ontre pourtant I' im portance qui doit ètre attachée à l ’étude de ceux-ci, car la correction d ’une expression à un état du développem ent de la langue ne fait souvent que consacrer les incorrections de l’époque précédente. Ceci incline à croire que les agram m aticalités sont aussi bien les signes du non-respect de certaines règles génératives que la m anifestation la plus patente de l ’existence de celles-ci.

B1BLIOGRAPHIE

A p r e s j a n J. (1966), A n a ly se d istrib u tio n n e lle d e s sig n ifica tio n s et ch a m p s sém a n tiq u es stru c tu ­ res, L angages 1, pp. 44-74.

B a c h E., H a r m s R .T. eds (1968), U niversals in L inguistic T h eo ry, H olt, R inehart and W inston, Inc., N ew Y ork.

B e r r e n d o n n e r A. (1995), R ed o u b lem en t a c ta n c iel et nom inalisations, S co lia 5, pp. 215-244. B u t t e r s R .R . (1970), O n the interp reta tio n o f „deviant u tte ra n c e s ", Journal o f L inguistics 6 (1),

C am bridge U niv ersity Press, L ondon, pp. 105-110.

C a r n a p R. (1964), F o u n d a tio n s o f L ogic a n d M ath em a tics, F o d o r J.A ., K atz J.J., cds, pp. 419-436. C h o m s k y N. (1955), L o g ica l S y n ta x a n d Sem antics: T heir L in g u istic R eelevance, L anguage 31

(1), T he L in g u istic S ociety o f A m erica, B altim ore, pp. 36-45. C h o m s k y N. (1957), S y n ta c tic S tru ctu res, M outon, T he H ague.

C h o m s k y N. (1965), A sp e cts o f the Theory o f Synatx, M IT P ress, C am b rid g e, M assachusetts. C h o m s k y N. (1972), Stu d ies on S e m a n tic s in G enerative G ram m ar, M outon, the H ague. F o d o r J.A ., K a t z J.J. eds (1964), The S tructure o f Language. R eadings in the P hilo so p h y o f

(15)

La correction grammaticale, les anomalies sémantiques et la métaphore dans la grammaire

97

F r o m k i n V .A . (1971), The N on-A n o m a lo u s N a tu re o f A n o m a lo u s U tterances, L an g u ag e 47 (1), pp. 27-52.

G i r y - S c h n e i d e r J. (1994), Selection et sém antique: p ro b lè m e s et m odeles, L an g a g es 115, pp. 5-14.

J a c k e n d o f f R. (1972), S em antic Interpretation in G en era tive G ram m ar, M IT Press, C am bridge, M assachusetts.

K a t z J.J., F o d o r J.A . (1964), The Stru ctu re o f a Sem a n tic Theory, (in:) F o d o r J.A ., K atz J.J., eds, pp. 479-518.

K a t z J.J., P o s t a l P.M . (1964), A n In teg ra ted T heory o f Lin g u istic D escrip tio n , M IT Press, C am ­ bridge, M assachusetts.

L a k o f f G. (1971), P resu p p o sitio n a n d R ela tive W ell-F orm edness, (in:) S tein b erg D .D ., Jak o b o v its L.A ., eds., pp. 329-340.

L y o n s J. (1989), Sem antyka (trad. W ein sb e rg A .), vol. 1, P W N , W arszaw a.

M a s ł o w s k i J., M i t a r s k i J. (1967), N iektóre za g a d n ien ia sc h izo fa zji. P sy ch ia tria P o lsk a 1, pp. 103-108.

M c C a w l e y J.D . (1968), The R ole o f Sem a n tics in a G ram m ar, (in:) B ach E., H arm s R .T., eds., pp. 86-169.

M c C a w l e y J.D . (1971), W here do noun p h ra s e s com e fr o m ? (in:) S tein b erg D .D ., Jak o b o v its L.A., eds., pp. 217-231.

S t e i n b e r g D .D ., J a k o b o v i t s L.A ., eds (1971), Sem antics. A n in terd iscip lin a ry rea d er in p h i­ losophy, linguistics a n d p sych o lo g y , C am b rid g e U niversity P ress, C am bridge.

T o d o r o v T. (1966), l^es a n o m a lies sém antiques, L angages 1, L arousse, Paris, pp. 100-123. W e i n r e i c h U. (1972), E xplo ra tio n s in S em antic T heory, M outon, T h e H ague.

Cytaty

Powiązane dokumenty