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Costal l'Indien ou le dragon de la reine : scènes de la guerre de l'indépendance du Mexique

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Academic year: 2022

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ZN

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COSTAL L ' NDIEN

(3)

ComiEiL. — T y p . e t s tć r . d e Crktkfils.

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COSTAL L ' NDIEN

O U

L E D R A G O N DE LA R E I N E

S C I 5 N E S

DE L A GUERRE DE L ’INDEPENDANCE DU M EXIQUE

G A B R I E L F E

(l.OUIS DE BELLEM,

Q U A T R I E M E E D I T I O N A v e c u n e P r e f a c e d e Mm8 G E O R G E S SA N D

PARIS

L I B R A 1 R I E H A C H E T T E ET Cu BOUI,EVARD SAINT-GERMAIN, 79

1 8 7 5

D ro it d e t ra d u c tió n rć s e rv ć .

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S x u . n

B i b l i o t e k a J a g i e l l o ń s k a

1001351281

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G A B R I E L F E R R Y

SA V IE E T SES OEUYRES

Gabriel Ferry naąuit a Grenoble en 1 8 0 9 ; son pere, le baron Ferry de B elłem are, etait engage dans des affaires com m erciales avec le nouveau m onde ; apres avoir acheve d ’excellentes etudes au college de V ersailles, Gabriel Ferry fut envoye a M esico dans la m aison de com m erce de son pere.

Mais le jeune hom m e fut bientót em porte par 1’ardeur de connaitre et de posseder en artiste ce inonde si bizarre, si pittoresąue et si reyoltant, cette cirilisation q u ’il a lu i-m em e qualifiee de douteuse, et dont il a decrit les dram es burlesques ou terribles avec tant de \e r v e , de couleur et d’exactitude.

II voulut parcourir cette vaste contree tout en- liere et penetrer m em e dans l ’im n ien se desert qui la separe des E tats-U n is. U ne affaire im portantc que

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son pere avait nouee avec la C alifornie, alors presque .entierem ent sauyage, lu i p erm il de traverser la So- nora ; de yoir ensuite en passant les quelques huttes qui deyaient etre, yin gt ans plus tard, de la ville San- F ran cisco; de penetrer dans le desert, de reyenir sur ses pas a lravers les dangers de tout genre de ces routes m ai hantees; d’explorer u n e partie du littoral, enfin dc consacrer quatórze m ois a une prom enado a cheval de quatorze cents lic u e s !

A cteu r on tem oin oculaire de toutes lesaycn tu rcs qu’il a racontees, plus tard il se piquait de n'avoir presque rien in y en teet de d ev o irp lu s a la lid elite de sa m em oire qu’a la fecondite dc son im agin ation . Cette double faculte etait en lu i pourtant, et ses ri- ches observations se rattachent generalcm ent au lii conducteur d’une fiction in gen ieu se. 11 ecrit bien, il est sobre, rapide et colore. 11 a de Yhum our, il voit vite et com prend tout. Obseryateur cxact, il ne doit pas etre considere seu lem en t com m e u n artiste; ses recils ont une serieuse v a le u r ; l ’histoire des mceurs peut en faire largem ent son profit. Conteur atta- chant, yoyageur veridique, la popularite ne lu i a pas fait defaut, et c’est ju stice.

P lus tard, Gabriel Fcrry yit 1’E spagne.

II n ’ecrivit que durant les cinq dernieres annecs de s a y ie . Son debut fut tres-rcm arque et tres-ap- precie dans la Revuc des.D cux M ond.es1. II ne son-

•1. E n 1846, MM. M ole, G u iz o t, C a v illie r-F le u r y , M ig n e t e t aiitreS

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geait pas encore a faire des rom ans, il esąnissa d’une m ain ferm e les evenem ents et les pcrsonna- lites historiques qui l ’avaient frappe et q u ’il avait eto a m em e de b ien etudier. II '" rm t les S c e n e s de la v ie sa u v a g e a u M e x iq u e; celles de la xie sociale, et celles de la vie m ilitaire. Ses souvenirs prirent alors la form ę du rom an. Le G oureur des bois son (Euvre capitale, C o s la l l ’I n d ie n, les S q u a tte r s , etc., eurent un grand reten tissem en t, et captiverent toutes les classes de lectenrs.

Le rom an de moeurs contem poraines, le roman historique le tenterent a u s s i: P a n cre d e de C h a te a u - b r u n , sa C hasse a u x C osaqucs 2,tem oign eren t de la sonplesse de son talent.

11 n ’ecrivait pourtant qu’a ses m om ents perdus, car ile t a it hom m e d’action avant tout, et son esprit aventureux et intrepide revait toujours les expedi- tions loin tain es. II avait achete une charge de cour- tier d’assurances m aritim es, dont il se dem it pour derenir directeur d’une com p agn ie creee dans le

illu s tr e s c o lla b o r a te u r s d e ce re c u e i l, f u r e n t le s p r e m ie r s A r e c o n - n a i t r e e t A v a n te r 1’o r ig i n a lit e d e c e s r ś c i t s .

. 1. L e C o u re u r d e s b o is, q u i, — d is a it L don G ozlan — d o n n ę A so n a u t e u r la p rem ifere p la c e h có tó d e C o o p e r — a e u u n e d o u z a in e d ’d d itio n s , e t a e tć t r a d u i t e n a lle m a n d , e n e s p a g n o l, e n d a n o is, e t p lu s ie u rs fois e n a n g la is .

2 . P u b li ś d a n s la P a t iie e n 1853, a u m o m e n t d e la g u e r r e d ’O rie n t, ce ro m a n e u t u n s u c c ć s d e p lu s : 1’a c t u a lit ś . A ce p ro p o s , d is o n s q u e le ro m a n q u i s u iv it la C h a sse a u x C o sa ą u es, e t e u t u n s u c c e s ś g a l, f u t c e lu i d e s B o u c a n ie r s, p a r P a u l D u p le s s is , q u i ś ta i t n e v e u d e G a b rie l F e r r y .

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IV PREFACE.

m em e but. En 1851, le g o m ern em en t franęais lui confia la m ission d’aller recevoir a San-Francisco les nom breux em igrants que la fievre de l ’or entas- saitsan s prevoyancp ctsa n s ressources sur lesriv a g es californiens. C’etait une m ission honorable, delicate, presąue h eroiąue. Les difficultes et le sp e r ils qu’elle com portait stim ulerent le genereux explorateur.

II partit, helas! pour nc plus jam ais aborder ! Avant de s’etnbarquer, il ecrivait a s o n jc u n e iils la touchante leltre que v o ic i:

S o u th a m p to n , le t er j a n v ie r 1882.

« Je t’ai prom is h ierd e fe c r ir e , mon enfant cheri, cl je tiens ma parole en essayant de le faire le plus lisib lem en t possible.

« Qu’as-tu p ense, mon cher enfant, quand tu as vu quc ton papa etait parti sans te dire qu’il n ’allait plus reyenir?

a C’est la prem iere fois que je t ’ai trom pe, pauvre cher petit, et ce sera la derniere, car, si je l ’ai fait, c’etait pour te m enager.

« Songe a ce que j ’ai du souffrir les derniers jours quand je voyais chacun de ces jours s ’ecouler et que je m e d is a is : je n ’ai plus que cinq jours, plus que quatre jours, plus que trois, et enfin quand je me suis dit lu n d i: ceci est le dernier jour et je vais em-

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brasser m esp au vres enfants pour la derniere fois de bien łongtem ps.

« J’ai gardę cel affreux creve-coeur pour m oi seul et je n ’ai pas voulu vous le faire partager.

« Je te dirai que je suis parti sans M. B. qui n ’a du partir quc m ercredi. J’etais seul dans m on w agon et e ’est seul que j ’ai traverse 70 lieu es de glaces et de n eige, et 1’aspect de celte naturę lugubre jo in t a ma solitude n’etait pas fait pour dissiper m a m elan colie.

« Je n ’ai pu tnanger de toute la journee, q u a n d je me suis trouve seu l, lo in de y o u s, aprts avoir tra-

yerse la m er lesoir m em e.

a C o m m e j’etais triste, bon D ieu ! je n’ai pu qu’a peine prendre une tasse de the avec du pain et du beurre.

« J’ai passe la n u ita Douyres en A ngleterre, et le m atin a six heures je suis parti pour Londres oii je n ’ai pu rester que dix m in u tes, p u is a deux heures je suis arrive ici.

« J’ecris a ta mere pour que le 10 elle porte ses lettres cheż M. Marzion. II y en aura une de toi, cher enfant, j ’y com pte b ien , et ne va pas faire le pa- resseux.

« Te voila donc, cher petit, par 1’absence de ton pere, le c h e f de ta fam ilie en qualite d’aine, ne donnę a ta m am an que des sujets de satisfaction, et en faisant ton bonheur tu feras le sien propre ; Dieu veut ainsi que du b ien naisse toujours le bien et que

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celn i qui rend les autres heurenx l ’est aussi par cela m e m e ...

« A d ieu , m on enfant ch eri, je fe m b r a sse avec une tcndresse infinie.

« Ton pere, G. F. »

Le 2 janvier 1852, il prenait passage a hord de V A m a z o n e , magnificjue paąuebot de la com pagnie anglaise.

O uaraute-huit heures apres, on venait a peine de perdrc de vue les cótes d’A ngleterre quc 1’incendie envahissait le navire. Deux chaloupes oii l ’on se pre- cipita p ele-m ele furent su b m ergees; une troisiem e ne contint plus que rin gt passagers, m ais Gabriel Ferry n ’y etait pas !

II avait prevu et constate le sort des deux pre- m ieres em barcations, il ne s’etait point hate de pro­

bier de la derniere chance de salut, et quand cette barquc fut p lein e, ii repondit a ccux qui le pressaient d’y prendre place :

« M u u r ir p o u r m o iir ir , j ' a i m c a u t a n t re stc r ic i! » II prit ce parti avec une tranquillite extraordi- naire, peut-etre avec le sen tim en t secrct d’un be- roique devouem ent. On le lui a attribue. Sa ferm ete d’am e durant les angoisses du dramo de 1’incendie a autorise ses com pagnons a le penser et a le dire, car cette terrible et noble m ort est deja passee a 1’etatde legend e.

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La chaloupe cjui portait les derniers debris de l ’e- quipage et qui errait an hasard dans les tenebres sur une m er h ouleuse, en ten d it yers cin q lieures du m alin u n e esplosion form idable. C’etait XAm azone qui sautait avec le reste de ses passagers !...

Gabriel Ferry, plus egoiste ou m oins stoique, eut pu etre sauve, car la barque fut rencontree, et les passagers recu eillis, au bont de quelques lieures, par une galiote bollandaise.

Georges Sa r d.

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COSTAL UINDIEN

1NTRODUCTION

Lii MUSICIEN DE LA S1EHEA-MADRE.

D ans u n e de ces a n tią u e s g aleries de m a n o ir feodal, s u r ces m u rs n o irc is p a r le te m p s, q u e co u v re u n e I011- gue su itę de p o r tra its h is to rią u e s , on voit, au d eclin du j o u r , les o m b re s d u so ir cffacer g r a d u e lle m e n t les Iraits des h ero s d u te m p s passe, im m o b ile s su r le u r to ile. Ne s e ra it-o n pas ravi de v o ir, a u m em e m o m e n t, surgi.r du l'ond de c h a ą u e c a d re e t s’a g ite r les flgures m o in s solen- n e lle s, m ais p lu s yraies p e u t-e tr e , des p erso n n a g es su - b a lte rn e s q u i o n t ele les in s tru m e n ts de la glo ire de c h a c u n de ces lićros, qui o n t v e c u , agi, co n y erse avec.

e u x ! Ce se ra it la c h ro n iq u e p la ce e en re g a rd de l ’his- to ire e t lu i p r e ta n t t o u t l’a t t r a i t de ses re y e la lio n s.

J ’ai d it c o m m e n t j ’avais re n c o n tre , dans les plaines de C ald ero n , le c a p ita in e d o n R u p e rto C a s ta n o s 1. J ’ai re p r o d u il le re c it d e c e tte sa n g la n te jo u r n e e de la g u e rre de r in d e p e n d a n c e m e x ica in e , fa it p a r l'a n c ie n guerillero su r ce m e m e ch a m p de b a ta ille o u il av a it c o m b a ttu to u t u n lo n g jo u r . GrAce A ses so u re n irs,

1 R evu e d es D e u x -U o n d e s , liy ra is o n d u 15 u c to b r e 1850..

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1’b is to ire se d ć p o u illa it rle son m a n te a u d ’a u s te rite p o u r s’e g a y e r d u c h a rm e de la tr a d itio n . L e c a d re h is to rią u e s ’e la rg issa it sans s’a ltć re r, e t c e tte tr a d itio n , o rn e e p a r la b o u c h e d ’u n te m o in o c u la ire de t o u t F a ttr a it q u ’a u - r a it p u a v o ir la fictio n , e v o q u a it, & cótó des p rin c ip a u x p erso n n a g es, des figures c o n te m p o ra in e s q u i a n im a ie n t e t re m p lissa ie n t les vides de la toile.

CFetaient ces ey o c atio n s fa m iliere s q u e je vou lais con- lin u e r, sans sav o ir si le lia sa rd q u i m ’a v a it si bien servi d eja c o n tin u e ra it ii in e favoriser en c o re . J ’śla is bien re - solu to u te fo is i les so llic ite r, 4 les p ro v o q u e r sans re- lAche.

L e rć c it de n o tre voyage (que je re p re n d s i n o tre cou- e h e e dans la venia de la Sierra-M adre, e n tre les villes de T ep ic e t de G u ad a lajara) fera voir ju s q u ’a qu el p o in t m es p ro v o c a tio n s f u re n t c o u ro n n ć e s d e s u c c e s 1.

Le c a p ita in e do n H u p e rto d o rm a it e n c o re d ’un p ro - fond so m m eil, dans l ’u n des angles de la c h a m b re que n o u s o cc u p io n s en sem b le, q u a n d je m e levai de g ran d m a tin . Jo co n v e rlis sans b r u it m o n m a te la s en u n m a n ­ te a u , c ’est-ii-dire q u e j e m ’en veloppai de m o n z a r a p e 3, qui m ’a v a it servi de lit, e t j e so rtis sans ćveiller m o n co m - p a g n o n de r o u te .

Les v o y ag e u rs e t les m a itre s de la v e n ta , au d ed a n s, les m u le tie rs e t les d o m e stiq u e s, au d e h o rs, re p o s a ie n t to u s ii c e tte h c u r e m a tin a le . L e silen ce ć ta it p a r to u t, silen ce .im p o san t et so le n n el, a u m ilie u d u so le n n cl e t im p o s a n t ta b le a u de la S ie rra -M a d re .

J e tra v e rs a i le p la te a u ou la v e n ta ć ta it b a tie . L a lu n ę n e laissait to m b e r q u ’u n b ro u illa rd lu m in e u x a u fond de la g o rg e p ro fo n d e fo rm e e p a r d eu x cb a in e s de m o n - ta g n e s g ig a n te s ą u e s q u i c o u re n t p a r a lle le m e n t, e t su r le so m m e t de l ’u n e d esq u elles je m e tro u v a is.

C ette p ile c la rle p e r m e tta it ii p e in e de d is tin g u e r

1 . Reuue d e s D e u x - ilo n d e n , liv raiso n du I cr janYier 1851.

2. C o u v e r tu re d e la in e .

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q u e lq u e s cab an e s ep a rses sous de g ra n d s a rb re s q u i sem - b la ie n t liu m b les co m m e des touffes de bruyferes. E n re - y a n c h e , d e s p ito n s les p lu s eleyćs de la sie rra , les u n s ai- gus, les a u tre s a rro n d is, les clartes lu n a ire s ja illissa ie n t en eclairs p areils ii ceux q u e ren v o ie le fer d ’u n e la n c e ou u n casq u e d ’acier poli. P u is, d ’un a u tre cole, ces lu e u rs e c la ira ie n t u n e im m e n s e e te n d u e de pays su r la q u e lle les ram ific a tio n s des m o n ta g n e s q u i c o u v re n t p a r to u t le M exique n ’a p p a ra iss a ie n t q u e sem b la b les ii des lia n es e n tre la c e e s s u r le sol.

II n ’y ay a it d ’eyeille a u to u r de m o i q u e le s ’voix des m o n ta g n e s , q u i n e d o rm e n t ja m a is, au x q u e lle s se m e - la ie n t celles des cascades e t des c o u rs d ’e a u . A u m ilie u du silence de la n u it, des c o u ra n ts p e rp e tu e ls p a re ils a u soufllet d ’u n o rg u e to u jo u r s en m o u v e m e n t, se m b la ie n t e ta b lir e n tre les pies les p lu s eleyśs e t le s g oulfres les plus p ro fo n d s d ’e te rn e ls e t m y ste rie u x d ia lo g u e s.

J e p re ta is l ’o reille to u r to u r a u x yoix des yallśes e t des m o n ta g n e s , lo rsq u e to u t ii coup il m e p a r u t q u e ces ru m e u rs d e v e n a ie n t m o in s yagues e t q u e des sons h u - m a in s s’y m e la ie n t, co m m e si, d u fo n d des ray in s, les n o te s en c o re lo in ta in e s d ’u n e tro m p e d e c h a s s e s e fu s s e n t elevees ju s q u ’a u so m m e t de la sie rra . J e c ru s e tre le jo u e t de q u e lq u e illu s io n ; car ces n o te s e ta ie n t si d u re s, si ra u q u e s, m a lg re le u r e lo ig n e m e n t, q u e je n e savais de qu el in s tru m e n t fausse ou b iz a rre elles p o u v a ie n t s’e*

ch a p p e r. L e silence n e ta rd a pas ii su c c e d e r i ces sons e tra n g e s, au x q u e ls l ’h e u re e t le lie u p r e ta ie n t u n c a r a c - te re lu g u b re e t p re s q u e s u r n a tu r e l.

Si la S ie rra -M a d re e u t possede q u e lq u e le g e n d e de chasseur noir, j ’a u ra is c r u a v o ir e n te n d u le b r u it de son c o r ; m ais il fallait a ttr ib u e r u n e m oins fa n ta stiq u e ori- gine a c e tte sin g u liere m u siq u e. A pres p lu sie u rs m in u - te s d ’u n ca lm e p r o fo n d , la m e n ie m elo d ie b iz a rre se lit de n o u v e a u e t p lu s d istin c le m e n t e n te n d re , c a r elie e ta it d eja p lu s p r o c k ę ; elle ay a it q u e lq u e a n a lo g ie avec les cof-

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n e ts des vach ers de la S u is s e ; c e p e n d a n t r in s tr u m e n tis te e ta it en c o re invisible, si to u te fo is ce n "ć ta it pas u n e des voix des m o n ta g n es, in c o n n u e ju s q u ’ici a m o n oreille.

J e m ’avan ęai ju s q u ’a u x lim ile s e x tre m e s du p la te a u , i l’e n d ro it m e m e o u , la v eille, le c a p ita in e C a sta n o s m ’av a it fait le te rr ib le e t sin g u lie r r e c it de sa re n c o n tre avec le colonel G a r d u n o ; m ais je n e vis au fo n d d u g o u lfre q u e les reflets de la lu n ę q u i en a r g e n ta ie n t les douves esca rp e es. C’e ta il c e p e n d a n t b ie n de c e tte d irec- tion q u e s’e ta ie n t eleves ces sons ii la fois si m ć la n c o li- qu es e t si p u is s a n ts ; u n ex arn en a tte n tif m e fit enfin d istin g u e r co m m e u n e o m b re b u m a in e q u i se d e ta c h a it su r u n e m e r de lu m ie re b la n c h e , p u is l ’o m b re d is p a ru t sous la saillie d ’u n r o c h e r, n o n sans q u 'u n e fois en c o re la m e m e cad en ce fu n e b re se flit elevee des p ro fo n d e u rs dc r a b im e ju s q u ’ii m o i.

J e n ’eu s p lu s des lo rs q u ’h m e r e s ig n e r ii a tte n d re q u e lq u e s in s ta n ts p o u r yoir su rg ir ii son to u r su r le p la ­ te a u le n o c tu rn e m u sicien lu i-m e m e . U n q u a r t d ’h e u re se p a ssa ; puis, g rac e a u d e to u r d u se n tie r q u i s e rp e n ta it s u r les flancs d u p re c ip ic e , u n h o m m e a p p a r u t to u t ii co u p , p re sq u e ii m es có tes, dans u n e n d ro it d ia m e tra le - m e n t oppose ii ce lu i s u r le q u e l j ’avais les y eu x fixśs.

L e co slu m e d u v o y ag e u r m e rev e la sa c o n d itio n de p rim e a b o rd : c ’e ta it u n In d ie n , q u o iq u e ses v e te m e n ts e t la h a u te u r de sa s ta tu r e lu i d o n n a sse n t u n asp e c t to u t d ifle re n t des In d ien s q u e j ’avais vus ju s q u ’alo rs. L a lierte de sa d e m a rc h e , l ’ex p re ssio n de ses tr a its , ses m e m b re s a th le liq u e s, son a c c o u tre m e n t b iz a rre , rie n , e n u n m o l, n e r a p p e la it chez lu i le c a ra c te re a b a ta rd i des an c ie n s m a itre s d u M exique. P a r le m e m e m o tif, je n e savais re c o n n a itre ii q u e lle casle in d ie n n e il a p p a rte n a it. II s’e- t a it a r r e te u n in s ta n t p o u r re p re n d re h alein e , a p re s la ru d e m o n te e q u ’il y e n a it de f ra n c h ir si le ste m e n t, e t je pu s, h la c la rte de la lu n ę , d istin g u e r aussi q u ’il p o rta it en sa u to ir r in s lr u m e n l q u e j c v e n a is d ’e n te n d r e : c e t a i t

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u n e concjue m a rin ę , lo n g u e , m in c e e t re c o u rb e e , d o n t la n a c re e lin c e la it su r sa p o itrin e .

A u to ta l, en d ep it de sa re m a rą u a b le physio n o m ie, ce p e rso n n a g e , q u i av a it si e tra n g e m e n t signale sa p re- sence, m e flt ć p ro u v e r u n e espece de d e s a p p o in te m e n t;

j e m e l ’etais figurę to u t a u tre , j e n e sais p o u rą u o i, ou, p o u r m ie u x d ire, m o n im a g in a tio n av a it ete tro p v ite en b eso g n e, excitee p a r la seen e so le n n elle q u i m ’e n to u - ra it. J e n e y o u lu s p as c e p e n d a n t la isse r p asser c e t I n - d ie n sans ec h a n g e r q u e lq u e s m o ts avec lu i.

ciUn b o n te m p s p o u r yo y ag er, m o n m a itr e ,lu i d is-je , afin d ’e n tr e r e n cony ersatio n .

— S u rto u t p o u r u n h o m m e d o n t lA g e e n g o u rd it deja les ja rr e ts , » r e p r it l’In d ie n .

J ’avais c r u voir flo tte r su r ses ep a u le s u n e epaisse che- y e lu re n o ire , e t je le re g a rd a i de n o u y e a u avec p lu s d ’at- te n t i o n ; j e n e n f e ta is p o in t tr o m p e .S e s cheveux ay a ie n t bie n le reflet bleuŁltre p a r tic u lie r ii la n u a n c e de l ’ebene la p lu s fo n cć e. Ses tr a i ts b ro n z e s e ta ie n t an g u le u x , sa p e a u p a ra issa it fo rte m e n t collee a son yisage ; m ais il n ’y ayait pas de trac ę de ces rides p ro fo n d e s q u e c re u s e n l d ’o rd in a ire les an n e es s u r la fig u rę h u m a in e . L d n d ie n s ’a p e r ę u t sans d o u te de m o n e to n n e m e n t, ca r il a jo u ta , p e n d a n t q u e je le c o n sid erais :

« II y a des c o rb e a u x q u i o n t yu c e n t re n o u y e lle - m e n ts de saisons, e t d o n t c e p e n d a n t a u c u n e p lu m e n ’a b la n ch i.

— Q uel age avez-vous d o n c ? lu i d em an d a i-je .

— J e n ’e n sais rie n , se ig n e u r c a v a lie r; j ’ai v o u lu , depuis q u e j ’ai ć te en e ta t de d istin g u e r la saison seche de la saison des plu ies, c o m p te r co m b ie n j ’en avais vu deś u n es e t des a u tre s, e t je m e suis b ro u ille d an s m o n co m p te . D epuis q u e j ’ai y u l a c in q u a n tie m e .... p o u r des raiso n s tr e s - p a rtic u lie r e s .... je n ’y atta c h a is p lu s d ’im - p o r ta n c e , e t il y a lo n g te m p s q u e j e n e m ’en o cc u p e p lu s. Q ue m e fait, ^ m o i, le c o u rs des a n s ? U n co rb e au

(19)

est venu c ro a sse r su r le to it de la c a b a n e de m o n p ere , ii 1’in s ta n t o u je suis n ć , a 1’in s ta n t m ó m e ou u n p a r e n t d essinait su r le soi de la h u tte la figurę d ’u n de ces oi- s e a u x ; je dois d o n c vivre aussi lo n g te m p s q u e le cor- bea u qui est v en u se p e rc h e r su r le to it p a l e r n e l ; des lors, i q u o ib o n c o m p te r ce q u i d o it 6 tre in n o m b r a b le ?

— A insi vous croyez y o tre e x iste n c e a tta c h e e ii celle d u c o rb e a u p e r c h ś s u r le to it d e v o tre h u tte p e n d a n t q u e vous n aissie z?

— C’est la c ro y a n c e des Z a p o te q u e s1, m es p ere s, e t c ’est a u ssi la m ie n n e , » r ś p o n d it g ra y e m e n t 1’In d ie n .

J e n ’avais q u e faire de c o m b a ttre les su p e rstitio n s du Z a p o te q u e ,e t je m e b o rn a i lu i d e m a n d e r si c ’e ta it p o u r c h a rm e r les c n n u is de la ro u te q u ’il p o r ta it sa tr o m p e m a rin ę avec lu i, o u s’il s’y ra tta c h a it q u elq u e a u tre c ro y a n ce de ses p e re s .

L ’In d ie n h e s ita u n m o m e n t.

o C e s i u n so u v e n ir d u pays, r e p liq u a - t-il a p re s u n c o u r t silence. Q uand j ’e n te n d s les ćchos de la sie rra r e - p e te r les sons de m a c o n q u e , je m e figurę e tre to u jo u r s d an s les m o n ta g n e s de T e h u a n te p e c , a l ’e p o q u e o u je chassais le tig r e , p a r su itę d e m a p rofession de tigrero;

ou b ie n e n c o re j e crois e n te n d re les sig n a u x d ’a p p e l qui re u n iss a ie n t les p lo n g e u rs d u golfe, q u a n d j ’ćtais buzo'*

de m o n m ś tie r : c a r j ’ai 1'ait la chasse au x tig re s de m e r q u i g a rd e n t les bancs de p erle s sous les eau x , co m m e ii ce u x de te r r e qui ra y a g e n t nos lro u p e a u x dans les sa- yanes. Mais le te m p s s’ec o u le , se ig n e u r cay alier, e t je dois 6 tre i Yhacienda de Portezuelo ii m id i. Que Dieu vous p ro tś g e ! »

Les m e m b re s ii m o itiś n u s de 1’In d ie n fu m a ie n t e n ­ c o re co m m e ceux d ’un cheyal de co u rse . S ans d o n n e r le te m p s de se dissiper aux le g ers to u rb illo n s de y a p e u r

1 . L ’u n e d e s a n c ie n n e s t r i b u s i n d ie n n e s d u M ex iq u e.

2 . P lo n g e u r , p fic lie u r d e p e rle s .

(20)

q u e la fra ic h e u r de la n u it c o n d e n sa it a u to u r de lu i, le Z a p o te ą u e re p rit le pas g y m n a stią u e p a r lic u lie r i. to u - tes les ra c e s in d ie n n e s , e t j e le vis b ie n tó t d esce n d re p a r le s e n tie r oppose, k l’a u tre e x tre m itć d u p la te a u . Q uel- qu es m in u te s ap re s, j ’en ten d is, au m ilieu du silence de la n u it, dejk m o in s p ro fo n d , les n o le s ra u q u e s et vi- b ra n te s de la c o n q u e m a rin ę d u v o y a g e u r in d ien .

a Quel est c e t in fe rn a l ta p a g e ? » s’ec ria le ea p ita in e d o n R u p e rto en s o r ta n t de sa ch a m b re .

J e r a c o n ta i a u e a p ita in e la r e n c o n tre q u e je re n a is de faire d ’u n In d ien za p o te q u e, ainsi q u e ses sin g u lieres rep o n ses au su je t de ses c ro y a n c e s.

« Cela n e m 'e to n n e p as, r e p r it C a sta n o s; ces In d ie n s de T e h u a n te p e c n ’o n t des c u rśs dans le u rs villages que p o u r la fo rm ę ; c ’est p o u r ces bons p ere s u n e sin e cu re co m p lete, c a r les Z a p o te q u e s so n t p lu s id o lk lre s q u e c h re tie n s , e t p lu s a d o n n ś s q u ’a u c u n e a u tre ra c e in d ie n n e au x p ra tiq u e s su p e rstitie u se s de le u rs a n c e tre s. Ce vo- y a g e u r fa it allu sio n i u n u sa g e en y ig u e u r d an s son pays : lo rsq u ’u n e In d ie n n e est en m ai d’e n fa n t, le p ere e t ses am is, rassem b les d an s la liu tte , d essin en t s u r le sol, puis effacen t to u r to u r de grossieres flgures d ’a- n im a u x ; c e lle q u i su b siste ii l ’in s ta n t de la n aissan ce de 1’e n fa n t est ce q u ’ils a p p e lle n t sa tona. lis p e n s e n t q u e la vie d u n o u v ea u -n e est a tta c h e e k celle de 1’a n im al en q u e s tio n , e t q u ’il d o it m o u r ir en m 6m e te m p s q u e lu i, e t 1’e n fa n t, en g ra n d iss a n t, c h e rc h e sa tona, la so ig n e , s’y a tta c h e et la re sp e c te co m m e u n feliche.

— J e p re su m e , d is-je au e a p ita in e , q u e les Z ap o te- q u es o n t alors le soin de n e d essin er q u e des a n im a u x re m a rq u a b le s p a r le u r lo n g e v ite , sans q u o i... »

L’h o n n ś te e a p ita in e n e r e p o n d it, e t p o u r cau se, ii m o n o b je ctio n q u ’en n T a ss u ra n t q u e , d u re s te , ces In ­ diens e ta ie n t braves, q u ’ils se p lia ie n t fac ilem en t ii la discip lin e e t faisaient en re su m e d ’ex cellen ts s o ld a ts ; ce d o n t je fus fo reć de m e c o n te n te r.

(21)

La p la te -fo rm e de la sie rra , si tra n ą u ille ju s q u ’a ce m o m e n t, c o m m e n ę a itii se re m p lir de b r u it. L es divers y o yageurs h e b e rg e s d an s la v e n ta s’a p p r6 ta ie n t h p a r tir , c a r deja l ’a u b e te ig n a it 1’h o riz o n d’u n e c la rte d’u n ja u n e pfile. Les In d ie n s se c o u a ie n t le u r so m m eil e t c e ig n a ien t le u rs re in s p o u r la m a rc h e ; les m u le tie rs tira ie n t leurs m u le s des ecuries, les d o m e stią u e s se lla ien t les chevaux h en n issan ts, les co rb e a u x y o ltig e a ie n t en cro a ssa n t dans le b ro u illa rd m a tin a l, e t lo son des c lo c h e tte s des betes de so m m e se m e la it au x ab o ie m e n ts des chiens q u i se r e p o n d a ie n t des d eux cim es p ara llelcs de la sie rra . C’e- ta it, en u n m o t, u n e de ces jo y e u se s scenes de voyage d o n t le so u v e n ir m e se ra to u jo u r s ch e r.

C liacun a lla it s’a c h e m in e r y ers sa d e s tin a tio n , e t bien- tó t, en effet, lo u te s ces o m b re s in d e cises, q u ’u n in s ta n t ap re s le soleil d ev ait e c la ire r, s’e p a rp ille re n t de to u s cóles, les u n es d an s u n e d ire c tio n , les a u tre s d ap s u n e a u tre , e t la p la te -fo rm e de la s ie rra n e ta r d a p as a n ’ś- t r e p lu s a n im e e q u e p a r la p re se n c e d u ventero, q u i b a- la y a it ses c h a m b res p o u r de n o u v e a u x v o y ag e u rs.

N ous p a rtim e s a n o tr e lo u r . J ’avais q u elq u o triste sse d an s le coeur, je l’avoue : c e tte im a g e en p e tit d u voyage de la v ie , o u 1’on c h a n g e Ł c h a q u e in s ta n t d ’h ó te lle rie , ou l ’on q u itte le c e rta in p o u r c o u r ir ap re s 1’in c o n n u , e n l r a it p o u r b e a u c o u p d an s 1’im p re ssio n c h a g rin e que j ep ro u v ais.

P o u r ch a sse r au lo in ces id ees m e lan c o liq u e s, j e n ’a- v a is rie n de m icu x a faire q u e de m e ltr e a c o n trib u tio n les so u v e n irs de m o n co m p a g n o n de voj'ag e. P a r m i l e s ' p lu s g lo rie u x ch a m p io n s de l’in d e p e n d a n c e m e x icain e, il en e ta it u n su r le q u el je m a n q u a is de re n se ig n e m e n ts p re c is e t s u r to u t in tim es : c ’e ta it le g e n e ra ł M orelos, q u i, p lu s q u ’a u c u n a u tre , avait p re s q u e to u jo u rs p o rte y ic to rie u s e m e n t le d ra p e a u de c e tte in d e p e n d a n c e .

« P o u v ez-v o u s m e d o n n e r q u e lq u e s d etails s u r le ge­

n e ra ł M orelos? d e m an d a i-je to u t a co u p a u capitaine.-

(22)

— C’e ta it u n g ra n d c a p ita in e q u e M orelos, re p o n d it 1’a n c ie n g u e rille ro , q u i m e p r ś c ś d a it dans le s e n lie r escarp e de la m o n ta g n e avec u n e aisance q u e j ’a d m ir a is ; dans le c o u rs se u le m e n t de 1’a n n e e 181-1, il a livre au x E sp ag n o ls v in g t-six b a ta ille s ; il en a gag n e c o m p le te - m e n t vingt-deux, e t il a fa it d d io n o rab les re tr a ite s d an s les q u a tre a u tre s ; il a f a it.... »

L e c a p ita in e a u r a it p e u l-e tre c o n tin u e lo n g te m p s si je n e 1’eusse in te r ro m p u .

« J e sais to u t c e la , lu i dis-je, m o n c h e r ca p ita in e .

— E h b ie n , alo rs ?

— V ous m e faites de 1’łiisto ire, e t jo v eux de la e h ro n iq u e ; c’est-H -dire que j e desire a p p re n d re de M o­

relo s ce q u e les h isto rie n s n e d ise n t pas, ou d u m oins ne fo n t q u ’in d iq u e r .

— J e yous c o m p re n d s; faites-m o i d o n c le p la isir d ’e- c o u te r. »

D on R u p e rto c o n tin t so n chev al p o u r q u e le m ie n p u t fa c ile m e n t le su iv re, e t r e p r it :

« C e ta it a p re s la p ris e de G u a n a ju a to , a u m o m e n t ou 1’a rm e e des in su rg es, au n o m b re de p lu s de so ix an te m ille ho m m es, se r e p a n d a it, sous les o rd re s d llid a lg o , a lo rs au fa ite de sa p u issan ce , c o m m e u n to r r e n t que rie n n e p o u v a it a r r e te r .N o u s devions aller passer la n u it a Y alladolid, e t p e n d a n t que 1’a rm e e to u t e n tie re suivail sa r o u te , les chefs e t le u r e ta t- m a jo r , d o n t n o u s faisions p a rtie , A lbino e t m o i, rec ev aien t 1’h o sp ita lite d ’u n m o ­ m e n t cliez u n p a r tic u lie r du p e tit v illag e de San-M iguel- C haro, q u a tre lieues de V allad o lid . N ous d in io n s fo rt jo y e u s e m e n t, co m m e on d in e en pays co n q u is, e t dans u n e s a lle fo r t basse. H id alg o e tA lle n d e e ta ie n t assis h u n e p e tite ta b le ii p a r t e t s’e n tre te n a ie n t to u t en m a n g e a n t u n m o rc e a u . D esirez-vous savoir ce q u ’ils m a n g e a ie n t.

— Je m ’en d o u te : des tortillas 1 de m a is e t des h a r i- cots ro u g es au p im e n t.

1. G a le t te s .

(23)

— P e n d a n t ce tem p s, u n p e rso n n a g e i 1’a llu re tim ide, e t co m m e effraye de se v o ir en si n o m b re u se e t si b o n n e co m p a g n ie , e n tra dans la salle e t s’a p p ro c h a des d eux g e n e ra u x . Ce p erso n n a g e e ta it de s ta tu re m o y e n n e , m ais r o b u ste . S on te in t e ta it p ile e t b r u n ; u n e ch e v elu re epaisse e t ru d e co u v ra it son fro n t, e t de la rg e s fayoris v e n a ie n t re jo in d re sa b o u c h e ; so n nez e ta it c a m a rd , sa levre su p e rie u re assez epaisse, e t la seule chose qui rehauss& t son visnge e ta it d e u x y e u x n o irs e t fo rt vifs, sous des so u rcils fro n cćs q u i n e fo rm a ie n t q u ’u n e seu le ligne.

« Cet h o m m e s ’a p p ro c h a d ’H idalgo e t d ’A llende d ’u n pas tim id e e t q u e lq u e p e u g au c h e. A son a sp ec t, H idalgo laissa e c h a p p e r un geste de c o n tra rie te , e t b ie n q u ’il fu t ćv id en t q u ’il le re c o n n a issa it, i l l u i d e m a n d a b ru s- q u e m e n t ce q u ’il d e s ira it. Le n o u v e a u v en u b a lb u tia , b eg ay a q u elq u e s p aro le s, e t f in itp a r dire q u ’il d ć s ira it la p lace de ch a p e la in de 1’a rm e e in su rg e e . « J e ferai m ie u x p o u r vous, » d it le gćn eralissim e, r e p o n d a n t sans les av o ir eco u tees i q u elq u es o bservations hasard ees p a r le s o llic ite u r.

« Le b u t m an ifeste d ’H idalgo e ta it de l ’en v o y e r b ie n lo in de lu i. II d e m a n d a u n e feuille de p a p ie r q u ’on ne lui p ro c u ra pas sans p ein e, e ta p r e s y av o ir ś c rit q u elq u es lig n e s, il la r e m it a u n o u v e a u y en u en lu i d isa n t d’u n e voix q u i r e le n tit dans to u te la salle : « V oici vo tre b re v e t

« de colonel e t la m ission d ’alle r re v o lu tio n n e r les

« pro v in ces d u S u d , en c o m m e n ę a n t p a r p re n d r e Aca- p u lc o . »

« Les pro v in ces d u S u d ć ta ie n t les p lu s fideles ii la- c o u ro n n e d ’E sp ag n e . A capulco e ta it u n e des p lu s fo rte s p laces de la \ i c e - r o y a u t ś ; aussi, 5. ces p a ro le s, u n rire m o q u e u r, b ie n q u e dissim ule p a r re sp e c t p o u r le v en e - ra b le H idalgo, p a r c o u ru t la salle, ta n d is q u e le n o u v ea u co lo n el p ili t, n o n p as de c o lere, m ais d ’u n e jo ie o rg u eil- leuse, e t s o rtit e n g a rd a n t le silence q u e c a u se n t to u jo u rs les g ran d e s ć m o tio n s e t les rćso lu tio n s hćro'iques.

(24)

« L e p r ś tr e o b sc u r a lla it t o u t sim p le m e n t se m e ttre en devoir de re m p lir sa m ission.

« A i-je b eso in de vous d ire , p o u rsu iv it C astanos, q u i e ta it cet. h o m m e sim ple e t m o d e ste d o n t le d o u te e t l ’i- ro n ie a c c u e illire n t le d e b u t? C’e ta it le c u re d u p e tit vil- la g e de N e c u p śta ro y C a ra c u a ro , 1’illu stre M orelos.

E st-c e de la c h ro n iq u e , ceci?

— A ssu re m e n t, e t j ’en a tte n d s la fln.

— J e n ’ai p lu s re v u M orelos, e t je n e p o u r ra is a p re - s e n t q u e r e to m b e r d an s le d o m a in e de 1’h isto ire . Mais si m o n am i d o n C ornelio L a n te ja s est e n c o re a T epic, il p o u r ra vous c o m p le te r la c h ro n iq u e de M orelos, q u ’il a fidelem ent servi ju s q u ’a la m o r t de ce g ra n d h o m m e . »

A u m o m e n t ou le ca p ita in e y e n a it de m ’o u v rir c e tte p e rsp e c tiv e , en m ’a s su ra n t q u e j e p o u rra is e n te n d re le r ć c it d ’u n des c o m p ag n o n s d u p lu s re m a rq u a b le des chefs de 1’in d e p e n d a n c e , n o u s arriv io n s a u fond de l’im - m en se rav in d o n t n o u s allions avoir a g rav ir le h o rd op- pose. 11 y av a it la u n p e tit v illa g e 1 enseveli e n tre les d eu x ch ain es de la co rd ille re . Le d iśq u e d u soleil ap- p a r u t t o u t ii co u p a u so m m et d u g ig a n tesq u e re m p a rt de m o n ta g n es q u i n o u s faisait face e t q u i n o u s re s ta it a f ra n c h ir. D’u n e cim e h 1’a u tre de la S ierra-M ad re, des ray o n s d ’u n p o u rp re pćLle s’e te n d a ie n t au-dessus de n o s te tes en re se a u x lu m in e u x , co m m e les co rd es fróm issan- tes d ’u n e h a rp e d’o r, ta n d is q u e le fo n d de 1’im m en se ca- fia d a 2 e ta it e n c o re n o y e dans u n b r o u illa rd d ’azu r.

Q uelques in s ta n ts a p re s, les o m b res-b le u es d u m a tin s ’e- v a n o u ire n t, e t des ilots de lu m ie re e n v a h ire n t ju s q u ’au x plus p ro fo n d e s fissures des m o n ta g n e s.

N ous a tte ig n im e s b ie n tó t le n iveau de la c a n a d a ; p u is, a p re s av o ir laisse re p o se r u n in s ta n t nos ch e \’au x sous les b a n a n ie rs de P lan -d e-B a rran c as, o u n ’a p p a ra iss a ie n t

I. P la n - d e -B a rra n c a s . 1 . R a v in e .

(25)

q u e d e ra re s h a b ita n ts g o itre u x , n o u s recom m enę& m es a g rav ir p a r d ’tio rrib les se n tie rs le seconcl r e m p a rt de la S ierra -M ad re, d o n t n o u s eń u ies ra iso n a son to u r . L a g ra n d ę c o rd ille re e ta it fra n c h ie , e t tro is jo u r s ap re s n o u s etio n s d T epic.

G iną ou six m o rte ls jo u r s s’e ta ie n t eco u les depuis no- tre a rriv e e d c e tte d e rn ie re ville, e t je devais y en p asser en e o re a u m oins u n n o m b re egal en a tte n d a n t la v e n u e de m es m u le tie rs . T o u t y o y a g e u r oisif q u i s’est trouve dans u n e ville ou il n ’y a pas de m o n u m e n ts p u b lic s, re- ligieux o u p ro fa n e s, a v isite r, o u l ’o n n e c o n n a it p e r - so n n e , o u il y a p eu d ’en seig n es e t pas la m o in d re affi- clie p o u r se d istra ire , p o u r ra se fa ire u n e idee do la lo n g u e u r des jo u r s q u e je subissais. M on c o m p a g n o n de r o u te e ta it la p lu p a r t d u te m p s en c o u rse p o u r ses affai- res, e t D ieu sa it q uelles affaires! II n ’e ta it pas facile de le d e v in e r, m ais j e n e pouvais m ’e m p e c h e r de c ro ire q u e le digne cap itain e faisait le c o m m e rc e co m m e il a v a itf a it la g u e rre , en p a rtisa n e t u n p e u en d e h o rs des voies le g a łe ś ; a p re s to u t, q u e m ’im p o r ta it? T o u tefo is, dans ses courses, il lu i av a it ete im p o ssib le de m e ttr e la m a in su r son am i d o n C o rn elio L an te ja s, cjue p e rso n n e n e c o n n a issa it a T ep ic, e t j ’a u ra is v o lo n tie rs so u p ęo n n e q u e l'e x iste n c e de ce t h o m m e e ta it aussi p ro b le m a tiq u e q u e les affaires d u c a p ita in e , si lie u re u s e m e n t le h a- sard ne m ’e u t m is su r la tra c ę d u c o m p a g n o n de Mo- relos.

« Don R u p e rto se d ć ra n g ę , m e d it, le m a tin du jo u r su iv a n t, n o tr e liótesse d o n a P a u stin a d ’u n a ir evidem - m e n t c o n tra rie ; il m a n g e r a ses g a le tte s de m ais a u p i- m e n t ( tortillas enchiladas) e t ses h a ric o ts ro u g e s glaces, e t p a r c o n s e q u e n t d etestab le s.

— E n effet, re p o n d is-je en m ’a ssey a n t seul a la ta b le d u d e je u n e r ; le c a p ita in e est p a rti ce m a lin de si b o n n e h e u re q u e j e n e l’ai p as e n te n d u s’h a b i l l e r ; m ais, q u a n t a son r e p a s .. . . »

(26)

J e n 'a c h e v a i pas p a r politesse, m a is je p e n s a i que p e u m ’e u t im p o r te , a m o i, de m a n g e r c h a u d e ou fro id e 1’h o rrib le c h e re ii la ą u e lle to u t v o y ag e u r est co n d a m n ć s u r la te r r e m e x ica in e .

« Q u an t au x h a b itu d e s irre g u lie re s d u se ig n e u r C asta­

nos, r e p r is - je , il n e fa u t pas s’en ś t o n n e r ; u n a n c ie n g u e rille ro de 1’in d e p e n d a n c e n ’est pas te n u a t a n t d ’ex ac- litu d e .

— Cela n ’y fait rie n , r e p o n d it d o n a F a u slin a ; n o u s avons ici le presbitero d o n Lucas Alacuesta, qui, p o u r avoir fa it en p a rtisa n to n te s les cam p ag n es de F illu stre M orelos, n ’e n est pas m o in s a u jo u rd ’h u i le m o d e le des c h a n o in e s.

— U n c o m p a g n o n de M o re lo s ! m ’e c ria i-je ; p o u rq u o i n e m e l ’avez-vous p as d it plus t ó t ?

— Q uel in te r e t p ren e z -v o u s a cela ?

— Celui de satisfaire u n d esir q u i est n e cbez m oi su r le ch a m p de b a ta ille d u p o n t dc C a ld e ro n . J e m e suis m is en te te , depuis q u e lq u e s jo u rs , de tr o u v e r des te - m oins o cu laires e t des a e le u rs de la g u e rre de T in d e- p e n d a n c e , q u i p u isse n t m e la r a c o n te r depuis son o rig in e ju s q u ’a sa fin. J ’ai fouille le e a p ita in e co m m e u n e vieille c h ro n iq u e . je l’ai ep u ise, e t je c h e rc h e u n n o u v e a u liv re vivant p o u r le fe u ille te r. Y ous n e con- naissez pas le se ig n e u r d o n C ornelio L a n te ja s ?

— P as le m o in s du m o n d e .

— E h bien ! d o n L u ca s le re m p la c e ra p o u r m o i . » L a-d essu s, co m m e je fm issais de d e je u n e r, do n Ru- p e rto e ta it de r e to u r .

« A u d ia b le les tortillas et les h a r i c o t s ! s’e c ria le c a p i- ta in e en rep o n se au x re p ro c h e s de 1’h ó te sse . J e yiens d ’en m a n g er a d isc re tio n , e t arro se s d ’u n e vicille b o u - te ille d ’u n v m de C a ta lo g n e a c o u p e r p a r tra n c h e s c o m m e u n e sa n d ia 1. J ’ai fait u n d e je u n e r de c h a n o in e .

I. Pastewne’.

(27)

S avez-vous chez q u i ? a jo u ta le g u e rille ro e a s’a d re ssa n t h m oi.

— Ghez d o n L ucas A la c u e s to ,re p o n d is-je a u h asard .

— P re c ise m e n t, a u tre m e n t cliez d o n C ornelio L a n te - ja s , q u i a ch a n g e de n o m e n c h a n g e a n t de c o n d itio n , ce q u i fa it q u e , sans u n h asard au q u e l vous n 'ć te s pas ć.tran- ger, je ne 1’a u ra is pas r e n c o n trć d ’ici a u jo u r du ju g e - in e n t, ce d iable de c h a n o in e n e s o r ta n t ja m a is. Qui m ’e u t d it q u ’u n a n c ie n so ld a t de 1’in d e p e n d a n c e e u t p u c h a n g e r ain si? A u fa it, n o u s avons eu ta n t de cu re s q u i s o n t devenus g e n e ra u x , q u ’il est to u t ń a tu re l de voir u n c a p ita in e d ’in su rg es se fa ire c u re p a r co m p en sa- tio n . »

C om m e c o m p le m e n t p ro c h a in a ces p re m ie rs re n se i- g n e m e n ts , do n J tu p e r to m ’a n n o n ę a q u e n o u s ćtio n s to u s d e u x invitćs A d in e r le jo u r m e ra e chez son am i le c h a n o in e , q u i m e tta it o b lig e a m m e n t a m a d isp o sitio n sa ta b le e t ses souvenirs.

J ’accep tai avec e m p re sse m e n t 1’offre g ra c ie u se qni m ’e ta it fa ite e t, tr o is h e u r e s v en u e s, je m e d irig e ai, sous la c o n d u ite d u c a p ita in e , v ers la m a iso n d u se ig n e u r do n L u ca s A lac u esto . E lle ć ta it situ ee a l ’e x tre m ite dc la yille e t c o n tig u e h u n v aste ja rd in ; le to u t ć ta it enclos de h a u te s e t lo n g u e s h aies de ca c tu s cie rg e s (organos).

J e s u p p rim e to u s les d etails in u tile s p o u r n e p a rle r q u e de l’h ó te q u e je tro u v a i. C’e ta it u n p e tit h o m m e de c in q u a n te ans e n v iro n , a le r te , affable a l’e x tre m e , fo rt p e u o ccu p e des in te re ts d u c h a p itre d o n t il e ta it m em - b re , e t se liv ra n t en re v a n c h e avec a r d e u r au x soins du ja rd in a g e e t h la re c h e rc h e des in sectes p o u r e n ric h ir sa c o lle c tio n ; rien n e ra p p e la it chez lu i, co m m e chez le g u erillero C astanos, 1’a n c ie n iu su rg e qui avait p ris u n e p a r t glo rieu se h u n e lo n g u e g u e rre d ’e x te rm in a tio n .

J e p asserai ć g a le m e n l s u r le d in e r p o u r a rriv e r to u t de su itę a u m o m e n t o u , vers cinq h e u re s d u so ir, le c h a n o in e , don R u p e rto e t m oi, n o u s fum es n o u s asseoir

(28)

a a n e la b ie ru s tią u e dressee a u fo n d d u ja r d in , sous u n e to n n e lle de passiflores. T o u t a u to u r, des d alh ias a l ’e ta t sau v ag e (o n sait q u e le M exique est le u r p a trie ) dres- sa ie n t.le u rs tig e s gróles e t le u rs p e tite s fleurs m u ltico lo - r e s ; a u -d e ssu s de la to n n e lle , de m a g n ilk ju e s o ran g e rs, p lia n t sous le p o id s de le u rs f r u its , fo rm a ie n t u n d o u b le e t d ćlicieu x o m b ra g e . S u r la ta b le , le cafe fu m a it dans d e s ta sses de C hine, e t u n brasero d ’a rg e n t, ou des cliarb o n s a rd e n ts se c o u v ra ie n t p e tit S. p e tit d ’u n e ce n - d re b la n c h e , in v ita it a a llu m e r d e s c ig a re s de G uayaquil, e m p iles su r u n e assie tte co m m e u n h u c h e r o d o rife ra n t.

« O serai-je vous d e m a n d e r, se ig n e u r do n L ucas, dis- je au c h a n o in e p o u r e n tr e r en m a tie re , si c ’est u n e vo - c a tio n speciale q u ia c o n v e rtie n v o u s le s o ld a te n lio m m e d ’E glise ?

— C’est to u t le c o n tra ir e , re p o n d it le c h a n o in e : au m o m e n t o u je m e disposais a e n tre r d au s les o rd re s, sans p e n s e r q u ’il y e u t e n m o i 1’etofFe d ’u n so ld a t, u n e suitę de hazard s sin g u liers m ’a to u jo u r s je te m a lg re m oi p e n d a n t cinq ans d an s le tu m u lte des b atailles. C ertes, si 1’o b stin a tio n du so rt a m ’e lo ig n e r c o n s ta m m e n t du b u t au m o m e n t ou j ’etais p re t ii 1’a tte in d re e u t eu a l u tt e r c o n trę u n e v o catio n m oins d e te rm in e e , elle l ’eu t sans d o u te ć te in te . Mais les circ o n sta n ce s e u r e n t h com - b a ttr e c o n trę la n a tu r ę , e t la n a tu rę flnit p a r 1’e m p o rte r s u r les c irc o n sta n c e s, q u e lq u e o b stin e m e n t fo rtu ite s q u ’a ie n t ćtó ces derni& res. »

J e p en sai que ce p re a m b u le a lla it o u v rir 1’h isto ire du c h a n o in e , d an s la q u e llc M orelos d e v a it n ć c e ssa ire m e n t iigurer;. j ’a llu m a i sile n c ie u se m c n t u n c ig a re ; le cap i­

ta in e n T im ita, ta n d is q u e do n L ucas ac h ev a de y id e r sa tasse.

J e n e m ’śta is pas tro m p ć : le se ig n e u r A lacuesto com - m e n ę a u n re c it q u ’il n ’in te r ro m p it q u e lo rsq u e la n u it fu t to u t a fa it close. 11 v o u lu t b ie n toutefois m e p ro m e ttre de le re p re n d re le le n d em a in . II tin t p aro le e t le c o n tin u a

(29)

p e n d a n t p lu sicu rs jo u r s c o n s e c u tif s , to u jo u rs avec la m e m e co m p laisan ce. C’est dans c e tte suile de rć c its q u e j ’ai en g ran d ę p a rtie puise les divers fails q u e je v a isex p o - se r a u le c te u r. Les a v e n tu res du c h a n o in e a v a ie n t p o u r m oi u n d o u b le a ttr a it. E lles acliev aien t, en p r e m ie r lie u , de m ’in itie r a u x p r in c ip a u x ev e n e m e n ts de la g u e rre de l ’in d ć p e n d a n c e , e t en su ite elles faisa ie n t su ccessiv em en t passer sous m es y e u x les p o r tra its d ’ap re s n a t u r ę des e tra n g e s o u b iz a rre s p e rso n n a g e s qui en ayaient, e te , les u n sle s fo n d a te u rs illu stres, e t les a u tre s le s a c te u rs in c o n - nus. P a rm l c e u x d e ces p e rs o n n a g e s q u i o n tle g u e u n n o m g lo rie u x ii 1’h isto ire , flg u ra it au p r e m ie r p la n , ainsi q u e je m ’y etais a tte n d u , le g ó n ćra l M o relos; p u is e n s u ite , d ans le n o m b re de ceux d o n t l ’h isto ire n ’e n re g is tre ra p as le d ev o u e m e n t, j e re tro u v a i, sans y e tre a u c u n e m e n t p re p a ró , le sin g u lie r v o y ag e u r de la S ie rra -M a d re , C ostal, 1’In d ie n z a p o te q u e , m a rq u a n t d ’u n e e tra n g e m a n ie re d a n s 1’e tra n g e ep o p e e d u c h a n o in e A lac u e sto .

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P R E M I Ę R E P A R T I E

LE DRAGON DE LA REINE.

C H A PITR E PREM IER

I . E S I ) E U X Y O Y A G E U H S .

Les id e es re v o lu tio n n a ire s q u e la F ra n c e avait je te e s a 1’E u ro p e en 1789 n e dev aien t pas ta r d e r a fra n c h ir les m e rs e t ii se re p a n d re dans to u te r A m e r ią u e espagnole, q u a n d b ie n m em e l ’ex em p le d ’a ffra n ch issem e n t a n te - rie u re m e n t d o n n ę p a r le s E ta ts - U n is n ’e u t p a s fa its o n g e r les co lo n ies de 1’E sp ag n e a p ro c la m e r a le u r to u r le u r in d e p e n d a n c e de la m e tro p o le .

E n effet, a u c o m m e n c e m e n t de ce siecle, l’A m ś riq u e du S u d to u t e n tie r e avait seco u e le jo u g de la c o u r de M adrid, qui n e p o sse d ait dej A p lu s dans le n o u v e a u m o n d e, d u m o in s sans c o m b a ts, q u e r A m e r iq u e c e n ­ tra le e tle M e x iq u e .

C e p e n d a n t, p o u r p ró v en ir to u te te n ta tiv e de soulbve- m e n t, le v ic e - r o i de la N o u v e lle -E s p a g n e ,d o n Jose I tu r - rig a ra y , av a it sa g e m e n t ju g e n ec essaire d efa ire a u Mexi- qu e d ’assez la rg e s concessions p o litiq u e s, et d ’a p p e le r les crćoles m e x ica in s ii jo u ir des d ro its q u ’o n le u r av a it re - fuses ju s q u ’alo rs. M a llie u re u se m e n tle sE sp a g n o ls etablis dan s le pays, c o n s id ś ra n t ces concessions co m m e la ru in ę de leurs a n tiq u e s p rivileges, se so u le v e re n t c o n trę le

.2

(31)

\ic e - r o i, s’e m p a r e r e n t de sa p e rso n n e e t l ’e n v o y e re n t en E sp ag n e p o u r y r e n d r e c o m p te de sa c o n d u ite . T o u te s les fra n ch ises a c co rd ee s p a r lu i f u re n t re tire e s , e t le M exique fu l re p lo n g e dans 1’a n c ie n o rd re de choses.

C e s śv e n o m e n ts a v a ie n t lie u en 1808, et, q u o iq u e d ’un jo u r a l ’a u tre Eon d u t s’a tte n d r e iiy o ir la co lo n ie essayer de re c o n q u e rir les d ro its d o n t elle av a it etć f ru s tre e , d eu x ans de L ranąuillile a p p a re n te av a ie n t si co m p le te - m e n t rassu re les e sp rits, que la c o n sp ira tio n d ’H idalgo e t le so u le v e m e n t q u ’il ex c ita en s e p to m b re 1810 les je - te r e n t d an s u n e stu p e fa e tio n p ro fo n d e .

C’e ta it p a r les pr& tres q u e 1’E sp ag n e av a it p rin c ip a le - m e n t d o m in e le M exique p e n d a n t tro is ce n ts a n s ; c ’e- ta ie n t les pr& tres aussi q u i, p a r u n ju s te r e to u r des c h o ­ ses d’ic i-b as, d e v a ie n t affra n c h ir le M exique du jo u g de 1’E sp a g n e . A u c o m m e n c e m e n t d u m ois d ’o c to b re sui- v a n t, le c u re H idalgo c o m p ta it d eja p res de c e n t m ille c o m b a tta n ts, m ai arm e s, il est x ra i, m a is q u e le n o m b re n e laissait pas de r e n d r e re d o u ta b le s . G ette m asse d ’in - su rg es, q u i se re p a n d a it p a r to n t co m m e u n to r r e n t et m e n a ę a it de s’a c c ro itre e n c o re , p o r ta it la c o n s te rn a tio n d a n sM e x ic o , siege d u g o u v e rn e m e n t co lo n ial, e t j e t a i t q u e lq u e c o n fu sio n d an s les idees des creo les e u x -m e m e s.

T o u s flis d ’E sp ag n o ls, les u n s, en c o n s id e ra tio n des liens d u sang, se c ro y a ie n t te n u s c o m b a ttre E in su rre c tio n ; les a u tre s , n e so n g e a n t q u ’a l’affra n c h isse m e n t d u pays q u i les avait vus n a itro , c ro y a ie n t de le u r d evoir de p ren - d re fa it e t cau se p o u r les in su rg es. G ette' dissidence d ’o- p in io n n e se r e n c o n tr a it d u re ste q u e d an s les fam illes creo les ric h e s ou p u iss a n te s; le p e u p le , b la n c, m e tis ou in d ie n , n ’h e sita it pas a se r a n g e r d u có te d ’H idalgo.

L es In d ie n s s u r to u t, p lu s asservis e n c o re q u e les c re o ­ les, e s p e ra ie n t q u ’u n e ere nouvelle a lla it s’o u v rir p o u r eu x , e t q u e lq u e s-u n s deja re y a ie n t le r e to u r de le u rs an- cien n e s sp le n d e u rs.

T el e ta it 1’e ta t p o litiq u e e t m o ra ł de la Nouvelle-15s-

(32)

p a g n e a l ’e p o q u e o u s’o uvre ce re c it, c ’e s t- i - d i r e a u co m - m e n c e m e n t d u m ois d ’o c to b re 1810.

U n m a tin , ii 1’h e u re o u sous les tro p iq u e s la c h a le u r d u j o u r su c ce d e b r u s ą u e m e n t il la f ra ic h e u r des n u its , v ers n e u f h e u re s, u n ca v alier su iv ait so lita ire in e n t n o n pas la r o u te , c a r il n ’y en a pas de b ie n d is tin c te m e n t tra c e e , m ais les p lain es sans fin q u i c o n d u is e n t d e s lim i- tes de l’E ta t de Y era-C ru z ii ce lu i de O ajaca. P o u r tr a - v e rse r u n pays e n g u e rre civile e t dans le q u e l, en n e c o m p ta n t pas les ró d e u rs de p ro fessio n , to u jo u rs p re ts a d e p o u ille r les p a s sa n t sans a c c e p tio n de p a r ti, o n est c o n tin u e lle m e n te x p o s e i r e n c o n tr e r u n e n n e m i, le voya- g e u r en q u e s tio n e ta it assez p a u v re m e n t a rm e e t e n c o re p lu s p a u v re m e n t m o n tś .

U n sa b re c o u rb e , ii f o u rre a u dc fe r aussi ro u ille q u e s ’il e u t lo n g te m p s se jo u rn e d an s le fond de q u e lq u e riv ie re , e ta it passe e n tr e sa ja m b e e t le c u ir de sa selle, p o u r e v ite r ainsi les m e u rtris s u re s q u e le p o id s d ’u n e a rm e se m b la b le fa it ś p r o u v e r au x h a n c h e s d u ca v alier.

Ge sa b re e ta it le seu l m o y e n de defense d o n t ce lui-ci p a r tit p o u v o ir d isposer, en su p p o sa n t to u te fo is q u e la ro u ille n ’e u t p as c lo u e la la m e a u fo u rre a u .

Le c h e v al su r le q u e l le v o y a g e u r c h e m in a it assez p ć - n ib le m e n t a u p a s , m alg re les coups d ’e p e ro n d o n t il n ’ś - ta it pas a v a re , av a it sans d o u te a p p a rle n u ii q u e lq u e pi- cador de toros (to re a d o r a cheval), il en ju g e r p a r les ci- c a tric e s n o m b re u se s d o n t ses flancs e t son p o itra il e ta ie n t sillo n n es. C’ć t a i t t o u t au m o in s u n e b e te de r e b u t.m a i - gre e t retiv e, e t q u e ce lu i q u i l’e u t a c h e te e cinq p ia stres e u t p ay śe le d o u b le de sa v a le u r.

L e ca v alier p o r ta it u n e veste d ’etofl'e b la n c h a tre , des c a lz o n e r a s 1 de v elo u rs de co to n olive, des b o ttin e s de p e a u de chevre im ita n t le c u ir de G ordoue. II e ta it p e tit, m in c e e t ch e tif, p a ra issa n t to u t a u p lu s ilge de v in g t-

1. S o r te d e p a n ta lo n f

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d e u x ans ; son c h a p e a u de feuilles de p alm ie r o m b ra - g ea it de ses la rg e s b o rd s u n e figurę d ’u n e expression d o u c e e t p r ś v e n a n te e t d ’u n e nai'vetć excessive, si d eux y eu x vifs e t sp iritu e ls, b r illa n t d an s des o rb ite s e n fo n - cćs, n ’en eu sse n t s in g u lie re m e n t releve l ’expression. II ć ta it ev id e n t cjue c e tte b o n h o m ie n e p re n a it sa so u rce q u e d an s la m a n s u e tu d e d u c a r a c te r e e t n o n p a s d a n s u n d efa u t d ’in te llig en c e. U ne b o u c h e fine, parfois ra illeu se e t e n a c c o rd p a rfa il avec la v iv a c ite d u re g a rd , in d iq u a it q u e le je u n e v o y a g e u r p o u v a it a u b eso in m e ttre u n e re p a rtie c a u stiq u e au service d ’u n e g ra n d ę finesse d ’ob- se rv a tio n .

P o u r l e m o m e n t, re x p r e s s io n d o m in a n tę de s a p h y sio - n o m ie ć ta it celle d ’u n d ć s a p p o in te m e n t c o m p le t m ćlć d ’u n e fo rte dose d ’in q u ić tu d e .

Le p aysage ć ta it de n a tu r ę li ju stifie r c e tte a p p rć h e n - sion de la p a rt d ’u n c a v a lie r .solitaire co m m e ce lu i-c i.

Des p la in e s sans lin s ’e te n d a ie n t d e v a n t l u i ; u n te r- ra in c a lc a ire , lić rissć d ’alo es e t dc ra q u e tte s ćp in eu ses a u x q u e ls se m ć la ie n t q u elq u e s h e rb e s ja u n ie s , p re se n ta it 1’a s p e c t le p lu s m o n o to n e e t le p lu s t r is te . De d istan c e en d is ta n c e ,d e le g e r s to u rb illo n s d ’u n e p o u s s ić re b la n c h itr e s’e le v a ie n t e t s’affaissaient to u r i i to u r. Des c a b a n e s dis- se m in ć es de loin en loin e ta ie n t vides e t ab a n d o n n ee s, e t 1’a r d e u r d u soleil, le m a n q u e d ’e a u , la so litu d e pro- fo n d e de ces steppes p o u d re u se s, p o r ta ie n t le d e c o u ra - g e m e n t e t la p e u r d a n s l ’am e d u je u n e cav alier.

Q u o iq u ’il e p e ro n n a ts o n c h e v a lle p lu s co n scie n cie u se - m e n t q u ’il lui f u t possible, 1’a n im a l fa tig u ć n e q u itta it son p as q u e p o u r p re n d re , p e n d a n t u n e m in u tę o u d eux se u le m e n t, u n p e tit t r o t d esag rea b le q u i p a ra issa it ć tre sa p lu s fo u g u eu se a llu re . Les efforts d u ca v alier n ’abou- tis sa ie n t q u ’k c o u y rir son f ro n t d ’u n e su e u r d ’epuise- m e n t e t d ’angoisse, q u ’il ć la it ii c h a q u e in s ta n t fo rce d ’e- p o n g e r avec son m o u c h o ir.

« M audite b ć te l » s’ćc riait-il p arfo is avec fu re u r, Mais

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le cheval r e s ta it in se n sib le aux in ju re s de son m a itre , co m m e a u x s o llic ita tio n sin c e s sa n te s d e s e s ćp e ro n s. Alors celui-ci c o m p a ra it tr is te m e n t, e n se r e to u r n a n t su r sa selle, 1’esp ace cju’il avait fra n c h i avec celui qui lui re s ta it a tra v e rs e r e n c o re p o u r s o r tir de ces sayanes desolees ; p u is il s’a b a n d o n n a it avec u n e so rte de d esesp o ir & l’al- lu re p ac ifiq u e de sa m o n tu re .

Le je u n e ca v alier m a rc h a e n c o re lo n g te m p s d an s cet e ta t a lte r n a tif d ’e x a s p e ra tio n e t d ’o p p ressio n d ’e s p rit, ju s q u ’a u m o m e n t oii le soleil, dev en u p re s q u e p e rp e n d i- c u la ire , a n n o n ę a 1’h e u re de m i d i . L a c h a le u r cro issait k m e su re q u e le soleil m o n ta it, e t, p o u r co m b le de m al- lh e u r, la b ris e to m b e e avait m e m e cessś de -soulever la p o u ssiere. L e s tig e s dessech ees des h e rb e s r e s ta ie n t dans u n e im m o b ilitó com plfete, e t le cheval ćp u ise m e n a ę a it de r e s te r im m o b ile co m m e elles.

C onsum e de soif, accab le de fatig u e, le c a v a lie r m it pied a te r r e , e t, la issa n t la b rid e su r le co u de sa m o n ­ tu r e in c a p a b le de tr a h ir sa conflance en se |sa u v a n t, il s’avan ęa vers u n m assif de n o p als e s p ć ra n t y tr o u v e r q u e lq u e s fru its p o u r se d ć sa lte re r. Le h a s a rd Y oulut q u e son e sp o ir n e tu t pas tro m p ć , e t, aprbs av o ir cueilli e t d ćp o u ille de le u r enveloppe ep in eu se u n e d o u z a in e de figues de B a rb a rie , d o n t la p u lp ę fade m ais ju te u s e ra- fra ic h it sa b o u c h e dessćchće, le ca v alier re m o n ta s u r sa b e te e t r e p r it sa r o u te in te r ro m p u e .

II e ta it p res de tro is h e u r e s q u a n d le v o y ag e u r isole at- te ig n it en tin u n p e titv illa g e , situe a q u e lq u e d istan ce des p la in e s in te rm in a b le s q u ’il a c h ev a it de p a rc o u rir. Mais, co m m e d an s to u s c e u x q u ’il avait re n c o n tre s depuis u n jo u r , les cab an e s en ć ta ie n t d esertes e t a b a n d o n n e e s;

sa n s p o u v o ir a p p re n d re le m o tif de c e tte d ć se rtio n genć- ra le , le v o y ag e u r c o n tin u a son ch e m in .

Chose e tra n g e ! loin d e to u te riy ie re ou de to u t cours d ’eau , il tro u v a it de te m p s a a u tre , e t a son p ro fo n d śto n - n e m e n t, des ca n o ts, des p iro g u e s hissśs au so m n iet des

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a rb re s ou su sp e n d u s l l e u r s grosses b ra n c h e s, e t p e rso n n e p o u r lu i e x p liq u e r ces b iz a rre rie s.

E nfin, a sa g ra n d ę jo ie , le b ru it des sa b o ts d ’u n cheval v i n t t o u t ii co u p tr o u b l e r l e lu g u b re silen c e de ces solitu- d e s . L a te r r e d essech ee rś s o n n a it d e rr ie r e lu i. C e ta it sig n e q u ’u n v o y ag e u r, en c o re invisible gratce aux d e to u rs d ’u n ch e m in q u i to u r n a it d e u x ta lu s e s c a rp śs, a lla it b ie n tó t le r e j o i n d r e .

A u b o u t de q u e lq u e s in sta n ts, en effet, u n c a v a lie r se m o n tra e t n e ta r d a pas il p r e n d r e p la ce il son c ó te le l o n g d e la r o u te , lo u t ju s te assez la rg e p o u r q u e d eu x ch e v au x p u sse n t y c h e m in e r de f r o n t.

«. Santos dias ! d it le n o u v e a u v en u en p o r ta n t la m ain

^ son c h a p e a u .

— Santos dias! » re p o n d it p o lim e n t le se co n d en soule- v an t le sien ii son to u r.

L a re n c o n tre de d eu x v o y ag e u rs au m ilicu d ’u n e soli- tu d e p ro fo n d c est to u jo u rs u n e v e n e m e n t, e t ceu x -ci se c o n s id e r e r e n t avec u n e c u rio site m u tu e lle .

L e ca v alier e ta it u n je u n e h o m m e q u i p a ra issa it age to u t a u p lu s de v in g t-q u a tre o u v in g t-c in q ans, e t la con- f o rm ite dA ge ii p e u p res ś ta it la seule q u e les v o y ag eu rs eu ssen t e n tre eu x . L a s ta tu re d u d e rn ie r a rriv e e ta it ele- vee, ro b u ste e t p le in e d ’eleg a n ce ii la fois. Ses tr a its re- g u lie rs e t y ig o u re u se m e n t a c c c n tu e s, le feu de se sy e u x n o irs, la m o b ilite de ses epaisses m o u stac h es e t son te in t b ro n z e , in d iq u a ie n t de violent.es passions e t p o r ta ie n t 1’e m p re in le e n e rg iq u e d u san g a ra b e d ’ou so n t sorties t a n t de farailles espagnoles.

II montait un cheval bai brun dont les formes elancees et nerveuses trahissaient la meme origine orientale que celle de son cavalier. Celui-ci le maniait avec une ai- sancc parfailc et paraissait inćbranlable sur sa selle, au pommeau de laquelle etait suspendu un mousqueton;

une rapiere a deux tranchants et a fourreau de cuir pen- dait au crochet de son ceinturon, de cuir fauve comme

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