LA POLOGNE
ET
DES SLAVES
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LA POLOGNE
ET
DES SLAVES
PARIS. — IMP. SIMON RA<,'ON ET COMP., RUE u’eRFURTH, I
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LA POLOGNE
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NULLITÉ DES DÉMEMBREMENTS
FONDÉE SUR LE DROIT DES GENS
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FÉLIX COLSON
A UT E U II
DE LA POLOGNE ET DES CABINETS DU NORD
ETC., ETC., ETC.
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E. DENTU, LIBRAIRE-ÉDITEUR
PALA1S-ROÏAL, 15 ET 17. GA1.E1UE Il'oULIÏANS
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ET
DES SLAVES
CHAPITRE PREMIER
1
La famille ethnographique slave est évaluée en Europe à 80 millions. Quatre groupes la composent.
Dans la seconde moitié du dix-huitième siècle, un seul, celui de la Pologne, restait libre et indépen
dant. H jouissait d’une souveraineté puissante. Son territoire avait une surface de 13,500 milles carrés.
Victime d’une odieuse conspiration ludesque, la Pologne tomba frappée au cœur. Le coup était porté par des Allemands.
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DE LA POLOGNE
Un antagonisme fatal a divisé et divisera les Teu
tons et les Slaves. Au sixième siècle de notre ère, Jornandès, archevêque de Ravenne, auteur de l’his
toire générale des Goths, signale déjà les effets fu
nestes de ce duel sanglant.
Trois souverains d’origine germanique brisèrent la pierre angulaire de la nationalité polonaise. Les peuples épelaient a peine, alors, le droit public. Les rois violaient le droit des gens.
Au mois d’avril 1771, des plénipotentiaires russes et prussiens arrêtèrent les bases secrètes d’une inva
sion, transformée en conquête le 14/25 juillet 1 772.
Depuis, la Pologne, chargée de chaînes, ne put être domptée. Sous le cilice, elle a conservé l’indépen
dance du cœur, la male fierté de Spartacus. Person
nification de la douleur, emblème des larmes, effi
gie des souffrances, elle est restée, aux heures mêmes de l’agonie, grande, sublime, nationale.
Elle provoqua les persécutions, elle affronta les tortures, elle méprisa en face ses bourreaux. Elle brava leur rage; se joua de leur férocité. Elle les réduisit à l’impuissance.
Rayer le diamant de Pâme de la Pologne, vaincre
son énergie, altérer l’éclat de sa haine, dompter son
courage indomptable, furent des tentatives insensées
ET DES SLAVES.
et vaines, essayées mille fois par ses ennemis. Les supplices la régénèrent. Les épreuves, elle les tra
verse, mais elle en sort, comme aujourd’hui, tout armée dans l’unité de sa puissance.
Elle revivra dans cette unité, c’est la volonté de Dieu ; c’est la loi du dogme des nationalités, c’est l’espoir de la race latine, c’est le vœu, c’est l’intérêt de la France, puis enfin, c’est son droit.
Aux douleurs de la Pologne, le monde chrétien a ouvert son cœur. L’aspect d’une mer enflée des lar
mes et du sang des Slaves trouble et agite la con
science humaine. Le récit des meurtres qui rou
gissent la Vistule et le Dnieper a saisi d’effroi l’âme de ceux qui prient sur la croix. Bien d’aussi horrible n’existe dans le martyrologe des peuples.
Une expiation terrible attend les auteurs de ces crimes sans noms.
Sur 25 millions, chiffre officiel en 1 772, du dé
nombrement de la population du royaume de Po
logne, 15 millions seulement survivent'.
1 La branche leckite ou polonaise, qui, au siècle dernier, comptait
encore 25 millions d ’âmes, n’esl plus évaluée, dans les meilleures sta
tistiques slaves, qu’ à 10 millions à peu près, dans le royaume de Po
logne, la Wolhinie, la Podolie el l'Ukranie, 2 millions en Prusse, et
2,500,000 en Autriche. (Le Monde slave, par M. Cyprien Robert, tome II )
i DE LA POLOGNE
Dans l’espace de quatre-vingt-onze années, 10 mil
lions de Polonais, soumis à la double tyrannie de /a famille allemande des IIolstein-Gottorp et du Tchinn, ont disparu de la surface du globe. Les exter
minations, en moyenne, se son! élevées, par an, à 110,000.
Générations nouvelles destinées à la mort, persis
tez dans vos héroïques desseins ! Décimées chaque an
née, cimentez le vœu de périr en masse on de vaincre vos bourreaux.
Sacrifice pour sacrifice, martyre pour martyre, que votre sang serve au moins à affranchir la patrie.
Des femmes héroïques, vos mères polonaises, ont honte de leur vie mêlée d’angoisses. Que sont-elles?
des reproductrices. Leurs fils, arrivés à l'âge de pu
berté, seraient, envoyés à la boucherie ! Non ! Ce décret abominable ne peut, être approuvé dans les cieux! La mère du.Christ a dû implorer pour elles, et rappeler ses souffrances au pied de la croix. La loi qui défend aux hommes de tuer permet-elle aux rois d’exterminer la jeunesse entière d’un peuple?
Dix millions d’âmes intercèdent en faveur de la Pologne; chaque victime représente une protesta
tion sur la terre, une prière au ciel.
Ouvrez-vous, prisons de Breslau, de Magdebourg
ET DES SLAVES.
et deGlogau ! Ouvrez-vous, forteresses d’Olmutz et du Spilzberg. Ouvrez-vous, mines de Sibérie, montagnes du Caucase, cachots moscovites! Ouvrez-vous, cadres des régiments russes, changés en charniers des fils de Leck. Ouvrez-vous, tables mortuaires des trans
portés politiques, dirigés la tête à moitié rasée, la coloda aux pieds, sur l’armée dont ils ne reviennent jamais' !
O u v rez- vous, h é t a co m bes d es m a r t y rs polon a i s ! po r- tez témoignage devant l’Europe! Parlez, assassins égarés de la Gallicie! Parlez, lanières meurtrières du knout, usées sur la chair des victimes! Parlez, forêts immenses dégarnies de milliards, de dizaines de milliards de rameaux, transformés en verges rompues sur le dos des suppliciés, battus à mort!
Parlez, ossements blanchis des martyrs de la foi ! Parlez, proscrits! Parlez, hommes, femmes, enfants, tombés épuisés de souffrances sur la route funèbre qui conduit au Caucase! Parlez, malheureuses vic
times abandonnées sur le chemin de l’exil, con damnées à y mourir des tortures de la faim ! Parlez âmes bénies de Dieu, dites au monde par quelle!
bandes de loups féroces, par quelles nuées de vau-
1 Paroles du maréchal i'askiéwitz.
6 i)E LA POLOGNE
tours et d’oiseaux de proie, vos corps vivants furent attaqués et mis en lambeaux !
Parlez ! et flétrissez enfin de honte le Teutonisme.
Accusez-ledes millionsde crimes sansnoms, des mil
lions de meurtres qu’il a commis, qu’il commet jour
nellement ! Auprès des princes allemands, Attila et Hérode furent des saints dignes d’être canonisés.
Le roi des Juifs limitait le champ du meurtre à l’en
ceinte d’une ville, à Bethléem. Le czar l’étend au royaume baigné par la mer Baltique et par la mer Noire.
En ce qui touche seulement les êtres procréés, la statistique nécrologique est faite. Que serait-ce si les tables de probabilités étaient interrogées, si la loi sur l’accroissement des peuples, entrevue par Euler, était consultée!
Dans l’espace d’un siècle, la Pologne fut partagée sept fois. On parle d’un huitième démembrement.
Dieu, épargnez à notre époque la honte d’un crime nouveau ! La conscience humaine proteste. Armez d’une force surnaturelle le cœur et les bras des guer
riers polonais Ils sont abandonnés par l’univers en
tier. Secondez-les visiblement ! Guidez-les dans leur
sainte croisade! Eclairez leur marche à travers la
Moscovie! Avancez l’heure de la délivrance de la
ET DES SLAVES.
Slavie ! Brisez les chaînes des infortunés asservis à la domination étrangère du tzarisme et du Thinn !
L’idée du partage de la Pologne ne vient ni des Russes ni des Autrichiens, ni même des Prussiens.
Elle appartient à un Allemand, élu roi de Suède après l’extinction de l’ambitieuse maison de Wasa.
Charles-Gustave, de la branche des Birkenfeld, des Deux-Ponts, fut le premier auteur d’un projet de démembrement1.
Une alliance contractée avec les cours de Danemark et de Vienne sauva le roi Jean-Casimir.
Au moment d’abdiquer, ce prince eut la noble in
tention d’éclairer la noblesse. 11 lui révéla les préten
tions ambitieuses des cabinets du Nord.
Ses paroles étaient prophétiques, elles ne furent malheureusement pas entendues.
« Au milieu de nos discordes intestines, nous avons
’ Schœll.
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