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Discours en la faveur des dames contre les mesdisans - la contre-morale mondaine à la fin de la Renaissance

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A C T A U N I V E R S I T A T I S L O D Z I E N S I S FOLIA LITTEHARIA 26, 1989

Evelyne Berriot-Salvadore

DISCOURS EN LA FAVEUR DES DAMES CONTRE LES MESDISANS - LA CO N TR E - M O R AL E M O N D A I N E À LA FIN DE L A RE N A I SS A N C E

L or s q u' e n 1600 Abel L 'A ng e li er fait paraître, sans nom d auteur, le Discours en la faveur des dames contre les mesdisans1, il cho isi t un do ma in e d' é d i t io n fami lie r d ' o r di n a i r e à ses c o n -frères du Palais, Lucas Br e ye l et M a th i e u Guillemot . Le petit o pus cul e in-12 de 75 ff. semble, au pr em i er re ga rd n 'ê tr e qu'un avatar de ces "arts d 'ai mer " qui o nt p r o l i f é r é depu is l'Héca-

tomphiie ou la raffaela: dans la t r a d it io n des d i al o gu e s i t a -liens, il p r é s en te en effet, ré pa rt ie sur sept journées, une "dispute entr e d e ux dames, C l e op hi l e et C lorinde, et un g e n -tilho mme nommé le sieur Clor ida n" qui p ré t en d démontr er, c o n -tre l 'o pi nio n commune, que les d am es h on nê te s ont la liberté d'aimer. La raret é du livre ju sti fi er a it d éj à une c u ri osit é de b i bl io ph i le mais le ré ali sme p r ov o c a t e ur du p ro po s en fait

Discours en la faveur des dames contre les mesdisans, dispute entre deux Dames, Cleophile et Clorinde, et un Gentilhomme nommé le Sieur Clori-dan, a Paris, chez Abel L Angelier, au premier pilier de la grand'salle du Palais, MDC, avec Privilege du Roy. R. A r b o u r (L'ère baroque en France. Répertoire chronologique de textes littéraires, Genève 1977- -1985) ne répertorie que 3 exemplaires du Discours, à la Bibliothèque de l'Arsenal à Paris (8 S 3125), à la Bibi, de Wolfenbüttel (137 11 Eth) et à la Bibi, de Michigan V. (PQ 1710 al d6). Ph. R e n o u a r d , dans sa Bibliographie parisienne du XVIe s. (t. 14) mentionne le Discours: "in-12. 5 ff. liminaires, 1 fol. blanc, 75 ff. non chiffrés. Limin: Aux lecteurs. Privilège du 6 mai 1600 à Abel l'Angelier pour 10 ans". J. G a y, dans la Bibliographie des ouvrages relatifs à l'amour, aux femmes, au maria-ge... (Turin-Londres 1871-1873, 6 vol.) signale le Discours en ces termes: "très rare", "le but de ce livre est de démontrer par mille bonnes rai-sons que les femmes ont tort de faire languir leurs amants, de leur ven-dre leurs faveurs au prix du temps plus ou moins long des poursuites amour-euses" . L ouvrage semble inconnu de B a r b i e r (Dictionnaire des ouvrages anonymes, Paris 1822-1827) et de G r a e s s e (Tresor des livres rares et précieux, Milan 1950). L'exemplaire que nous avons eu en main provient de la bibliothèque du Docteur D. Bernard (vente, Librairie Rossignol, Cannes 1977) et correspond à la description donnée par Ph. Re-nouard mais les 75 ff. y sont chiffrés.

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aussi u n e xe mpl e sig nifi cat if de l'é vol utio n de la ph il oso phi e amo ure use à la fin du X V I e siècle.

ANALYSE

(Aux lecteurs)

C'est po ur obéir aux "instant es prier es d 'u ne Dame" que l'auteur s'est fi nal emen t dé cid é à d on ner au public ce d i s -cours sur l'amour, sujet si épu isé qu' à sa seule évo cati on on recule d'ennui. Son int enti on alors est de s 'a dr ess er aux dames des "grand es villes ou d'une court" gui j ouissent d ' a s -sez de liberté pour pou voi r trouver q u elq ue p rof it à ces p r é -ceptes .

(Première journée - ff. 1-14)

Cl or ida n s' engage à prouv er aux dames qu 'e ll e s peuvent, sans con tr a in dr e leur liberté et sans ba nnir l'amour de leur compagnie, p ré ser ver leur hon neur des attaques des médisants. L af f i rm at io n est jugée t rop pa ra do xa le par ses i n t e r l o c ut r i -ces, Cléop hil e et Clorinde, pour qu 'il ne do ive pas d ' abo rd récu ser deu x idées reçues: que la voix du pe up le est la voix de D ieu et que l'amour est l'ennemi de l'h onneur des dames. L adage vox populi, vox dei se r apporte seul emen t à l'Eglise, "assemblee de gens de bien", mais c'est en ga uc hir le sens que l'étendre à l'op inio n vul gai r e qui est p lu tpt une "generale et vray e erreur" répa ndu e sur des "ailes m e n s o n g e r e s " .

Les femmes plus que les hommes, sans doute, sont exposée s aux ca lo mn ies car leur h on neu r est fragile, "c'est un v ai sse au agite dans la mer". Pour é cha pp er au naufrage, la seule "ancre de vertu" est inopérante, il y faut "l'ancre de p rud en ce et de subtilité". Aussi les da mes se p ro po se n t- el le s inu tilement d eloi gner l'amour c om me "le vra y et seul en nem i de leur honneur". Les é p it hèt es i nsult ants d ont on af f uble l'amour - cruel, parjure, faux, traitre, aveugle - sont une i njustic e de l'homme qui proj et te sur autrui ses pr opre s défauts.

(Deuxième journée - f f . 15-23)

A van t donc d ' in d iq ue r les remèdes pr op res à clore la bouch e des médisants, il c o nvi ent de d é non cer les abus qui

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se co mm ett ent au nom de l'amour. C lo r id an s 'e ffor ce d ' é t a -blir une fine di s t in c t i o n e n tre ses di f f é re n t e s formes: amour- -desir, amour-ra iso n, am ou r- co ns id é ra ti on . B ien d es femmes, par une pru de nc e ma l entendue, c h oi s is se n t un a mour de " d e s -sein" ou de "raison" m ais leur él e c t io n b â ti e sur la c o m m o d i -té seule ne sa ura it se c o nf o nd re avec une v é ri t a b le affection. Quant k l'amour "inclina tio n" qui naît des pre mi er s regards, il se ratta che da v a nt ag e aux pl ai si r s se ns u el s et terrestres, et c'es t v ouloir le c ouv ri r d' u n p r é te x t e gue d ' év o gu er "quelque pu is sanc e occulte", "quelq ue fatale o rdo nna n ce " qui p ou ss er ai en t l'un vers l'autre des êt re s en "sympathie". Res te alors à exp l iq ue r com me n t il faut c om p r en dr e "l'amo ur de c o n s i d e r a t i o n " .

(Troisième journée - ff. 24-33)

Cloridan, en effet, p la ce au n oe ud de son di sc ou rs cette ma xim e "très veritable " que "la co g n oi s s a nc e d oit pr ece der 1 amour". Mais, il fa udra it d abor d gue les ho nn êt es dame s aient a ccepté la r éh ab i l it a t i o n d'amour. Contr e lui, une s e u -le accusation: l'honneur qu 'i l c oûte aux dames. Or, il est aisé de prouver que cet i nco nvé ni e nt ne tient qu'à la seule imprudence. En revanche, les ar gum ent s en faveur de l'amour sont irréfuta bles: l'âme est faite pour aimer, c om me les o r e i l -les pour e nt end re et les y eu x pour voir, car l' amour est une fac ulté naturelle, un insti nct de vie. En somme r efuser l'amour c'est a cc user la na tu re d ' ig n o ra nc e ou d'injustice.

Q u an d les da me s ob je cte nt que la ch as t et é est re c om mand ée aussi bie n par les loix di vi ne s que par les loix humaines, C l o -ridan refuse de ré pond re pour ce qui ap pa r ti en t aux t h é o l o -gie ns seuls mais peut d én on c e r la fa ib less e des loix humaines, vari able s suivant les temps, d is s e mb l a b l es selon les pays. Cette règle de la cha stet é n'est, en réalité, g u 'u n "honneur faux", une "mi serable con trainte", une "p e r s ec ut io n du temps". Du reste "1 honneur", comme un é t r an ge r impos é au corps, ne pese guère face à l'amour gui a pris n a i ss a n c e et rac ine avec 1 etre meme. Ten te r de se vai nc re soimême, au n om de l ' h on -neur, serait ap por ter "la g uer re civile" en son prop re corps.

(Quatrième journée - ff. 3 4 - 4 4 )

Aux dames qui se d e ma n de nt si de tels pr éc ep t es s ' a d r e s -sent aussi aux femmes mariées, C lor i da n pré ci se que ses pr op os

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co nc e rn en t to utes les femmes, c omme tous les m é di s an t s en g é -néral. Au demeurant, il ne rép rou ve pas le ma r i ag e en tant q u 'i n s t it ut io n dont il re co nna ît l'ancienneté, l 'un ive rsal ité et l'utilité. Son inte rprétation, fondée sur la déf i ni ti on hab it ue ll em en t reçue, en est t outefois fort singulière: si l'on admet que le ma r ia ge est un lien sacré; les m ar qu es de la bé né d i c t io n di vin e d o iv en t ap pa ra îtr e dans l'affection, l'amour, la c on co rde en tre les époux; lors qu' au co nt ra ir e se voie nt tous les effet s de la terre et du dia bl e - "courroux, hayne et discorde" -, on p eut co ns i dé re r que D ieu a retiré sa bén éd i ct io n et d is sou t l'u nio n céleste.

Le ma ri a ge sans amour n'est donc plus le m a ri ag e et, si le dé so r dr e social n'éta it à craindre, on p ou r ra it très l é -gi ti me me n t to lérer le di v orce qu' a va ie nt d' a i ll eu rs reco nnu les anciens. Pu is qu 'on ne saurait aujou rd'h ui l'introd uir e sans scandale, il est p ré fé ra b le de laisser telle qu' ell e est l'injuste loi et de considérer l'ami de co eu r comme le vrai mari, v olon t ai re me n t choisi, et l'époux co mme un mari imposé par la tyrannie.

(Cinquième journée - ff. 45-52)

Enfin, Cl or idan e xp liq ue ce qu'e st ce t te " co gn oi ssa nce gui d oit pr éc éd e r Amour", d é li an t ainsi le "noeud" de son d isco urs Il ne pr o pos e pas une longue rec herc he qui permet le plus s o u -vent, aux amants d él oy au x de tendr e leurs p ièges et gui, s u r -tout, alerte les médisants, mai s une di sc r èt e o b s er va ti o n et une fine enquêt e grâce a ux q uell es on conna ît sûr emen t celui qu 'on aimera.

Les qua lit és que doit p os sé der l'ami sont di ct ées par la co nv i ct io n qu ' au cu n amour ne saurait être p ar fai t sans que l'âme et le corps n'y pa rti cipassent: l'un serai t trop b r u -tal, l'autre trop imaginaire.

(Sixième journée - ff. 53-63)

Une fois cette él ec t io n faite, d'u n ami "ap proc han t de son rang et de sa qualité", la da me d oit pouv oir jouir de sa p r é sence et de sa co n v e r sa t i o n sans év eil ler les soupçons; C l o r i -dan en ensei gne le moyen. C o n tr ai re m en t à l'usage, c 'est la dame qui p rendra l' in it iat ive de ma n i f es te r ses i nten tio ns par quel que signe, sans effronterie. Un h e ur eu x ama nt ne sera pas

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imp rude nt car ce sont, en général, les i mp at i en ce s et les ja -lousies qui c on du is en t aux i n di sc ré t io ns du desespoir.

La p ro p o s it i o n se mble au d a ci eu se certes, et C lo r id an a bien de la p ei ne à p e r su ad e r les dames h o nn ê te s q u ' el le s p o u r -raient, sans ris quer 1 esti me de leur ami, se co m p or t er ainsi, comme des "desbordée", des "louves", des " e s g o u l d r i n e s " , des "femmes à toutes gens".

(Septième journée - ff. 64-75)

La m é t ho de et les "remedes" con tre les médi sant s, tels que les a p rop o sé s l'orateur, s u p p o se ra ie nt fin ale me nt q ue la dame fut très libéra le d 'un "gage fort cher et p r e c i e u x " . D oit- on faire si bo n m a r c h é de ce qui est co n si dé ré c omme le de rnie r degré de jouissance, co mme u ne b é a t it ud e celes te?

Les chose s rares, r ec onn aît Cloridan, sont plus estimée s mais la d if f i cu lt é et l'att ente ne font rien à la valeur d' un bien. O n att ri b ue ab u si ve me nt du mé ri t e au temps qui "des- truit o rd i n ai r em en t ce d e q uo y il a esté luy mes me s autheur". Sans doute, la p o s s e ss i o n tue le d és ir m ais aug me nt e l'amour qui ne se n our rit pas de vai nes esp érances. On ché ri t d a v a n -tage ce qui est l ibér al em en t d onn é que ce qui est c hè rem ent vendu.

Les dames, enfin, cou re n t toujo urs à l'impossible: elles s' effo rc e nt d 'é t e in dr e le dé sir q u an d il est le plus vé hém ent et vo ud ra ie n t ens uite le rallumer lorsque va ines e sp é ra nc es et longu eur de temps l'ont éteint.

EMPRUNTS AU GENRE: STRUCTURE ET THÉMATIQUE

Com me tous les "arts d aimer", le Discours se pl ac e o s -te nsi bl em en t dans un her i ta ge qui remonte à Boccace. Le cadre, 1 or ga n i s at i o n interne ne mé n a g en t aucu ne surprise: le débat a lieu dans la soc iété p olie où g e n ti l sh om m es et d a m o is el le s pas -sent leur temps en p la is an t s devis. M êm e si l ' hi stoi re ca dre co mme 1 auteur 1 ann once "aux lecteurs" - est ici réduite au minimum, la conversat ion, di s t r ib u é e en sept journées, se pr es en te dès les pr em ie rs mo t s com me une séq ue nc e de la vie d'une no ble compagnie:

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Clorlnde, commença son discours en ceste sorte: Mes Dames, puisqu'il vous plaist que je vous fasse entendre, comme je vous promis hier [••-]

(fol. 1).

La p ré senc e fé min ine est, en effet, at ten due et né ce ss ai re dès lors que la civile c on v e r sa t i o n se dé r oule d ans un cer cle ar isto cratique. Mais, co mme dans la p lu part de ces disco urs d éve lo pp an t une c asu is ti q ue amoureuse, le rôle des da mes est e ss en ti el le me nt fonctionnel: C lé op hi le et Cl or in de sont inci- tatr ices et o r do nn at ri ce s de la p aro le masculine. D' ai ll eu rs la d i ss er ta ti o n de C lo ri da n ne se veut pas d ia lo g u é e mais adopte seul emen t la forme d ia lo gu ée c om me une d yn am ig ue de l ' a r gu m e n -tation. C'est pourq uoi il répon d aux de ux d ame s qui r e v e n d i -qu en t "la liberté" de le contredire:

Mes Dames, je desire que vous me respondez tant qu'il vous plaira. Car les raisons disputées, sont par ce moyen mieux esclarcies (fol. 2).

Dans la p rem iè re journée, il semble que le dé bat s' inst aure dans un v ér it able "trialogue", op po sa nt le ré a lism e abrupt de C lo rida n au fém inisme de C lé op hi le et à la v e rt u prud en te de Clorinde. Mais, par un h a bi le procédé, le Discours rompt le débat à peine engagé: les dames dé cl are nt forfait, a nn on çant leur int enti on de "se servir des e le ment s du di sc ou rs qui s e m -bler ont utiles", et de "laisser le reste". Désormais, les in -t er ru p-tio ns de C l éo phil e et de C lo rind e int er vi en ne nt t oujours à un m om en t st ra té giqu e de la rh ét or ique du discours: t r a n s i -tion entre le pro et le contra, pallier en tre d eu x aspec ts de la question... Ainsi les e x cl am at io ns ind igné es po nc tua nt chaqu e argum ent prése nté par Cl o ri da n int ro du is en t un élémen t an tit hé ti qu e qui fait pro g re ss er la " diss ertation"; en realité, elles e xp rim ent le plus souvent une op i n i on re çue que le r é a -lisme scept iqu e et pr a g ma ti qu e de C lo rid an ve ut recuser:

- "la vé rité a t ou jour s assez de force pour se faire co- gnai stre" (f o l . 7);

- "l'a mour est le v r a y et seul e nne my de l 'h on neur des D a -mes" (fol. 8 );

- "l 'amour ne doit tend re qu 'à ma r ia g e (fol. 37).

Simple ressort rhétorique, le pe rs on na ge fé min in n'a pas d' ép ai ss eu r psycho logi que: aussi, la mê m e Cl éo p hi l e peut, dans la p re m iè r e journée, a ff ir mer que la sage sse e n ga ge une dame honn ête à bannir r adi ca le me n t l'amour, et, dan s la seconde,

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ap prouver la pr ud enc e de cell es qui ch o i si s se nt un amour de " d e s s e i n " ...

L or sq u'e lle s n ' in t er vi e nn en t pas p our con tr e di re Clori dan les da mes que s ti on n en t p our introd uir e u n e p r éc i s io n ou bien une no uv ell e figure du raisonnement. L'e xpo sé sur les d i f -ferent es formes de l'amour s'organise, de la sorte, autour des q ue st ion s de Clorinde: "apprene z moy, s'il vous plaist, que veut dire Amour de co ns i de rat ion ?" (fol. 23). De même, les réfl exio ns de Cl or ida n à pro pos du m ar i a g e i nt er vi enn ent g r â -ce à une q u est ion de Cléo phi le qui s 'i nq uiè te de savoir si toutes les femmes sont ég al em ent co n ce rn ée s par ses conseils.

A rt i cu lat eur s du discours, les de ux dam es en or don nen t e nf in toute la st ructure pu is que la prise de p ar ole de C l o r i -dan, nous 1 avons vu, se fait à leur requête et que les d e r -niers m ots du disco urs leur sont laissés: comme elles a vaient engagé C l or ida n à parl er au début, elles l'exhortent, au terme de la septième journée, à " prendre la p ei ne de m ett re ces d i s -cours par écrit".

Le Discours, dans sa c ompositi on, ne fait q u 'u t il is e r en somme des proc édé s qui sont de ve nus la loi du genre: Clé oph ile et Clorinde, impulsant le ra iso nne men t de Cloridan, hé r ite nt du rôle imparti à V er d es p in e ou à Sauvage dans le Discours de

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Fi renzole ; Cloridan, prene nt la pa rol e pour s' a cqu it ter de sa promesse, est le dign e succ ess eur de Phi las tre qui, dans le Discours des champs faez , sommé par les d em oi se l le s de la c o m -pagnie, entame un prop os réglé contr e les "hommes medisans".

Si le Discours en la faveur des dames appa raî t d 'a bo r d comme une va r ia ti o n sur un thème li ttérair e dont le su ccès n'est plus à prouver^, on s attend alors à y re nco ntr er que lques

Discours de la beauté des dames, prins de l'italien du seigneur Ange Firenzuole florentin, par J. Pallet Saintongeois, Paris 1578. Dans le tex-te de Firenzole (publié pour la premiere fois en 1548). Celse, jeune gen-tilhomme de Prato, est incité a parler par quatre demoiselles; la traduc-tion elle-même, celle de 1578, voit le jour sous le patronnage de deux "belles et vertueuses damoiselles, Jane et Ysabeau de Piarrebussiere".

3 ,

C. de T a i l l e m o n t , Discours des champs faez, a l'honneur et exaltation de l'Amour et des Dames, Lyon 1576. Le seigneur Philastre, avec son ami Theleme, a rejoint une noble compagnie retirée "aux champs", et là, après des propos et des jeux divers, il tient la "promesse" faite aux dames de leur donner victoire par ses raisons... (voir: premier dis-cours, pp. 93 et suiv.).

^ Des 1610, la BibJ.iotheca exotica (Frankfourt, P. Kopf) classe dans une rubrique particulière le genre "libri erotici et gynaecologi" - p. 163.

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m o t i f s r e b a t t u s ; l ' é p î t r e l i m i n a i r e en a v e r t i t d ' a i l l e u r s e x -p l i c i t e m e n t le lecteur:

Je spay bien que tant de diverses personnes ont escrit sur le sujet de l'amour, qu'il servit à present bien mal aisé d'y pouvoir rien adjouster [...J

Le p e r s o n n a g e d e C l é o p h i l e es t s o u v e n t le p o r t e - p a r o l e de t o ut e s les i dées reçu es: a us s i c 'e s t e l l e qui se m b l e d e v o i r re le v e r le d r a p e a u d u "s ex e femi ni n". U ne r e m a r q u e de C l o r i -da n sur 1 i n j u s ti c e d es h omme s, q u i ju ge nt d i f f é r e m m e n t de 1 h o n n e u r s e lo n q u ' il est m a s c u l i n ou fé min in , est l ' o c c a -si on - s a i s i e au x c h e v e u x p o u r r a i t - o n d i r e - p o u r p l a c e r la d é c l a r a t i o n f é m i n i s t e d e Cl éo ph il e :

Je suis bien aise que vous confessez, Seigneur Cloridan, que les hom-mes ont usurpé une domination violente sur la liberté des femhom-mes for- ceant en cela la justice naturelle, qui les a faictes esgalles à eux (fol. 4).

C e pe n da n t, l ' i n t e r v e n t i o n ne c on n a î t pas d ' a u t r e d é v e l o p -pe ment; u n e fois c e g a g e d o n n é à un su je t à la mo de, il n 'e n est p l us q ue st i on . Da ns la lis te de s r e m è d e s q u e C l o r i d a n p r é t e n d a p p l i q u e r au x b l e s s u r e s de la m é d i s an c e , o n ne s' é t o n n e p a s d a v a n t a g e de t r o u v e r de s r èg l es d e v e n u e s c l a s s i q u e s d e p u i s l'Hécatomphile-. l' a-m a n t idéa l es t c e l u i qu i se s i tu e e n t re la t u r b u l e n t e j e u n e s s e et la f â c h e u s e v i e i l l e s s e , qu i a l' h um e u r e n j o u é e et la c o n -v e r s a t i o n a g réa bl e, le c o eu r f i d è l e et lib éra l^ . M ai s une fois e ncor e, ce ter rain, à p e i n e inve sti, e st ab a n do n n é . Il s em b le b i e n a lo rs qu e ces a l l u s i o n s s u c c e s s i v e s v e u i l l e n t ê t r e plus q u ' u n e c o m p i l a t i o n de t h è m e s usés.

Pour mesurer la fortune du thème, il suffit de se reporter à J. G a y, op. cit., et à l'anthologie commentée de J. ï. et L. G u i 1 1 e n m, L. H o r d o v i, M. F. P r e j u s, Le Miroir des femmes, t. 1, PUL, 1983, deuxieme partie, La philosophie de l'amour et les arts d'aimer. Cf. Discours en la faveur des dames..., Journée V, ff. 50-52, et Hecatonphile de M. Leoo Baptiste Albert Florentin, en laquelle s'apprend i' ■t d'aymer, Paris, L. Breyel, 1596, fol. 14-26.

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EVOLUTION DE LA PHILOSOPHIE D'AMOUR: CONTRE-MORALE OU MORALE "NATURALISTE"

Le Discours, en effet, veut a f fi rme r sa p e r t in e nc e pa r r a p -port à toutes les opi ni ons qui se sont e xp r imé es sur le même sujet. Il n' ig no re rien de la di sp u te "f éministe" mais ce n'est pas dans ce c h amp q u'il sou ha ite jouter. Il ne m é c o n -naît pas da va nt a ge la ph il o so p hi e né o -p la t o n ic i e n n e ma is le pl aidoy er de la p r em ièr e jour née en faveur d' A mou r la situe plutôt co mm e une réf ér enc e hi s to r iq u e qu e co mme un argu ment décis if :

La pluspart des autres ont creu qu'il y avoit quelque divinité en 1 Amour comme estant [à ce qu ils ont tous dit] le principe du mou-vement de la vie passée, l'aliment et le souverain bien de la presente, la douce esperance de la future, et la principalle cause de la genera-tion, pource aussi que toutes Creatures intelligibles celestes ou ter-restres, n ont point d armonie entre elles que par l'amour [...] (foi. 1 0).

Cl ori d an a le souci de pr é se n te r la sy nth èse de tous les a rgum ents fav ora ble s à son propos, mais il p r e nd vis à vis d' eux une di s ta n ce qui ap p ara ît c la i re me n t ici.

On po u rr a it alors, tout s implement, pe nse r que le Discours ap par ti ent au cour an t h é do ni ste de l'Hécatomphlie ou p ar o diq ue de la Raffaela? ne s 'ag it- il pas d ' en g ag e r les femmes à s a -tisfaire leurs amants, tout en g ar da nt l 'a p pa ren ce de la plus ver tu eus e c on duite?

Sans doute, le Discours é v oqu e c l a i r em e nt ces attitudes. On se so uvient de C l éo ph ile louant le bon sens de cel le s qui c ho i sis sen t "l'a mour de dessein": un amour fondé sur la "commodité" et qui c on si ste à savoir cueillir, q u a nd el les se pré se nte nt sans épines, les roses du plaisir. Dans sa bouche, se retr ouve la d é f i ni t i o n mêm e d 'une ét h iqu e de la j o u i s s an -ce:

Le bonheur consiste à recongnoistre et ressentir son contentement en sa condition et en ce qui est en sa possession (fol. 18).

Cependant, Cl éqp hil e ne p r on o nc e ces m a xi m es que p our d o n -ner

à

C lo ri dan o c ca s io n de les refuter; l'orateur, en effet, récuse un e m or al e qui acc ord e t rop au corps et pas assez à

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l'esp rit: "V o i l a un e b e l l e P h i l o s o p h i e t rès b i e n r a p p o r t é e aux p l a i s i r s s e n s u e l s et t e r r e s t r e s " 1

Le Discours pr opo s e, en ré alité, u n e a u t r e m o r a l e a d a pt é e à un t e mps o ù l ' i d é a l i s m e n é o - p l a t o n i s a n t e st d e v e n u f orme v id e de sens et le c y n i s m e de s "A rts d ' a i m e r " jeu d ' e s p r i t inopé ra nt. Il faut e n t e n d r e l i t t é r a l e m e n t l ' o p i n i o n de C l o r i -d a n qu i s 'ex pr im e , r é f é r e n c e f ai t e à to us c e u x q ui p a r l e n t de

l' am o ur en ph i l os o ph e:

Mais je pense, pour en parier, selon ce temps, humainement, qu'on peut justement appeler [l'amour] mary et compagnon de la nature, à cause que peu, ou du tout point de procreations se font sans amour (fol. 1 1).

M o i n s qu e la d é f i n i t i o n e l l e - m ê m e - q ui n' a p a s le m é r i -te de l ' o r i g i n a l i t é 6 -, ce qui r e t i en t l ' a t t e n t i o n ici e st la v o l o n t é d é c l a r é e d ' e n t a m e r u n e r é f l e x i o n réa li s te , f on d é e sur l ' h um a i n e n at ur e " et sur les m o e u r s du " pre se nt " . D u reste, le Discours p r e n d ses d i s t a n c e s au ss i b i e n vi s à vi s d es s p é c u l a -ti o n s de la p h i l o s o p h i e qu e d e s c o n s i d é r a t i o n s de la théologie, p r u d e m m e n t r e n d u e s "aux c h o s e s d e la foi" (fol. 29).

L a u te u r du Discours es t p é n é t r é de la r e l a t i v i t é des loix hum ai n es ; il fai t de C l o r i d a n s o n p o r t e - p a r o l e po u r e x -p r i m e r un e é t h i q u e d ' i n t e l l e c t u e l dés a bu sé : l ' h o n n e u r so c ia l n 'e s t q u ' u n e o m b r e q ui v a r ie av ec la d i v e r s i t é de s pa y s et d e s épo que s; t a n t ô t é c h o m é p r i s a b l e de l ' o p i n i o n vulgaire, t a n -tôt i n j u s t i c e m a n i é e par les h o mm e s c o m m e u n e ar me de p o u -vo ir... L ' h o n n e u r n ' e st d o n c pas un e v é r i t é m o r a l e e s s e n -t i e l l e m a i s un s i g ne q u e l' on p e u t i n t e r p r é t e r à sa guise. La r e l a t i v i t é d e la n o t i o n s ' e x p r i m e d a ns l ' a m b i g u i t é des m o t s q ui s e r v en t à la dé f in i r* A u s s i l' é c he c d u d i a l o g u e e n -tre C l o r i d a n et les d e u x d a m o i s e l l e s n ' e s t p as u n a cc id ent ; il s i nscrit , dès la p r e m i è r e jour née, c o m m e le s ym b o l e d ' u n m a l e n t e n d u si gn i fi c a t i f . L o r s q u e C l o r i d a n e m p l o i e les m ot s

"a i me r et h on or e r" , c ' e s t d an s leur sen s pr em ie r, c o m m e a n t o

-M a r g u e r i t e de^ N a v a r r e , dans 1 'Heptameron, adop-te une semblable opinion, fondée sur la théorie galénique de l'émission conjointe des semences féminine et masculine: "Et combien qu'elle fut très belle femme et lui homme de bonne complexion, fort puissant, si est-ce que jamais elle n'eut enfant de luy car son coeur était toujours à sept lieues de son corps" (N. LXI, éd. Bibl. de la Pléiade, p. 1061).

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nyme de "b lasme et honte", tandis que les d eu x d ame s e nt e nd en t leur d onn er une a c ce p t i on re nv oy an t à l'u sage mondain:

aymer et honorer une Dame, c'est desirer d'elle et luy vouloir ravir, soubs ce faux pretexts d'amour, ce que les loix divines et humaines luy commandent si soigneusement de conserver (fol. 28).

Les m ots et les choses, tout est faux s e mb la nt dans le m on de qu év oq ué et que d én o n ce le Discours. Les rap po rt s m o n -d ains sont ma r qu és par l'e nvie et 1'âp re té des désirs; la m éd i s an c e est un m al social par définitio n: comm e une o b s e s -sion, r ev ien nent d ans la bou ch e de C l o ri d a n les m ot s "mesdire", "soupçonner", "espier", "controller", "tourmenter", " t r a v e r -ser", "jalousie", "envie", "despit", "v engeance", "malice", "calomn iate urs". .. Autant de malheurs, a ut a n t de vices i n h é -rents à l'état social qui, en pa r t ag ea nt les c hos es et les bien s ent re les hommes, e nt r aî ne n éc e s sa i r em e n t l'envie de pr en dr e à autrui, la d i s s i m u l at i o n et la calomnie. L' âge d'or n était pas, co mme le croit "le p opu laire ", le tem ps où tout étai t à profusion, m ais le te mps où tout é tai t en co mmu n (fol. 32).

Le Discours voit la vie m o nd a i n e c omm e un lieu d'erreur, d 'i l l us i o n et de p e r v e rs i o n des valeurs, d é v e l o pp a n t en somme des cr it iq ue s s ouve nt fo rm ulée s par les p oèt es et les m o r a l i s -tes de la seconde m o i ti é du s i è c l e 7 . Mais, il n ' e n v is a g e pas ce pe nd an t qu 'on pu i ss e lui éc h ap pe r - к C l é op hi le qui p rop os e "le d e se rt et la solit ude" pour fuir la méd isanc e, Clo ri da n m o nt re l 'i mp os si bi li té du projet, surt out lo rs qu 'o n est " b e l

-le d emoisel-le". Il p r op os e don c de s' a da pt er au monde, non pas, co mme on p o u rr a i t le c o mp r en dr e d'abord, en o pp os a nt l ' h y -poc ri si e à la d i s s im u l a t i o n de s hommes, ma is en a do p ta nt les

Bien des traités de "civilité" dénoncent en effet la médisance comme le vice le plus familier du monde, voir, par exemple, La civile conversa-tion du seigneur Estienne Guazzo, trad, de F. Belleforest, Geneve 1626, Livre I, fol. 53 v°. L adjectif "mesdisant" se rencontre d'ailleurs dans la définition du mot "courtisan", avec bien d'autres qualificatifs péjo-ratifs, chez M a u r i c e de la P o r t e (Les Epithetes,Lyon 1602, fol. 97-98) qui ajoute ce commentaire, significatif de l'évolution séman-tique du terme: "J affermeroy volontiers [...1 que le nom de courtisan est venu de courtois, d autant que ceux lesquels hantent aux cours des Rois et Princes sont ordinairement fort gracieux et civils. Neântmoins ce mot qui est honnorable selon l'etymologie est maintenant si infame que pour declarer un homme vicieux en supremelatif degré on l'appelle cour-tisan [...]".

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v r a i e s va l e u r s de la nat ur e, san s h e u rt e r les f au s s e s v al e u r s Q

de l ' o p i n i on . La f o r m u l e d e C l o r i d a n - " l ' h o n ne u r" est ch ez nous c o m m e un é t r a ng e r im p os é t an di s g ue l 'a m ou r y a sa " n a i s -san ce et raci ne" - ré su m e ce t t e p h i l o s o p h i e n a tu r al i s te , t r a -d ui t e auss i p ar u n c o r p u s s é m a n t i q u e -qui c o n t r a s t e a ve c le p ré céd en t: " j us t i ce n a t ur e l le " , "c o m p a g n o n de na tur e", " p r o -c re ati o n ", " f a-c u l té n a t u r e l l e m e n t am ou r eu s e" , " fa c u l t é née"... O n ne peu t re n o n c e r à sa n a t u r e san s êt re p e r v e r t i de " n a t u

-rel m a l i c i e u x" ou de " d i a b o l i c q u e n a tu re" - ou bi e n sans i n -tr o d u i r e la c o n f u s i o n en no u s-m êm es .

La sa g e s s e n at u r e l l e e x i g e qu e l 'o n s a t i s f a s s e les a u t h e n -ti q ue s a s p i r a t i o n s de l 'ê tr e m ai s la s a g e s s e h u m a i n e veut a us si q u ' o n le f ass e sans sc a n d a l e p our l 'o r d r e social. La d é f i n i t i o n qui est d o n n é e du malriage e s t t ou t à fa it c a r a c t é -r i s t i q u e de c e tt e att itu de . D ' u n e p a r t on r e c o n n a î t la l é g i -ti m i t é du p r i n c i p e du di vo rc e , dès lors q u e la p l u p a r t d es m a r i a g e s sont tr a it é s c o m m e de s " a ff a i re s d ' a r g e n t " et n'on t p l us r i e n de sacré, d ' a u t r e p a r t on se m é f i e d u s c a n d a l e gu'in- t r o d u i r a i t un tel c h a n g e m e n t de loi. O n p r o p o s e a l or s de r e n -dr e à la so c ié t é ce g u ' e l l e exige, c 'e st k d i r e le r es p e ct de s co n ve n an c es , et de d o n n e r à la ra i s o n n a t u r e l l e tous ses dr oits: la fe mme p eu t a i me r un autr e q u e so n ma ri, " po u rv e u q u ' e l l e s 'y g ou v e r n e avec ta nt de p r u d e n c e et de d i s c r e s s i o n q u ' e l l e en é v i t é le s canda le ".

E n somme, à la fois h o m m e "civ il" et p h i l o s o p h e " n a t u r a -liste", l ' a ut e ur du d i s c o u r s o p t e po u r u ne m o r a l e n a t u r e l l e d a n s u n c o m p o r t e m e n t social.

l'attribution du d i s c o u r s

C om me l' a n n o n ç a i t l ' é p î tr e "aux le cteur s" , l ' i n t é r ê t du Discours en la faveur des dames ne r és id e pa s d a n s l ' o r i g i n a l i t é d u

® Le Discours concilie de la sorte deux thèses que I o n avait coutume d'opposer. En 1557, dans ses Dialogues contre les nouveaux académiciens, Guy de Brues met en scène une dispute entre Baif, tjui soutient la nécessi-te de vivre "suivant la nature" et non "suivant 1 opinion et les lois", et Ronsard qui réfute ces vues trop hardies. Voir P. de N o 1 h a c, Ron- sajrd et l'humanisme, Paris 1921, p. 169. Mais, à la fin du siècle, Mon-taigne refuse les conventions, les artifices et une morale qui "dechirent l'homme tout vif" (Essais, III, 5). Si l'on veut rapprocher le Discours de la philosophie "naturaliste" qui s'exprime à différents endroits des

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thème, mais bie n dans une ét hi qu e qui le dat e de ma ni èr e très significative. La c on s ci en ce de la r el at ivit é des moeurs, l'ac- com o de me nt ré alis te à un o rdre social d ont on m es ur e les vices, rat tachent le Discours à une mêm e famille de textes parus dans le dernie r quart du XV I e siècle. Cependant, la q ue st i o n p r é -cise de l' id en ti fi c at io n d' un auteur qui n'a pas jugé o p -p ortu n de se laisser c on na ître reste -posée.

Généralement, la pat er n it é du Discours est a tt ri buee à J ean Pallet, m é d ec i n d ' Hen ri de Bourbon, Prince de Condé, et, à ses heures, tra duct eur et lexicographe. Pl us ieu rs éléme nts p er met tent d ' ac cu ei ll ir fa vo ra blem ent c ette hypothèse. Jean Pallet, en 1578, se di st r a i t de son Hlppocrate et de son Gallen pour tra duir e le Discours de la beauté des dames d Ange Firenzole, et en offre l' édit ion à Je anne et Y s ab ea u de P i a r r e b u s s i e r e 9 . Ces deux d emoiselles, dont il loue la beaut é du corps et de l'esprit, po ur raie nt bien être les mo dèl es de ces deu x autres belles dames, C lé oph ile et Clorinde, dont Cl or id an se p laît à dire les perfections. O n ad me ttra it alors que, que lqu e s années après cette traduction, le mé d e ci n se soit à no uve au laissé tenter par u n "pl aisant discours" sur l'amour et sur les d a -mes. La phi lo so ph ie "naturelle" du Discours en la faveur des da-mes, l'a llus ion à la théor ie s ém ina list e ser aien t en qu elqu e sorte des signatu res échapées. Incontesta blem ent, l'auteur du Discours a plus de goût pour la r igueur du ra iso nn em en t que pour les fleurs de rhétorique; il avoue, dans la préface, p r é -férer la clarté du sens à la bea uté du langage;

En telles choses qu'on doit bien clairement faire entendre, j'ay opi-nion qu'on a plus de besoin de cercher des paroles propres à faire bien comprendre ce qu'on desire qui soit sceu, afin de n'y laisser rien d'embrouillé ny d'obscur que de s'attacher à des beaux mots doux, coulans, et recercher, qui détournent communément le vray sens de toutes choses, que ne sont les termes ordinaires, bien qu ils sem-blent estre plus rudes et grossiers.

La p ri nc ipal e o c cu pa ti on de Jea n Palle t n est é v id emme nt pas la littérature; la préface de sa tr ad uc ti on d u Discours de

la beauté des dames nous a pp ren d qu 'il ne peut écrire ou s'oc-Essais, on consultera l'étude de G. N a к a m, Eros et les muses dans

"Sur l'es vers de Virgile", [dans:] Etudes seizlémlstes offertes a V.-L. Saulnier, Droz, 1980, pp. 395-403.

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c u pe r d e l ' é d it i o n de ses o e u v r e s q u ' e n t r e d e u x v oy ag es, à la f a v e u r de q u e l q u e l oi s i r q u e lui la iss e sa v a c a t i o n 10. Ainsi, so n Dictionnaire français-espagnol1 1, p a r u en 1604, e st le r é -s u lt at d ' u n e b l e s s u r e qu i l'a te nu c l o ué au lit p lu s de tr oi s ans. F a u t - i l al o r s p e n s e r q u ' i l a pu, d u r a n t c e t t e P eriode , S o c c u p e r é g a l e m e n t du Discours en la faveur des dames r é d i g é de p u i s sep t o u h u i t ans déjà, s e l o n les i n d i c a t i o n s de l 'é p î t r e " au x l e c t eu rs " - p ou r le c o n f i e r au l i b r a i r e gui S é ta i t c h a r g e d u Discours de la beauté dos dames, A be l L ' Angelier, t an d is g u il d o n n a i t le Dictionnaire à M a t h i e u G u i l l e m o t ?

En tout cas, ce sont les p u b l i c a t i o n s de ce s d e u x l i b r a i -res du P a l ai s qui p e r m e t t e n t de r e c o n s t i t u e r un p e t it c e rc l e d a u t e u r s - do n t J e a n P a l l et et A r t u s T ho m a s - qu i se c ro i s e n t et se m ê l e n t p our ce qu i r es te un jeu de leur p l u m e éga rée. En effet, p ar a i t en 1596, p ui s 1597, ch ez L u c a s Br e y e l et M a t h i e u Gu i ll e mo t , u ne c u r i e u s e Exhortation aux dames vertueuses qui est, en fait, a u s si un p l a i d o y e r en fa v e u r de l ' a mo ur c o n -tre le p o i n t d hon neu r. On y lit, p r e s q u e m o t p o u r mot, la m e m e d é f i n i t i o n de l 'o pin ion , a ve c la m ê m e c o n c l u s i o n qui s ' i m -pose: " l e qu e l est le pl us r ai s o n n a b le , je v o us prie, ou q ue la na t ur e o b e i s s e a 1 o p i n i o n c o m m u n e ou q ue 1 o p i n i o n c o m m u n e o b e i s se à la Tiature?"1^. L a n n é e d ' ap rès , le m ê m e li b ra i r e fait p a r a i t r e un e p r é t e n d u e r é f u t a t i o n Discours contre un petit traite intitulé: Exhortation aux dames vertueuses, s i g n é e A. T. Ces i n it i a l e s p o u r r a i e n t ê t r e c e l l e s de T h o m a s A r t u s g ui pu blie, e n 1600 Che z Lu c a s Br eyel, u n Discours contre la mesdisance 1 on r e t r o u v e les m ê me s d é n o n c i a t i o n s de ce s i è c l e " de sbo r dé " d o n t p â t i s s e n t to ut p a r t i c u l i è r e m e n t les femmes.

J. Pallet dit avoir également traduit ia première partie des oeuvres de Firenzole, contenant "l'Arraisonnement des animaux", mais faute de 1 avoir donnée aussitôt à 1 imprimeur, il a perdu sa peine car, durant f0n<,a^senfe ’ ^ons^eur de La Rivey a fait paraître sa propre traduction... (epitire a belles et vertueuses damoiselles [•••] de Piarrebussiere"> Dis~ cours de la beauté des dames...)

Dictionnaire tresample de la langue espagnole et françoise, à très illustre Prince Monseigneur Henry de Bourbon, Prince de Conde, par J.Pal-let, Docteur en médecine, Paris, M. Guillemot, 1604.

12

Exhortation aux dames vertueuses, en laquelle est demonstré le vray point d'honneur, Paris, L. Breyel et M. Guillemot, 1597, in-12, 47 p., analysé dans les Opuscules de G. P e i g n o t, Paris 1863, pp. 301- -311. Cf. p. 303 et pp. 30-31 du Discours en la faveur des dames...

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Si rien n' au to ris e u ne at t ri bu t io n c e rta ine du Discours en la faveur des dames, un ens emb le d 'i nd ice s nous ramène f in a l e -ment à deu x noms, Jea n Pallet et Artus Thomas, et surtout à deux lib raires qui savent, avec oppor tunité, r épondre au goût toujo urs re nou vel é d'une ce r tai ne cl ie ntè le - fémi nine

sur-13 tout? - pour la "ph ilo soph ie d'amour "

Université de Corse France

Evelyne Berrlot-Salvadore

MOWA W OBRONIE KOBIET PRZECIWKO OSZCZERCOM - KONTRMORALNOŚĆ ŚWIATOWA POD KONIEC RENESANSU

Autorka tego artykułu stawia sobie za cel przedstawienie anonimowej sztuki kochania z 1600 r., Discours en la faveur des dames contre les mes-disans. Prezentuje zawartość tego utworu: jest to filozofia miłosna podana w formie dialogu między Cloridanem a Cleophile'ą i Clorinde'ą, rozłożo-nego na siedem części (dni). Twórca broni tam tezy, według której kobiety są w równym stopniu uprawnione do miłości co mężczyźni, wbrew niebezpie-czeństwu, na jakie naraża się cześć kobiecą. Chodzi tutaj o miłość - kon-tynuuje pisarz - wynikającą z solidnej znajomości partnera i angażującą tak duszę jak ciało - tylko taka bowiem miłość jest w zgodzie z prawami natury, nie sprzeciwia się woli bożej i, przy zachowaniu odpowiednich środków ostrożności, pozwala na uratowanie dobrej reputacji.

Autorka analizuje następnie strukturę i tematykę Discours. Uważa, że utwór ten wypływa z tradycji gatunkowej sięgającej Boccaccia, czego

do-13 y

Abel l/Angelier travaille volontiers pour les gens de loi qui constituent l'essentiel de la clientèle du Palais (il a imprimé plusieurs coutumiers) mais il sait aussi offrir des traités de vénerie ou d art mi-litaire qui répondent aux goûts d'un public de gentilshommes. Lucas Bre- yel, qui s'est installé en 1595 - il était auparavant à Tours ou il avait suivi la Cour -, propose à la clientèle aristocratique de beaux li-vres illustrés (comme les Métamorphoses d'Ovide) et des textes qui cor-respondent à la mode du moment: ainsi il édite un dictionnaire de la langue espagnole lorsque l'intérêt pour la culture hispanique redevient vif. Associer le nom des deux libraires, à propos du Discours, n'est du reste pas une démarche arbitraire puisqu'a plusieurs reprises les deux officines ont travaillé en commun: en 1599 pour les XXIII Livres de l'"I- liade" d'”Homère, traduit par H. Salel et A. Jamyn; en 1605 pour le Recueil des oeuvres poétiques de Jean Bertaut (voir: Histoire de l'édition fran-çaise, I, Le Livre conquérant, Promodis, 1982, p. 388).

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patruje się np. w funkcjonalnej roli kobiet, a w konsekwencji w formie Dis-cours, którego dialogiczność służyć ma dynamizacji wykładu, nie zaś dia- lektyzacji przeciwstawnych poglądów.

Większość argumentów tradycyjnych przychylnych miłości przedstawiona jest w Discours w postaci syntezy przypominającej czytelnikom dotychczaso-wy dorobek w tej dziedzinie; tymczasem twórca proponuje jeszcze inny argu-ment: jest to przystosowana do nowych czasów moralność realistyczna, która opiera się na zgodności norm z naturą ludzką i obyczajowością czasów współ czesnych. Honor jawi się tutaj nie jako ponadczasowa prawda moralna, lecz jako pojęcie względne, które można Interpretować w duchu danych czasów.

Zastanawiając się nad autorstwem Discours, autorka sugeruje, bez pre-tensji do ostatecznego ustalenia, nazwiska dwóch księgarzy, Jeana Pallete i Artus Thomasa, dobrze znających gusty współczesnej im klienteli.

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