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Analyse sémantique de certains noms d’émotion

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Anna Krzyżanowska

Analyse sémantique de certains

noms d’émotion

Lublin Studies in Modern Languages and Literature 2930, 24-38

(2)

29/30, 2006, h t t p ://w w w .l s m l l .u m c s .l u b l i n . p l

Anna Krzyż

anowska

Maria Curie-Skłodowska University

Lublin, Poland

Analyse sémantique de certains noms d’émotion

D epuis quelques années, les nom s et les verbes de sentim ent font l ’objet d ’un grand intérêt en syntaxe et sém antique lexicale (A nscom bre 1992; R uw et 1993; V an D e V elde 1995, G ram m aire des

sentim ents 1995; M athieu 2000; G rossm ann et Tutin 2005,

Sém antique des n o m s et adjectifs d ’ém otion 2005)1. L ’objectif de ce

travail est de com parer la structure sém antique de trois lexem es (tristesse, chagrin, peine) qui ont un sens voisin. D ans notre

1 Anscombre, J.-C. (1992): Quand on fait du sentiment: réflexions (presque)

spontanées sur la nature des noms psychologiques. In: L. Tasmowski et A. Zribi-

Hertz, De la musique à la linguistique. Hommage à Nicolas Ruwet. Communication et

Cognition. Ghent, 139-153; Ruwet, N. (1993): Les verbes dits psychologiques: trois théories et quelques questions. In: Recherches linguistiques de Vincennes, 22, 95-124;

Van De Velde, D. (1995): Les verbes dits «psychologiques» revus à la lumière des

noms correspondant. In: Revue de linguistique romane, 59 (233-234), 67-98; Grammaire des sentiments (1995), dir. A. Balibar-Mrabti, Langue Française, 105.

Paris: Larousse; Mathieu, Y. (2000): Les verbes de sentiment De l ’analyse

linguistique au traitement automatique. Paris: CNRS Editions; Grossmann, F. et

Tutin, A. (2005): Joie profonde, affreuse tristesse, parfait bonheur Sur la prédicativité

des adjectifs intensifiant certains noms d ’émotion. In: Cahiers de Lexicologie, 86,

2005-1, 1-18; Sémantique des noms et adjectifs d ’émotion (2005), dir. F. Grossmann, A. Tutin, LIDIL, 32. Grenoble: Ellug.

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Analyse sémantique de certains noms d'émotion 25

étude, nous nous appuyons sur la typologie des nom s abstraits intensifs, proposée par Flaux et V an D e V elde (2000:87-93)2. Cette classe com prend: des nom s de qualité (générosité), des nom s d ’affect

(j'oie) et des nom s d ’états répartis entre «états psychologiques» (égarement) et «états physiques» (fatigue). Parm i les nom s d ’affect,

on distingue les nom s de sentim ent et les nom s d ’ém otion. A la différence des nom s d ’ém otion, les nom s de sentim ent ont obligatoirem ent deux argum ents dont l ’un correspond au sujet affecté par le sentim ent et l ’autre à un objet hum ain ou non hum ain. La plupart de ces nom s sont dérivés de verbes et liés à l ’adjectif. Les nom s d ’affect peuvent être gradués et ils sont dépourvus de lim ites tem porelles. C ette dernière caractéristique perm et de les différencier des nom s d ’états qui ont une extension tem porelle. Ce qui distingue les nom s d ’affect des nom s de qualité, c ’est le type de verbe opérateur (les nom s de qualité ne s ’appuient pas sur éprouver et ressentir) et un type particulier de relation locative avec le sujet (Flaux et V an De V elde:88).

Tristesse, chagrin, p ein e appartiennent à la classe des nom s

abstraits intensifs et partagent avec eux certaines propriétés syntaxiques et sém antiques, notam m ent:

- ils adm ettent com m e distribution l ’article partitif sans m odifieur associé: d e la tristesse, d u chagrin, d e la p ein e.

- ils apparaissent dans les constructions avec le classifieur générique: un sen tim en t d e tristesse, un sen tim ent d e chagrin (rare), un sentim ent d e p ein e (très rare).

- ils n ’ont pas d ’autonom ie syntaxique et sont introduits par les opérateurs de type: avo ir - avo ir d u cha grin (dans le prem ier sens 'é ta t m oralem ent douloureux’), avoir de la peine; éprouver -

éprouver de la peine, de la tristesse, un g ra n d chagrin (dans le

second sens 'p e in e ou déplaisir causé par un événem ent précis’) et ressentir - ressen tir du chagrin (dans le prem ier sens),

de la p ein e, de la tristesse.

2 Flaux, N. et Van De Velde, D. (2000): Les noms en français, esquisse de classement. Paris: Ophrys.

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- les nom s étudiés peuvent être gradués: une p ro fo n d e tristesse, un

g ra n d chagrin, une p ein e affreuse.

- ils peuvent être intensifiés à l ’aide d ’un déterm inant quantifieur:

un p e u de (u n p e u de tristesse, de chagrin, de p ein e); beaucoup de (beaucoup de tristesse, de chagrin, de peine), tant de (tant de tristesse, de chagrin, de p ein e).

C om m e certains nom s abstraits intensifs, les nom s en question se pluralisent facilem ent, m ais le passage au pluriel m odifie leur sens 3. Ils désignent la cause de l ’ém otion ou les m om ents où l ’on éprouve l ’ém otion (des jo ie s et des peines, p ein es légères et g ran ds chagrins,

les tristesses de la vie quotidienne, ra con ter à tout le m o nd e ses chagrins, confier ses p ein es à quelqu 'un).

Tristesse, chagrin et p ein e entrent dans les constructions qui

présentent une structure actancielle où la m ention de l ’argum ent qui correspond à l ’expérienceur (c’est-à-dire au sujet «éprouvant») est obligatoire:

X éprouve, ressent de la tristesse, X a de la peine, X a du chagrin.

Les nom s tristesse, chagrin et p ein e apparaissent dans les

constructions où le sujet est anim é (la tristesse de Pierre, une grande

tristesse du chien; le chien qui p e r d son m aître, com m ent lu i faire p a sse r son chagrin ?; la p e in e du chien). R appelons que dans les

syntagm es nom inaux sa tristesse, son chagrin, sa peine, le possessif renvoie toujours à l ’expérienceur. Il convient de rem arquer que les nom s en question ont une structure argum entale qui im plique deux actans sém antiques hum ains:

X éprouve, ressent de la tristesse pour Y (X est triste pour Y) X a de la peine, beaucoup de peine pour Y,

X a du chagrin pour Y

3 Parmi les noms d’affect qui se mettent au pluriel, on peut citer: les haines, les

amours, les horreurs, les désespoirs, les colères, les joies, les peurs, les petits bonheurs, les frayeurs, les mélancolies, les respects, les surprises, des gaietés, des mépris. Voir à ce sujet: Van De Velde, D. (1999): La multiplication des sentiments.

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Analyse sémantique de certains noms d ’émotion 27

Le deuxièm e actant ne jo u e pas ici de rôle sém antique d ’objet (ou de cause). Il sem ble q u ’il peut s ’agir du rôle sém antique que certains linguistes appellent «aboutness». La seule préposition qui peut se substituer à p o u r dans ce contexte est à p ro p o s de / au su jet de (X est

triste à p ro p o s / au su jet de Y) 4.

La structure actancielle des nom s dont nous parlons, peut com porter l ’argum ent correspondant à une cause. Cet argum ent est introduit en surface par les locutions prépositionnelles suivantes: à

cause de, du fa it de, à la su ite de, à l ’idée de et par la préposition devant, p. ex.: la tristesse de P ierre à l ’idée de partir, à cause du départ de son père, du fa it de q uitter ses am is; le chagrin de P ierre à cause d ’une séparation, à la suite d ’un échec, devant cette injustice 5; la p ein e de P ierre à cause de, du fa it de la m o rt de son père.

La cause peut être m entionnée sous la form e d ’un com plém ent en

de qui est un groupe verbal à l ’infinitif: la tristesse de P a u l de vivre sans espoir du changem ent, le chagrin, la p ein e de P ierre d ’avoir p erd u son ami. La préposition de est acceptable dans la construction

avec l ’adjectif triste: P ierre est triste de cette histoire6. On peut évoquer encore l ’expression figée chagrin d ’a m ou r où une ém otion négative est causée par un autre sentim ent.

Il faut souligner que la locution prépositionnelle à cause de introduit toujours une cause négative (p. ex. la tristesse de P ierre à

cause de cet a m our m auvais et raté). D ans le cas de la locution à l ’idée de, la cause consiste dans la représentation d ’un fait. A joutons

encore que la préposition devant sélectionne certains nom s. On a p.ex.

le chagrin devant cette injustice, m ais non * devant cette perte.

D ’après les exem ples cités, on voit que la cause est d ’ordre propositionnel. Elle représente un événem ent extérieur qui est sim ultané ou antérieur par rapport au fait d ’éprouver le sentim ent en question. D ans certains cas, la cause peut représenter une personne 4 Je remercie beaucoup Mme le Professeur D. Van De Velde pour cette suggestion. 5 Chagrin entre dans une catégorie des noms à résorption c’est-à-dire représente un prédicat d’ordre supérieur avec une position d’argument propositionnel résorbé. Voir: Karolak, S. (1989) : L ’article et la valeur du syntagme nominal. Paris: PUF, 38. 6 Mathieu, Y., op. cit., 61.

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qui par son action, son com portem ent (ou un événem ent lié à cette personne) devient «source» de l ’ém otion p. ex.: tu m 'a s fa it de la

p ein e; ce que vous m e dites m e fa it de la pein e; il est p o u r la fa m ille la p lu s grande cause de chagrin; le départ de sa fille a donné de la tristesse à P ierre; elle est partie, c 'est la cause de l'é ta t de tristesse de P ierre . D es événem ents particuliers qui sont à l ’origine des ém otions

étudiées, sont considérés négatifs par l ’expérienceur.

Il convient de rappeler que la cause peut être exprim ée par les verbes appelés verbes à causation «intégrée»7: attrister, chagriner8,

p e in e r (cela m 'a ttriste 'm e rend triste ’; sa longue absence m e chagrine; cette nouvelle m 'a beaucoup peiné) et par les verbes

causatifs neutres: donner, provoquer, causer. On peut m entionner encore les verbes causatifs de type: rem p lir de (tristesse, de chagrin,

de peine(s)), p lo n g e r dans (la tristesse, le chagrin). R em arquons que

l ’ajectif triste (postposé et parfois antéposé) peut prendre un sens factitif (p. ex. chanson triste, tristes rues de province), de m êm e que la construction génitive du type: une pièce, un pa ysa g e d 'u n e grande

tristesse.

Com m e nous l ’avons déjà indiqué, tristesse, chagrin et pein e entrent dans les constructions qui com portent deux positions ouvertes: l ’une réservée à un argum ent hum ain et l ’autre à une cause. C ertains linguistes 9 rangent les nom s de ce type dans la classe des prédicats

d ’ém otion car ils sont associés à une cause et ils ont des com plém ents circonstanciels de cause (introduits p.ex. par à la vue de). Il faut rappeler que la m ention de la cause n ’est pas obligatoire. D ans les phrases X a du chagrin, X a de la peine, X éprouve, ressen t de la

tristesse, X e s t triste on a affaire à l ’ellipse d ’un actant qui correspond

à une cause.

L o rsq u ’on exam ine les définitions lexicographiques des nom s en question, on constate que chagrin et p ein e sont des nom s de type 7 Mathieu, Y. (1999): Les prédicats de sentiments. In: Langages, 136. Paris: Larousse, 46.

8 Il faut préciser que chagriner, c’est moins fort que causer du chagrin.

9 Voir: Buvet, P.-A. et al. (2005): Les prédicats d'affect. In: LIDIL, 32. Grenoble: Ellug, 140-141.

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Analyse sémantique de certains noms d'émotion 29

causatif c ’est-à-dire la cause spécifiée («constatation que quelque chose de m auvais est arrivé ou arrive») est inscrite, à titre d ’élém ent obligatoire, dans leur structure sém antique. Le N P R10 définit chagrin

com m e 'é ta t m oralem ent do ulo ureux ’ (le chagrin) ou 'p e in e ou déplaisir causé par un événem ent p ré cis’ (un chagrin) (p. 377) et p ein e - com m e 'so u ffran ce m o rale’ ou 'é ta t psychologique fait d ’un sentim ent de tristesse et de dépression dont la cause est conn ue’ (p. 1819). Par contre, tristesse est définie com m e 'env ah issem en t de la conscience par une douleur, une insatisfaction, ou par un m alaise dont on ne dém êle pas la ca u se’ (p. 2592). Il en résulte q u ’à la différence de

chagrin et de peine, tristesse peut dénoter l ’ém otion dont la cause

n ’est pas toujours spécifiée (une tristesse vague). Les exem ples m entionnés ci-dessous corrobore la thèse selon laquelle tristesse peut dénoter l ’ém otion qui peut apparaître sans cause apparente:

[...] les larmes me coulent aux yeux; je me sens saisie de la tristesse la plus profonde, et je ne sais pas pourquoi. (F)11

[...] à son contentement de la jeune proie enfin conquise se mêlait une tristesse dont il discernait mal les causes [...]. (F)

La cause n ’est pas spécifiée non plus dans le cas où tristesse dénote une disposition. La phrase il est triste peut avoir un sens dispositionnel car elle se laisse paraphraser par il est un triste 12.

On voit donc que la causalité n ’est pas intégrée dans le sens de

tristesse, m ais ce m ot peut apparaître dans une structure syntaxique

qui se laisse interpréter en term es de cause et d ’effet 13. La cause peut

10 Rey-Debove, J. et Rey, A. (1993): Le Nouveau Petit Robert Dictionnaire

alphabétique et analogique de la langue française. Paris.

11 Frantext: CNRS, ATILF (Analyse et traitement informatique de la langue française), UMR CNRS-Université Nancy 2. <http://atilf.atilf.fr/frantext.html> 12 Voir: Mathieu, Y. (2000): Les verbes de sentiment De l'analyse linguistique au

traitement automatique. Paris: CNRS Editions, 61. Il faut remarquer que, par contre,

la phrase Je suis triste ne peut se référer qu’au moment où le sujet affecté éprouve l’émotion en question.

13 Voir à ce sujet: Bogacki, K. (1990): Représentations sémantiques et contraintes de

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être introduite égalem ent par le verbe causatif a ttrister (mais non * cela m e m élancolise ou * cela m e cafarde) .

Tristesse, chagrin, p ein e sont des nom s qui dénotent une ém otion

dont la durée peut être plus ou m oins longue. Ils se com binent avec les verbes être et vivre: être, vivre dans la tristesse, dans la peine, vivre

dans le chagrin. Ils ont un com plém ent de m esure ou un spécifieur

nom inal de m esure: une tristesse de quelques heures, quelques heures

de tristesse; les heures de chagrin, trois jo u rs, d eu x m o is de chagrin, jo u r s de peine. Les nom s étudiés im pliquent donc une certaine durée.

Ils dénotent un procès transitoire plus ou m oins long qui peut parfois avoir un caractère itératif: Son chagrin n 'a p a s duré longtem ps; un

chagrin p assager; le chagrin se prolonge; [...] la tristesse qu'ép rou ve son voisin depuis la m o rt de l'a n im a l; la tristesse passe, resurgit; la jo i e vient après la peine. D ans les collocations où les trois nom s

apparaissent avec les adjectifs intensifs m arquant le procès tem porel (éternel, perpétuel, infini), la dureé est correlée à l ’intensité. Le fait que tristesse, chagrin, p ein e sont susceptibles, dans certains cas, d ’avoir une extension tem porelle perm et de les rapprocher des nom s d ’états psychologiques (hors de la classe des nom s d ’affect selon la term inologie de Flaux et V an D e Velde).

Le m ot tristesse désigne toutefois une ém otion com plexe. Par opposition à chagrin et p ein e, il adm et la construction génitive caractéristique des nom s de qualité (il e st d 'u n e gran de tristesse, m ais non * il est d 'u n g ra n d chagrin ou * il e st d 'u n e g rand e peine), ainsi que la construction un état de tristesse (mais on n ’a pas *un état de

chagrin et * un état de peine;). Ce nom peut dénoter un état perm anent,

statique sans début et sans fin, com m e le m ontrent les exem ples suivants: il y a en lu i une tristesse, une tristesse perpétuelle, éternelle,

infinie, une tristesse sans fin, sans bornes. M ais on retrouve aussi les

collocations où les phases initiale et term inale de l ’ém otion sont nettem ent m arquées. L ’aspect inchoatif s ’exprim e dans des collocations telles que: la tristesse s'em pare, gagne, sa isit q u e lq u ’un; l ’aspect term inatif - dans la tristesse passe, disparaît. En tém oignent égalem ent les constructions avec les verbes causatifs: chasser,

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Analyse sémantique de certains noms d ’émotion 31

Le nom chagrin apparaît en cooccurrence avec le verbe éclater qui m arque alors le point culm inant de l ’ém otion (son chagrin a éclaté,

laisser éclater son chagrin en privé). La possibilité de se com biner

avec le verbe de ce type rapproche chagrin des nom s d ’ém otion. On rencontre égalem ent dans les textes la construction m étaphorique un

élan de chagrin qui présente le chagrin com m e une ém otion soudaine

et violente. L a phase term inale de l ’ém otion est exprim ée dans le

chagrin s ’est évanoui.

Tristesse adm et rarem ent le classifieur ponctuel accès (un accès d ’horrible tristesse, des accès de tristesse), tandis que p ein e - sem ble

l ’exclure dans un em ploi standard14. A joutons encore que les constructions telles que être assailli de tristesse; la tristesse envahit

q u e lq u ’un, s ’em pare de q u e lq u ’un; une tristesse subite, un accès de tristesse (cf. aussi tom ber subitem ent dans une gra n d e tristesse, quelque chose je tte quelqu ’un dans la tristesse) décrivent m étaphoriquem ent l ’ém otion com m e soudaine. Ce qui est im portant dans ce cas-là, c ’est l ’ém otion elle-m êm e. D ans la tristesse s ’em pare

de quelqu ’un, la tristesse est présentée com m e quelque chose

d ’extérieur au sujet. Par contre, le chagrin est visé com m e intérieur à l ’expérienceur et il est décrit m étaphoriquem ent com m e une force destructrice (le chagrin éclate, explose, le chagrin crève le coeur) . Le nom p e in e ne se construit pas avec les verbes m entionnés. Il dénote l ’ém otion qui a un caractère statique: être rem pli de peine(s). L ’ém otion désignée par ce nom retrouve un certain dynam ism e dans

une p ein e violente.

L es constructions s ’abandonner, se livrer à la tristesse; être

p lo n g é dans la tristesse, dans le chagrin exprim ent l ’aspect duratif

(voir aussi vivre dans la tristesse, dans le chagrin, dans la peine, être

dans la p eine; une tristesse, un chagrin éternel(le), perpétuel(le)) . Le

sém antism e du verbe se livrer n ’im plique aucune activité de la part de l ’expérienceur. C elui-ci subit l ’ém otion contre sa volonté (cf. aussi

tom ber dans une p rofonde tristesse). Le nom tristesse s ’associe à la

14 Tutin, A. et al. (2006): Esquisse de typologie des noms d ’affect à partir de leurs

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fois avec les verbes qui ont le sens volontaire: s ’abandonner à la

tristesse, se laisser gagner, envahir p a r la tristesse. Le m ot chagrin

fait partie des collocations s'abîm er, s'e n fe rm e r dans le chagrin, ce qui prouve que le sujet affecté est en queleque sorte «un agent».

Com m e nous l ’avons déjà rem arqué au début, les nom s qui nous intéressent, peuvent être intensifiés. Ils apparaissent tous avec les adjectifs intensifs standard: grand, im m ense, profond, in fini.15 On

rencontre aussi les collocations où tristesse, p ein e et chagrin apparaissent avec les adjectifs intensifs adéquatifs vrai, véritable (une

vraie peine, une vraie, véritable tristesse, un vrai, véritable chagrin).

D ans les autres cas, les adjectifs qui entrent en cooccurrence avec les nom s en question sont souvent lexicalisés. Par exem ple tristesse et

p ein e se construisent avec l ’adjectif d épréciatif (antéposé ou

postposé) affreux, une affreuse tristesse, une p ein e affreuse. Cet adjectif, selon G rossm ann et Tutin, a une valeur appréciative qui cohabite avec l ’intensité16. Ensuite, chagrin et p ein e se com binent

avec v if et g ro s (un v if chagrin, une p ein e vive, un g ro s chagrin17, une

g ro sse peine), m ais on a pas *une g rosse tristesse. Par contre,

l ’adjectif idiosyncrasique n o ir (préposé ou postposé) est associé à

chagrin et à tristesse (tristesse noire, n o ir chagrin ou chagrin noir),

m ais non à p e in e (*p ein e noire). L ’adjectif (littér.) indicible est le plus fréquent en com binaison avec tristesse. Il indique un degré d ’intensité très fort: la tristesse ne peut pas être exprim ée tant elle est grande18.

Le syntagm e prépositionnel: une tristesse san s bornes (cf. un

désespoir, une jo i e sa ns fin) et les constructions m o u rir de chagrin, p é r ir de tristesse exprim ent un degré d ’intensité m axim al. C ertains

adjectifs intensifs soulignent le fait de perdre le contrôle si l ’ém otion est trop forte et alors im possible à contrôler, p.ex.: être fo u de chagrin,

un violent chagrin, une p ein e violente. Un degré faible d ’intensité se

m arque par l ’adjectif petit. Ce dernier n ’apparaît cependant q u ’ avec 15 Ces adjectifs s’associent avec les noms de polarité négative (désespoir, ennui,

mépris, peur) et avec ceux de polarité positive (joie,bonheur, respect).

16 Grossmann, F. et Tutin, A., op. cit., 6. 17 L’adjectif gros a ici une valeur hypocoristique. 18 Grossmann F. et Tutin A., op. cit., 8.

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chagrin (on a un p e tit chagrin ou des p etits chagrins, m ais non * une p etite tristesse19 ou *une p etite peine). R em arquons ici que

l ’augm entation ou la dim inution d ’intensité peut être exprim ée par les verbes causatifs «intensifs»: augm enter, accroître (le chagrin, la

tristesse, la p ein e de quelqu 'un) et calm er (le chagrin, la tristesse, la p ein e de quelqu'un), apaiser (sa peine, le chagrin, la tristesse de q u e lq u ’un). Les quantifieurs un p e u de, beaucoup de, ta nt de (de tristesse, de chagrin, de peine) ont une interprétation intensive et non

quantitative.

Il faut noter que certains nom s com portent eux-m êm es un degré d ’intensité plus ou m oins fort. Par exem ple, c ’est le cas du m ot

désespoir défini par D EC F20 com m e très forte ém otion désagréable de

X causée par le fait suivant: X, croyant très im portant d ’échapper à un événem ent (lié à Y), n ’espère plus pouvoir y échapper; cette ém otion en augm entant cause que X perd la capacité d ’agir (de façon raisonnable); cette ém otion est celle q u ’on a norm alem ent dans de pareilles situations [= So (se désespérer)] . Par la suite, on peut classer

le m ot concerné sur une échelle d ’intensité: tristesse - d é se sp o ir21.

N ous avons pu observer ju s q u ’à présent les param ètres sém antiques liés à tristesse, chagrin et p e in e , notam m ent: la structure actancielle, la cause, la durée et l ’intensité de l ’ém otion. C ertaines définitions lexicographiques rendent com pte du fait que les lexèm es concernés ont dans leurs représentations sém antiques une com posante liée à la m anifestation de l ’ém otion. Par exem ple, le T L F22 définit

tristesse com m e ‘état d ’incapacité à éprouver de la jo ie, à m ontrer de Analyse sémantique de certains noms d'émotion 3 3

19 Dans le corpus sélectionné dans Frantext (romans de 1950 à 2000), nous avons trouvé une seule occurrence de une petite tristesse.

20 Mel’cuk, I. et al. (1984): Dictionnaire explicatif et combinatoire du français

contemporain Recherches sémantiques I, Montréal, 90.

21 On peut citer ici les verbes qui contiennent un intensifieur incorporé: chiffonner -

attrister - affliger.

22 Imbs, P. (1971-1994): Trésor de la langue française Dictionnaire de la langue du

XIXe et du XXe siècle. Paris, vol. 16; cf. aussi Grand Larousse (1971-1978), Paris,

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la gaieté; se traduisant notam m ent par les traits du visage affaissés, le regard sans éclat’ (p. 646).

La tristesse et le chagrin peuvent s ’extérioriser, ce qui est rendu par les constructions avec les verbes m o n trer et m a nifester (de la tristesse,

du chagrin) ou par le syntagm e une expression de (tristesse). La

collocation un reg a rd de tristesse désigne l ’ém otion éprouvé par l ’expérienceur. Il convient de constater cependant q u ’on rencontre peu de collocations et peu de phraséologism es qui décrivent la façon dont les ém otions en question se m anifestent. Les verbes qui font partie de ces expressions sont plutôt de l ’ordre du renferm em ent sur soi ou du resserrem ent: se consum er de tristesse, de chagrin, son coeur se serre

de tristesse, la g o rg e se no u e de tristesse. Les phraséologism es faire une tête, une m ine de six p ie d s de lo n g ‘être triste, m au ssad e’ et avoir une tête, une g ueu le d ’enterrem ent (‘avoir un visage triste’) font appel

aux réactions m im iques qui traduisent la tristesse. Le sens du prem ier s ’interprète com m e le résultat d ’une ém otion intense, le second est m otivé par l ’analogie entre l ’état de tristesse et l ’enterrem ent. On note encore le proverbe C ’est Jea n qui p leu re e t Jea n qui r it ‘se dit de q u elq u ’un qui passe facilem ent de la tristesse à la g aieté’. Ce proverbe se réfère aux m anifestations typiques de ces deux ém otions car selon les conventions sociales, les pleurs accom pagnent la tristesse23 et le rire - la jo ie. Le m ot chagrin fait partie des collocations qui décrivent les m anifestations extérieures de l ’ém otion: pleurer, sangloter,

soup irer de chagrin (le nom d ’ém otion est présenté ici com m e cause), a vo ir des larm es dans la voix ‘avoir la voix altérée par le ch ag rin ’. Les

m anifestations internes sont exprim ées dans: avoir le coeur p lein de

chagrin, g o n flé de chagrin, se ro n g er le coeur de chagrin. Il est

im portant d ’observer que les expressions que nous venons de citer, ne se réfèrent pas à des changem ents physiques réels, m ais elles véhiculent une inform ation sur l ’ém otion elle-m êm e. En ce qui concerne la p ein e, elle sem ble peu m arquée dans ce dom aine car nous

23 Les pleurs sont associés aussi à d’autres émotions négatives (pleurer, sangloter de

honte, de déception, de rage, d ’agacement, de dépit), et même à des émotions

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Analyse sémantique de certains noms d'émotion 35

n ’avons pas trouvé d ’expressions désignant ses m anifestations physiques intérieures. Parm i les expressions désignant ses m anifestations physiques extérieurs, on note p le u re r de p ein e; il y a de

la p ein e dans les y e u x de quelqu 'un; le reg a rd de quelqu 'un exprim e la p e in e . Par contre, les expressions qui reflètent le contrôle de la

m anifestation externe de l ’ém otion (dissimuler, cacher sa peine, taire

sa peine) ou celles qui décrivent la perte de contrôle de l ’expérienceur

sur l ’ém otion elle-m êm e (confier, épancher sa peine, dire, avouer,

ra conter sa peine, conter ses peines) sont fréquentes24. En plus, les

form ules stéréotypées dont la p ein e fait partie, jo u e n t un rôle im portant dans la neutralisation et dans le contrôle social des ém otions négatives. Il s ’agit d ’expressions rituelles prononcées dans certaines circonstances com me: j e p ren d s p a r t à votre peine, j e pa rta g e ta

peine, j e com patis à ta peine. Tristesse apparaît égalem ent dans les

expressions de ce type: faire p a r t de sa gran de tristesse, exprim er son

im m ense tristesse, annoncer a vec beaucoup de tristesse le décès de X.

A joutons que les ém otions auxquelles renvoient les nom s étudiés ici peuvent être éprouvées en com m un: p a rta g er la tristesse, le chagrin,

la p ein e de quelqu 'un; p a rta g er la tristesse a vec quelqu 'un; être unis p a r une com m une tristesse. Le fait que l ’ensem ble des personnes

présentes éprouvent de la tristesse, se reflète aussi dans l ’expression à

la tristesse g énéra le.

Pour term iner, il est intéressant de rem arquer que la tristesse et le chagrin peuvent accom pagner d ’autres actions. Cela se traduit par la présence de la construction syntaxique: P rép avec N o m d ’ém otion

(sourire, regarder, chanter a vec tristesse, répondre, se rappeler, apprendre avec chagrin). D ans ce cas-là n ’im porte quel verbe ne

s ’associe pas à ces nom s, la com binatoire étant liée au caractère de l ’ém otion. Selon B lum enthal la préposition avec est typique de la com binatoire de tristesse, m ais cette préposition ne se présente que rarem ent devant chagrin. Il en résulte que tristesse «tend vers

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l ’expression de la m anière» alors que chagrin «renvoie à l ’actant dans un enchaînem ent causal»25.

La préposition dans qui apparaît devant tristesse, chagrin et p ein e est m oins fréquente. La construction dans la tristesse (dans la peine,

dans le chagrin) décrit les circonstances qui accom pagnent le fait

d ’éprouver l ’ém otion en question, p.ex. danser dans la tristesse. La préposition à form e avec les trois nom s étudiés les expressions à m a

g ra n d e tristesse, à m a g ra n d e p ein e et à m on g r a n d chagrin26. Ces

expressions, placées dans le cadre d ’un récit, exprim ent la conséquence et m arquent l ’effet produit par un événem ent précis. C onclusion

Les m ots tristesse, chagrin et p ein e font partie du cham p sém antique ‘des sentim ents du genre de la tristesse’27. D u point de vue

sém antique, ces m ots dénotent des ém otions désagréables pour le sujet «éprouvant». L ’appréciation porte sur l ’événem ent cause de l ’ém otion ou sur l ’ém otion elle-m êm e. Ils ont tous un argum ent obligatoire qui correspond à un expérienceur. Cet argum ent est un anim é, généralem ent, hum ain.

Tristesse est un nom polysém ique qui dénote un état psychologique

(ce m ot se com bine avec un éta t de) , une disposition (tristesse adm et la construction génitive caractéristique des nom s de qualité) ou une ém otion (ce nom a un spécifieur de m esure de type m om ents de

tristesse) La cause peut être introduite par une structure syntaxique

appropriée ou elle n ’est pas spécifiée (cf. aussi les expressions une

tristesse sans objet, une vague tristesse) . Chagrin et p e in e ne dénote

pas une disposition (ils ne peuvent pas être em ployés com m e «nom s de qualité»). Ils peuvent être caractérisés à la fois com m e nom s 25 Blumenthal, P. (2006): De la logique des mots à l'analyse de la synonymie. In:

Langue Française, 150, Paris: Larousse, 24-25.

26 Voir Leeman, D. (1987): A ma grande surprise,... In: Revue Québécoise de la

Linguistique, vol. 16, 2, Montréal, 224-264.

27 Le terme ‘des sentiments du genre de...’ a été proposé par Wierzbicka, A. (1999):

Emotions across languages and cultures: Diversity and universals. Cambridge:

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Analyse sémantique de certains noms d'émotion 37

d ’ém otion et nom s d ’état. Ce sont des nom s de type causatif. La m ention de la cause n ’est pas obligatoire, m ais celle-ci est inscrite à titre d ’élém ent obligatoire dans leur sém antism e.

L es trois nom s en question désignent un état b ref et passagère ou un état durable, m ais chagrin et tristesse ont (rarement) une valeur ponctuelle et peuvent avoir un caractère dynam ique, tandis que pein e n ’a q u ’un caractère statique. En plus, on décrit la tristesse et le chagrin en faisant appel à leurs m anifestations extérieures ou intérieures, la peine sem ble peu m arquée dans ce dom aine. P eine et tristesse se distinguent par le fait q u ’ils dénotent un état socialem ent partagé et contrôlé, chagrin sem ble désigner une ém otion plus subjective. Il est im portant de souligner que la tristesse peut être considérée positive par l ’expérienceur. En tém oignent les collocations: se com plaire dans

sa tristesse, une douce tristesse, une tendre tristesse.

Bibliographie

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GL - Grand Larousse (1971-1978), vol. 1-7. Paris.

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alphabétique et analogique de la langue française. Paris.

Le TLF - Imbs, P. (1971-1994) Trésor de la langue française. Dictionnaire de la

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F - Frantext: CNRS, ATILF (Analyse et traitement informatique de la langue française), UMR CNRS-Université Nancy 2. <http://atilf.atilf.fr/frantext.htm>.

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