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Deux καθολικαί 'εκκλησίαι dans le Mons Porphyrites

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The Journal of Juristic Papyrology Vol. XXIV, 1994, pp. 71-85

Adam Łajtar

Ewa Wipszycka

DEUX ΚΑΘΟΛΙΚΑΙ ΕΚΚΛΗΣΙΑΙ

DANS LE MÖNS PORPHYRITES

Au dossier des καθολικαί εκκλησίαι analysé dans ce numéro du JJP, p.

191-212, il faut joindre deux inscriptions trouvées dans le Möns

Porphy-rites (Désert Oriental). Elles sont connues depuis plus de 150 ans, elles ont

été publiées et commentées plusieurs fois, mais malgré cela, elles nous

paraissent présenter encore des problèmes. Nous avons cru bon d ' e n

reprendre l'étude, en essayant de les interpréter par rapport aux vicissitudes

politico-religieuses du IV

e

siècle.

Notre point de départ est donné par l'édition de A. Bernand, Pan du

désert, Leiden 1977, nos. 27 et 28, où l'on trouvera des renseignements sur

l'histoire de ces inscriptions depuis leur découverte, ainsi que sur les

re-cherches qui les concernent.

1. A. Bernand, Pan du désert, no. 27

Plaque de granit abîmée de tous les côtés et dont les dimensions

origi-nelles étaient de 50 cm χ 30 cm χ 22,5 cm. Le texte a été gravé à l'intérieur

d'une tabula ansata. Inscription trouvée à Bir Qattar, au sud du Gebel

Do-khan (Möns Porphyrites), à l'extérieur d'un bâtiment à portique, à l'est

d'un cours d'eau desséché, au-dessus de Bir Naqat.

Φλαούιο? 'Ιούλιο?

ό διασημότατος

ηγβμων θηβαίδος

4 ό κατασκεύασα?

(3)

kv-7 2 A. ŁAJTAR - Ε. WIPSZYCKA

ταϋθα καθολίκην

εκκλησία ν èm

ΓΑ]τρήτος

ϊτησκό-8 [ττο]υ Μαξίμίανοττόλ(βως)

"Flavius Iulius, le très distingué gouverneur de Thébaïde est celui qui

con-struisit ici une église καθολική; du temps où Hatres était évêque de

Maxi-m i a n o p o l i s " .

La construction grammaticale est correcte, mais non conforme au

sché-ma habituel des dédicaces. On s'attendrait à une phrase du type

Φ λ α O V L O S

'Ιούλιο? ... κατεσκίύcure ταύτην την καθολίκην έκκλησίαν. La forme

in-solite de l'inscription semble être due à l'intention de présenter comme un

fait extraordinaire l'intérêt que ce personnage, si haut placé dans la

hié-rarchie administrative de l'Egypte, a témoigné pour la construction d ' u n e

église "ici", c'est-à-dire dans cet endroit désert, très éloigné de la zone

habitée et en particuler de la résidence du praeses.

A la 1. 6, après ίκκλησίαν, nous proposons de mettre un point en haut, et

non une virgule (comme l'a fait A. Bernand). La copie de l'inscription

re-produite par J. Drescher

1

montre, entre ε κ κ λ η σ ί α ν et è m , une ligne oblique

légèrement courbée, qui suggère une pause assez nette dans le texte.

Dans sa qualité de praeses de la Thébaïde, Flavius Iulius n'apparaît

q u ' i c i

2

; mais un Flavius Iulius Ausonius, qui est probablement la même

personne, apparaît dans le rôle de gouverneur de la province d ' A u g u s

-t a m n i c a dans quelques papyrus d ' O x y r h y n c h o s

3

. La province d ' A u

-1

Bull. Soc. Roy. Géographie 24, 1951, p. 113.

2 II ne figure pas dans la liste des praesides de la T h é b a ï d e de The prosopography of

the later Roman empire (PLRE), I, Cambridge 1971, p. 1098 sqq.

3 P. Oxy. I 87; X I I 1559; L 3576; 3577; 3578; 3579; L I V 3774; 3775; P. Harr. 65

(de p r o v e n a n c e inconnue). Il est très p r o b a b l e q u e dans C. Theod. XII 1, 34, texte daté du 8 avril 3 4 2 et où on lit " a d A u x e n t i u m p r a e s i d ( e m ) A u g u s t a m n i c a e " , le n o m " A u x e n t i u m " a été écrit par erreur au lieu d e " A u s o n i u m " . Sur Flavius Iulius A u s o -nius, voir PLRE I, p. 139-140, Î.V. " A u s o n i u s 6", en outre P. SUPÊSTEIJN, K . A . WORP, Tyche 1, 1986, p. 194. D a n s son article ' C o u n t A u s o n i u s ' , Tyche 7, 1992, p. 8 - 1 3 , R.S. BAGNALL p r o p o s e d ' i d e n t i f i e r Flavius Iulius Ausonius, praeses de l ' A u g u s t a m n i c a , avec A u s o n i u s cornes, mentionné par SPP X X 111. Il p e n s e en outre q u ' i l pourrait être la m ê m e p e r s o n n e q u e le Iulius A u s o n i u s dont la carrière est présentée d a n s PLRE I, p. 139, Î.V. " A u s o n i u s 5". Cet h o m m e , né aux environs de 288, m é d e c i n , curialis d e Va-sates (Bazas) et de B u r d i g a l a (Bordeaux), devint, vers la fin de sa longue vie, d a n s les a n n é e s s o i x a n t e - d i x du I Ve siècle, praefectus praetorio de l ' I l l y r i c u m . Il eut un fils,

(4)

DEUX ΚΑΘΟΛΙΚΑΙΕΚΚΛΗΣΙΑΙ DANS LE MÖNS PORPHYRITES 7 3

gustamnica fut créée en 341. La date la plus ancienne qui soit attestée pour

le gouvernement de Flavius Iulius Ausonius dans cette province est le 13

novembre 341 (P. Oxy. XII 1559), et la date la plus récente est le I

e r

juillet

342 (P. Oxy. LIV 3775). Cet homme semble donc avoir été le premier

praeses de cette province. Au mois de mars 343, ce poste était déjà occupé

par une autre personne, Flavius Olympius

4

. A en juger par la titulature du

praeses de la Thébaïde et de celui de ΓAugustamnica dans la première

moitié du IV

e

siècle, le premier était inférieur au second dans la hiérarchie

administrative

5

. Dans cette situation, si Flavius Iulius Ausonius est la même

personne que le Flavius Iulius de notre inscription, il a dû exercer ses

fonc-tions de gouverneur en Thébaïde avant 341.

La mention de Hatres, évêque de Maximianopolis, nous permet d'établir

une datation plus précise.

La ville de Maximianopolis est attestée dans nos sources du début du

IV

e

au début du VIII

e

siècle

6

. Où faut-il la situer? Certainement dans la

ré-gion des localités actuelles Qena et Kift, peut-être à Qena même (Καινή

π ό λ ι ? ) . Au cours de la première moitié du IV

e

siècle, Maximianopolis est

mentionnée deux fois en tant qu'évêché. Athanase cite une liste qui lui a été

envoyée par Mélitios et qui contient les noms des évêques partisans de

n o m m é lui aussi Iulius Ausonius, érudit, poète, qui f u t praefectus praetorio et obtint le consulat ( P L R E I p. 140-141, s.v. " A u s o n i u s 7")· R S. Bagnall attire l'attention sur le fait q u e Iulius A u s o n i u s père avait un b e a u - f r è r e haut placé: c ' é t a i t A e m i l i u s M a g n u s A r b o r i u s (mort avant 337), rhéteur à C o n s t a n t i n o p l e , ami de Constantin le G r a n d et é d u c a t e u r de ses fils (peut-être m ê m e d e Constance, le f u t u r successeur de Constantin). Il se peut — observe R.S. Bagnall — que ce lien familial ait aidé Iulius A u s o n i u s père — p e r s o n n e d ' o r i g i n e assez modeste ·— dans sa carrière administrative. Ces hypothèses de R.S. Bagnall s ' a c c o r d e n t bien avec l ' h y p o t h è s e selon laquelle Flavius Iulius praeses de la T h é b a ï d e serait la m ê m e personne que Flavius Iulius A u s o n i u s praeses de l ' A u g u s t a m n i c a , ainsi q u ' a v e c la datation q u e n o u s allons p r o p o s e r c i d e s s o u s pour l ' i n -scription en question (325-339). N o t r e h o m m e serait devenu praeses de la T h é b a ï d e au t e m p s où son beau-frère était un personnage influent dans l'entourage de l ' e m p e r e u r .

4 C f . P. Oxy. X L V I I I 3389, du 14 mars 343.

5 A cette é p o q u e , le praeses de la T h é b a ï d e est dit perfectissimus (en grec δ ι α σ η μ ό

-τ α -τ ο ? , c o m m e d a n s notre inscription), alors q u e le praeses de l ' A u g u s t a m n i c a est dit clarissimus. C e n ' e s t q u e dans les a n n é e s soixante du I Ve siècle q u e le praeses de la

Thébaïde devint clarissimus.

6 S u r M a x i m i a n o p o l i s , voir H. KEES, R.-E., X I V (1930), col. 2 4 8 4 - 2 4 8 5 , I.V.;

CALDERINI, Dizionario, III 3 (1982), p. 232, I.V.; S. TIMM, Das christlich-koptische Ägypten in arabischer Zeit, IV, W i e s b a d e n 1988, p. 1624-1628.

(5)

7 4 A. ŁAJTAR - Ε. WIPSZYCKA

celui-ci; elle atteste entre autres, pour l ' a n n é e 325, la présence d ' u n é v ê q u e mélitien èv Tevrvpais èv Μαζίμι,ανουττόλα7. Le s e c o n d t e x t e attestant l ' e x i s t e n c e d ' u n é v ê q u e de M a x i m i a n o p o l i s se r a p p o r t e à l ' a n n é e 3 3 9 . D a n s une lettre adressée à Sarapion de T h m o u i s , A t h a n a s e fait savoir q u e d a n s c e t t e ville, l ' é v ê q u e H a t r e s ( ' A t r a s , d a n s la t r a d u c t i o n s y r i a q u e ) , d é c é d é , a été r e m p l a c é par H e r m i n o s8. L ' é p i s c o p a t de H a t r e s a d o n c dû a v o i r lieu après 325 et avant 339. Cette datation vaut é g a l e m e n t pour la d é d i c a c e de l'église qui nous intéresse. Pour cette période, notre liste des

praesides de la T h é b a ï d e est vide; Flavius Iulius peut d o n c y trouver sa

place sans difficulté. Il est essentiel de remarquer que le d i o c è s e de M a x i -mianopolis, mélitien en 325, était athanasien sous l ' é p i s c o p a t de Hatres. Il s ' e n s u i t que l'église construite par Flavius Iulius dans le M ö n s P o r p h y r i t e s appartenait aux athanasiens.

M a x i m i a n o p o l i s était située à l ' e n d r o i t où le Nil t o u r n e vers l ' e s t et d ' o ù partaient les routes menant, à travers le Désert Arabique, aux ports de la M e r Rouge. Grâce à sa position, cette ville était un centre d ' o ù l ' o n pou-vait c o m m o d é m e n t administrer les carrières du M ö n s Porphyrites (ainsi q u e celles du M ö n s C l a u d i a n u s ) . SPP X X 76 [première moitié du I Ve siècle] parle des μέταλλα τα προς Μαζιμίανουπόλα9.

L a g é o g r a p h i e e c c l é s i a s t i q u e , c o m m e d ' h a b i t u d e , suit la g é o g r a p h i e administrative: les églises et les carrières du M ö n s Porphyrites sont soumises à la m ê m e ville.

7 Athanase, Apologia secundo, 71 (éd. H.-G. O P I T Z , II, 1, p. 150): Παχύμι? èv Tez;-τύραίς èv Μαχιμιαι>οι>7Γ0λ€ΐ. L'interprétation de ce passage fait difficulté. S. T I M M (op. cit., p. 1625) le traduit par "Pachymis in Tentyra/Dendera (und Bischoff NN) in Maximianoupolis"; et il le commente comme suit: "Man darf aus der ungewöhnlichen Textabfolge wohl schließen, daß im Jahre 325 AD das (melitianische) Bistum Maxi-mianoupolis gerade vakant war". II nous paraît plus simple de supposer que Pachymis était évêque dans les deux villes, Tentyra et Maximianopolis, ce qui n'était pas impos-sible dans l'Eglise de cette époque. Il faut envisager aussi la possibilité que le texte que nous possédons soit lacuneux: il se peut qu'après Π α χ ΰ μ ΐ ΐ èv TtvTvpaLs il y ait eu, dans le texte original, le nom d'un autre évêque — de l'évêque de Maximianopolis.

8 F . L A R S O W , Die Festbriefe des heiligen Athanasius aus dem Syrischen übersetzt

und durch Anmerkungen erläutert, Berlin 1852, p. 128. Pour la datation de cette lettre, voir A . C A M P L A N I , Le Lettere Festali di Atanasio di Alessandria, Roma 1 9 8 9 , p. 1 6 0 -168.

9 Voir aussi P. Beatty Panop. I 153 [300], où il est question de fournitures qui doivent être envoyées à Καινη π ό λ ΐ ΐ et qui sont destinées aux carrières.

(6)

DEUX ΚΑΘΟΛ1ΚΑΙΕΚΚΛΗΣΙΑΙ DANS LE MÖNS PORPHYRITES 75

2. A. B e r n a n d , Pan du désert, no. 28

P l a q u e de pierre (granit?) t r o u v é e sur la route m e n a n t du t e m p l e de Sarapis aux carrières situées sur la m o n t a g n e dite L y k a b e t t o s , près d ' u n e petite c o l o n n e de granit, qui a pu peut-être servir de soutien à la p l a q u e1 0. L ' i n s c r i p t i o n fut copiée pour la première fois par J.G. W i l k i n s o n en 1826, ensuite, en 1898, par W . F . H u m e . D e s d e u x copies, celle de W i l k i n s o n semble d é c i d é m e n t être la meilleure; par rapport à celle de H u m e , elle a en plus la fin de la 1. 1, la fin de la 1. 3 et toute la I. 4. A un m o m e n t indéter-miné entre 1898 et 1932, la plaque a disparu. J. Röder a cru pouvoir identi-fier le ä y i o s τόπος mentionné dans l ' i n s c r i p t i o n " .

К (S β" ΛίΑγΗοαηΑΡχιΚΉί-γχΛ.

SI Λ I К И (OA Μ(ΜΤιογ л

Р1СЧ и м Ч и о . Γ Ι ŁJ To η Uü> Hb-nk.p&.f>llw<6.>n6.t4b.

Ο Μ Рг4 lé· po СОЛ

Fig. 1. Copie de l'inscription par J.G. Wilkinson

(d'après C.H.O. SCAIFE, Bull, of the Faculty of Arts, Fuad 1 University, III 2, 1935, p. 59)

ΚΑθΟ / \ AtKH £ККЛН_Х,С1Л

MfAjOjIOY-Л1ЛЧ*ЛОСЕПАРХ1КОС CVXAT^piCTUnTWA HUTonllAlH »П^ pAHIli>KAnAN^4

*ATH APXI ЛЛТОП0 ft КА1Л01ПОГС TUNlTA 1С. AN£U С Α Ε I ЛИНХ A MC I NTUN КI

ONONltpOCOAVAClOr-l

Fig. 2. Copie de l'inscription par W.F. Hume

(d'après R. D E L B R Ü C K , Antike Porphyrwerke, Berlin - Leipzig 1932, p. XXIV)

1 0 Sur les détails topographiques de la trouvaille, voir C.H.O. S C A I F E , Bulletin of the Faculty of Arts, Fuad I University, III 2, 1935, p. 58.

1 1 J . R Ö D E R dans Th. K R A U S , J . R Ö D E R , W . M Ü L L E R - W I E N E R , 'Möns Claudianus, Möns Porphyrites. Bericht über die zweite Forschungsreise 1964', MDAIK, 22, 1967, p. 193-194: "Den Ostabschluß des Platzes bildet eine für sich stehende Gebäudegruppe, die aus einem Rechtecksaal mit quadratischer Apsis im Osten und einem westlich vor-gelagerten Zweinischenraum besteht. Der Vorbau könnte der Rest eines Martyriums sein. Er ist durch eine Baufuge vom Kirchengebäude getrennt und wird wohl als Drei-nischenbau zuerst allein bestanden haben. Im Innenraum des Kirchenbaues befinden sich zwei Reste kleiner rohbearbeiteter Porphyrsäulen. Eine Sitzbank zieht sich entlang des Südteiles der östlichen Abschlußwand. Auf dem freien Platz nahe der Kirche wurde der Rest einer Froschlampe aus rötlich-braunem Ton gefunden. Sie gehört dem späten 4., wenn nicht gar dem Anfang des 5. Jhr. an".

(7)

76 A . Ł A J T A R - Ε . W I P S Z Y C K A

ι Καθο+λικη t εκκληΐσία Μ ε λ α ί ο υ Π " Π

2 Δίδυμο? επαρχικος ευχάριστων τω άγίω τόπω άμα ΥΙαρανίω καϊ

Υ\ανα-3 χάττ] αρχιλατόμοι? και λοιποί? τεχιηται? άνενεωσα et? (τη)ι^ χ(άλ)ασιν

т<хш

κι-4 оуооу Ιεροσολύμων

"Eglise καθολική de Melitios Π " Π — M o i , Didymos, fonctionnaire de

Vof-ficium de l'éparchie, en remerciant ce lieu sacré, je l'ai restauré, ensemble

avec Paranios et Panachates, chefs carriers, et les autres artisans, pendant le

travail consistant à faire descendre les colonnes destinées à Jérusalem".

La première ligne est séparée de la seconde par un intervalle qui est

nettement plus large que ceux qui séparent les trois lignes suivantes. En

outre, les lettres de la première ligne sont beaucoup plus espacées que celles

des autres lignes

1 2

. Il est évident que le graveur a voulu signaler par là la

valeur des renseignements contenus dans la première ligne.

Le groupe de signes qui, dans la copie de Wilkinson (et seulement dans

celle-ci), figure à la droite du nom Μ ε λ ι τ ι ' ο υ , a été considéré, jusqu'ici,

comme un mot abrégé, lié d'une manière ou d'une autre au nom

MeAi-TLOV.

Selon D. Meredith

1 3

, suivi par A. Bernand, on aurait là une

abrévia-tion de π(ραί)π(οσίτου) (latin praepositus)

14

. La première ligne de

l'in-scription devrait donc se lire ainsi: Καθολική εκκλησία.· M ε λ ι τ ί ο ν

π(ραί)-τΑοσίτον). Α. Bernand traduit cela par "Eglise publique. Mélitios étant

pré-posé"; et dans le commentaire, il précise son interprétation ainsi: "Quand

Mélétios était préposé (à cette église)". Ce Mélitios ou Mélétios serait une

personne inconnue de nous. Une solution différente a été proposée par J.

Dummer

1 5

. A son avis, Π " Π serait une abréviation de πάπα, terme

honori-fique qui pouvait être attribué aux évêques et aux presbytres. MeAiVio?

πά-πας serait le célèbre Mélitios, évêque de Lykopolis et fondateur de l'Eglise

mélitienne. Il faudrait donc lire et entendre la première ligne ainsi:

Καθολι-κή εκκλησία Μελίτίου π(ά)π(α), "église catholique de l'évêque Mélitios".

1 2 Ces deux traits caractéristiques ne se voient que dans la copie de Wilkinson. 1 3 D. M E R E D I T H , Chr.d'Eg. 28, 1953, p. 131-133.

1 4 Un cas où

Π Π

est l'abréviation de πραίπόσι,τος est noté par M. Avi Y O N A C H , Abbreviations in Greek inscriptions, Jerusalem 1940, p. 96.

1 5 J . D U M M E R , 'Bemerkungen zu einer Inschrift vom Möns Porphyrites', [dans:] Neue Beiträge zur Geschichte der alten Welt, Π, Berlin 1965, p. 293-303.

(8)

DEUX ΚΑΘΟΛΙΚΑΙΕΚΚΛΗΣΙΑΙ DANS LE MÖNS PORPHYRITES 7 7

La première de ces deux lectures nous paraît entièrement fausse, et la

se-conde, pas tout à fait satisfaisante.

En ce qui concerne la première lecture, il faut objecter que nous

con-naissons suffisamment bien les structures de l'Eglise en Egypte pour

ex-clure que le terme πραιπόσιτο? ait pu s'appliquer à une fonction

ecclésias-tique. Si l'on acceptait la solution ττ(ραι)π(οσίτου), il faudrait penser que ce

Mélitios ιτραιττόσιτος était un officier qui commandait un contingent

mili-taire servant de protection aux ouvriers des carrières et aux fonctionnaires

civils responsables de l'organisation du travail. La présence de soldats dans

les carrières du Désert Arabique est bien attestée.

Mais cette hypothèse se heurte à deux objections. D'abord, pourquoi

aurait-on abrégé si fortement le titre πραπτοσίτου, alors qu'il y avait assez

de place à la 1. 1 poür l'écrire en entier, et alors que le titre de Didymos, à la

1. 2, n'est pas abrégé? Ensuite, pourquoi aurait-on placé la mention de cet

officier — une mention d'importance secondaire — dans la première ligne,

qui, comme nous l'avons remarqué, se détache nettement du reste du texte

et se présente par là comme celle qui contient les informations les plus

im-portantes?

En ce qui concerne la lecture МеЛпчсш π(ά)π(α), observons que la

première ligne a été soigneusement organisée par le graveur. Les mots

κα-θολική et εκκλησία sont séparés l'un de l'autre par une grande croix, et à

l'intérieur de chacun d'eux il y a une croix ansée

1 6

. Le groupe de signes

Π " Π placé à la droite de MeAtτίου rompt la symétrie du texte. L'intervalle

entre Μελιτίου et Π " Π est plus grand que celui qui sépare εκκλησία de

Μελιτίου. Observons en outre que les signes Π " Π ont une forme

décidé-ment différente de celles des lettres du reste de l'inscription (leur

ressem-blance avec les pi qui apparaissent aux lignes 2 et 3 est assez faible).

Obser-vons enfin que l'absence d'abréviations dans le reste de l'inscription plaide

aussi contre la lecture MeAm'ou π(ά)π(α).

Il nous semble raisonnable d'admettre qu'entre le groupe de mots

κα-θολική εκκλησία Μ ε λ ι κ ο ύ et le groupe de signes Π " Π , il n'y a pas de lien

étroit. Il faut interpréter séparément l'un et l'autre.

Les mots καθολική εκκλησία M ε λ ι τ ί ο ν constituent une sorte de titulus:

"Eglise catholique de Mélitios"

1 7

. D'accord avec J. Dummer

1 8

et Annik

1 6 Dans la copie de W.F. H U M E , la disposition de cette ligne est un peu différente et

encore plus symétrique: Καθοΐλικη εκκληϊσία Μελετίου.

1 7 Un titulus analogue se trouvait au-dessus de la porte d'une église à Krem, Ledja, Syrie méridionale: Έ,Ιρήνη ττάσι t καθολική | t εκκλησία t t αγία Ί(ησο)ί) Xp(ισ-τού) t . Sur cette inscription, voir E. L I T T M A N N , D . M A G I E J R . , Greek and Latin

(9)

inscrip-78 A. ŁAJTAR - Ε. WIPSZYCKA

M a r t i n

1 9

, nous pensons que ce Mélitios ne peut être autre que le célèbre

Mélitios de Lykopolis, auteur du schisme qui divisa l'Eglise égyptienne au

lendemain des persécutions de Dioclétien. En ce cas, il est évident que

D i d y m o s et les autres hommes qui ont restauré cette église du M ö n s

Por-phyrites, étaient des partisans de Mélitios: ils ont écrit le nom de Mélitios à

côté de καθολική εκκλησία c o m m e marque de la foi juste. On comprend

ainsi l'appellation, tout à fait insolite, de cette église.

Annik Martin a attiré l'attention sur l'existence d ' u n e tradition d ' a p r è s

laquelle Mélitios, avant d'être envoyé à Phainô en Palestine, aurait été

con-damné à travailler dans les carrières de la Thébaïde. Puisque le Möns

Clau-dianus n'était plus exploité à cette époque, les seules carrières de la

Thé-baïde qui pouvaient servir c o m m e lieu de travaux forcés étaient celles du

M ö n s Porphyrites. On peut donc supposer q u ' e n mettant dans l'inscription

le nom de Mélitios, les hommes qui ont restauré l'église en question ont

voulu, non seulement manifester le caractère de leur foi, mais aussi rappeler

que Mélitios avait été présent et avait souffert en ce lieu.

Quant au groupe de signes Π " Π , puisqu'il n ' a pas de lien étroit avec ce

qui précède, il faut penser qu'il est un nomen sacrum ou une acclamation.

Nous proposons d ' y voir le nom de Yahvé. Dans les milieux de langue

grecque, qui ne connaissaient pas l'hébreu, le tétragramme ГПГР était lu, sur

la base de la ressemblance visuelle, comme Π Ι Π Ι ; et ce nom sacré Π Ι Π Ι

pouvait être représenté par deux lettres pi. Un témoignage tout à fait

ex-plicite au sujet de la genèse du signe Π Ι Π Ι nous est offert par saint Jérôme

dans sa lettre à Marcella qui porte le titre De decem nominibus Dei, Epist.

25: "... N o n u m tetragrammon quod άν^κφώνητον id est ineffabile

putave-tions in Syria. Southern Syria. The Ledja (= Publicaputave-tions of the Princeton University

archaeological expeditions to Syria in 1904-1905 and 1909, Division III, Section A,

Part 7), Leiden 1915, p. 443, no. 802; l'édition antérieure de cette inscription dans Ph.

LE BAS, W.H. WADDINGTON, Voyage archéologique en Grèce et en Asie Mineure, III,

In-scriptions, Paris 1870 (que nous citerons ci-dessous par LBW), no. 2 5 1 9 (réimprimée dans le DACL, VI, 2, col. 2089, Î.V. " H a u r a n " ) , est en partie d é f e c t u e u s e . U n autre e x e m p l e est offert par l'inscription LBW 2558, trouvée à Deir A!i près de Damas:

Συν-αγωγή Μαρκίωνιστών κώμ(ης) Αίβάβων τον Κ(υρίο)υ κ(α)1 σ(ωτη)ρ(οί) Ίη(σον)

Χρηστού• ττρονοία

Π α ύ λ ο υ

πρίσβ(ντίρον). τον

λ χ ' Î'TOVS ( c ' e s t - à - d i r e 318/9 d e

n.è.).

Cf. ci-dessus, note 15.

1 9 A. MARTIN, ' L ' E g l i s e et la khora au IVE siècle', Revue des Etudes

Augusti-niennes 25, 1979, p. 6.

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DEUX ΚΑΘΟΛΙΚΑΙΕΚΚΛΗΣΙΑΙ DANS LE MÖNS PORPHYRITES 7 9

runt et his litteris scribitur: iod, he, vav, he. Quod q u i d a m non intellegentes propter e l e m e n t o r u m s i m i l i t u d i n e m , c u m in G r a e c i s litteris r e p p e r e r i n t , Π Ι Π Ι legere c o n s u e v e r u n t " .

La magie de l'antiquité tardive, qui puisait des éléments disparates d a n s les religions orientales et n o t a m m e n t d a n s le j u d a ï s m e , utilisait le nomen sacrum Π Ι Π Ι , en tant que n o m d ' u n dieu puissant qui c o m m a n d e aux puis-sances i n f e r n a l e s2 0. Les chrétiens aussi connaissaient ce nomen sacrum et le considéraient c o m m e l ' u n des n o m s de Dieu: cela ressort du passage cité de saint J é r ô m e , ainsi q u e du fait q u ' E v a g r e Pontique a écrit un traité E t ? то Π Ι Π Ι . En ce qui concerne les textes épigraphiques, le nom Π Ι Π Ι , écrit sous la f o r m e de deux Π , apparaît au début de l ' é p i t a p h e d ' u n e f e m m e appar-tenant à l ' E g l i s e montaniste et portant le n o m de Μουντανή, à E s k i ç e h i r ( D o r y l a i o n ) en P h r y g i e2 1: Π t Π . Κοντχίνικος Μουντανίη σννβίω χραο--TLCLvfi ττνίνματίκτι μνήμης χάρω. Par son emploi de Π Π , cette inscription c h r é t i e n n e de P h r y g i e nous paraît c o n s t i t u e r un cas a n a l o g u e à celui de l'inscription qui nous intéresse, et c o n f i r m e r par là notre lecture.

Le terme ε τ τ α ρ χ ι κ ό ? sert à d é s i g n e r un f o n c t i o n n a i r e du b u r e a u du p r é f e t2 2. En Egypte, il n ' e s t attesté — en dehors de l'inscription en q u e s -tion — q u e par P. Oxy. IX 1223, 22. Ailleurs, il est attesté un peu plus a b o n d a m m e n t2 3. Dans Γ<=7ταρχ<.κό? de notre inscription, les éditeurs ont vu 2 0 Voir P.A. D E L A G A R D E , Ononiastica sacra, p. 2 2 8 sqq.; L . T R A U B E , Nomina sacra, München 1 9 0 7 , p . 2 8 ; C . B O N N E R , Studies in magical amulets, chiefly Graeco-Egyp-tian, Ann Arbor 1 9 5 0 , p. 2 9 ; S . L I E B E R M A N N , Greek in Jewish Palestine, New York

1 9 4 2 , p. 1 2 0 , n. 3 8 ; M. PHILONENKO, CRAI 1 9 7 9 , p. 2 7 9 - 3 0 4 , avec une discussion dé-taillée et une riche bibliographie. Π Ι Π Ι seul ou comme élément de noms magiques composés apparaît dans PGM III 575; IV 595; PGM IV 1984; PGM XVII a 1-2. Voir aussi PGM III 335: Π Ι Ω Π Ι ΰ .

2 1 Cette inscription a été publiée par J. PARGOIRE, 'Epitaphe d'une montaniste à Do-rylée', Echos d'Orient 5, 1901-1902, p. 148-149. Dans son commentaire, J. Pargoire proposait de voir dans les lettres Π t Π des abréviations de quelque terme théologique, important pour la doctrine montaniste, par exemple du mot πνευματικό?) répété, ou bien de Π(αράκλητον) Π(ν£ΰμα). Plus tard, le même auteur, dans l'article "Encore l'épitaphe montaniste de Dorylée", Echos d'Orient 7, 1904, p. 53-54, changea d'avis et proposa d'y voir le tétragramme. Un fac-similé de l'inscription est reproduit dans le DACL VII, 1, col. 659, s.v. "Inscriptions grecques chrétiennes" (L. J A L A B E R T , R.S. M O U T E R D E ) .

2 2 Voir D U C A N G E , Glossarium mediae et infimae Graecitatis, s.v., où sont cités des passages d'auteurs tardifs qui permettent de préciser le sens du terme.

2 3 Cf. H. GRÉGOIRE, Recueil des inscriptions grecques chrétiennes d'Asie Mineure, Paris 1922, no. 119 [Priene, Ve-VIe s.]: 'Ιουλιανό? «ίπαρχικό?; D. F E I S S E L , Recueil des inscriptions chrétiennes de Macédoine, Paris 1983, p. 130-131, no. 134

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[Thessalo-80 A. ŁAJTAR - Ε. WIPSZYCKA

soit un f o n c t i o n n a i r e de la c h a n c e l l e r i e du préfet de la p r o v i n c e , soit une p e r s o n n e de l ' e n t o u r a g e du c o m m a n d a n t militaire. L a s e c o n d e explication est peu probable, car il n ' e x i s t e pas de textes employant le terme ε π α ρ χ ι κ ό ? pour d é s i g n e r un collaborateur de l'e7ταρχος militaire.

La f o r m u l e dédicatoire (ύχαριστίΐν + datif apparaît r e l a t i v e m e n t tard d a n s les inscriptions grecques. Les attestations les plus a n c i e n n e s semblent dater du IIe siècle ap. J.-C., mais ce n ' e s t q u ' a u IIIe siècle q u e les attesta-t i o n s d e v i e n n e n attesta-t a b o n d a n attesta-t e s2 4. Cette f o r m u l e est e m p l o y é e aussi bien à l'indicatif Ε υ χ α ρ ι σ τ ώ , ε υ χ α ρ ι σ τ ο ύ μ ε ) q u ' a u participe du présent ou de l'aoriste (εύχαριστώι>, ε υ χ α ρ ί σ τ η σ α ? )2 5. L. Robert ne cite q u e des inscrip-tions p a ï e n n e s , mais la f o r m u l e apparaît é g a l e m e n t d a n s des inscripinscrip-tions j u i v e s2 6 et c h r é t i e n n e s2 7.

Le t e r m e τόπος apparaît f r é q u e m m e n t d a n s les textes é p i g r a p h i q u e s et p a p y r o l o g i q u e s d ' E g y p t e , aussi bien p a ï e n s q u e juifs et c h r é t i e n s , et il d é s i g n e des réalités fort d i f f é r e n t e s2 8. D a n s notre inscription, il d é s i g n e m a n i f e s t e m e n t la καθολική εκκλησία qui a été r e s t a u r é e par D i d y m o s . L ' e x p r e s s i o n ä y i o s τ ό π ο ? , rare d a n s les d o c u m e n t s païens d ' E g y p t e2 9, est très a b o n d a m m e n t attestée d a n s les d o c u m e n t s c h r é t i e n s du m ê m e pays,

nique, 525]: Μαρτίνω τω θανμ(ασίωτάτω) €7Γα[ρχικώ] ("fonctionnaire d'une des pré-fectures, probablement celle de rillyricum" — D. Feissel); LBW 2760 [Salamine de Chypre, sur la base d'une colonne]: ACOVTLOV ε7Γαρχικο[ΰ]· Έρμόλαο? Ψυχάρου?

ίποίονν, IGLS V 2358 et 2359 [Horns dans la Syrie Centrale]: épitaphes d'un fils et d'une fille d'une personne présentée comme μέγας ίπαρχικος Καισάριο?; une inscrip-tion inédite de Laodicée sur le Lykos, qui est connue par un estampage conservé auprès de la Kleinasiatische Kommission de Vienne et qui sera publiée par Th. C O R S T E N dans le corpus des inscriptions de Laodicée sur le Lykos.

2 4 Sur cette formule, voir L . R O B E R T , Hellenica, X, Paris 1955, p. 55-58, avec une très riche liste d'exemples; d'autres exemples dans L. R O B E R T , Anatolia 3, 1958, p. 120 (= L. R O B E R T , Opera minora selecta, I, p. 419).

25 Cf. L. R O B E R T , Hellenica X, p. 56 n. 2.

2 6 Cf. par exemple C1J II 964 [Ascalon]; CIJ II 1435 (CPJ III, p. 140, 1435a) [in-scription de provenance inconnue, achetée à Alexandrie]: εύχαριστοΟιτε]? τω Θ(ί)ω κ(αϊ) τω άγ\ίω τόπω .

27 IG XIV 2345; LBW 2637 с; LBW 2510; LBW 2562.

2 8 Voir Ε . B E R N A N D , ' Τ Ο Π Ο Σ dans les inscriptions grecques d'Egypte', ZPE 9 8 , 1 9 9 3 , p . 1 0 3 - 1 1 0 .

2 9 Elle apparaît dans un προσκύνημα gravé sur un rocher à Thèbes Occidentale (A. B A T A I L L E , BIFAO 3 8 , 1 9 3 9 , p. 1 4 5 , no. 6 ) et dans O. Theb. 6 1 6 .

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D E U X Κ Α Θ Ο Λ Ι Κ Α Ι Ε Κ Κ Λ Η Σ Ι Α Ι D A N S L E M Ö N S TORPHYRITES 8 1

surtout s'il s ' a g i t de p a p y r u s3 0. Il est p r o b a b l e q u e la f r é q u e n c e de l ' e m -ploi de a y i o ç τόπος d a n s les d o c u m e n t s chrétiens est due au fait q u e cette expression apparaît à plusieurs reprises dans la Bible (aussi bien d a n s l ' A n -cien q u e d a n s le N o u v e a u T e s t a m e n t ) , où elle d é s i g n e le plus s o u v e n t le temple de J é r u s a l e m3 1. La m ê m e expression est e m p l o y é e é g a l e m e n t d a n s des inscriptions juives d ' E g y p t e , où elle sert à désigner une s y n a g o g u e3 2.

Le c o m p l é m e n t d ' o b j e t direct du verbe α ν α ν έ ω σ α n ' e s t pas e x p r i m é ; il doit ressortir du contexte. Selon Meredith, D u m m e r et A. B e r n a n d , il faut c o m p r e n d r e q u e D i d y m o s a restauré le ä y i o s τ ό π ο ς dont il est q u e s t i o n dans la p h r a s e participiale ( ε ύ χ α ρ ι σ τ ω ν τ ω άγίω τόπω)33. C ' e s t é v i d e m -ment la seule interprétation raisonnable. A . H . M . Jones et S c a i f e ont p e n s é que D i d y m o s avait réparé les routes servant à faire d e s c e n d r e les c o l o n n e s des c a r r i è r e s3 4; mais le contexte nous paraît décidément exclure cette inter-prétation.

L ' e x p r e s s i o n eis την χάλασιν équivaut, nous sembletil, à èv ττ) χ α λ ά -c m . Il est bien -connu que dans le gre-c de l ' é p o q u e impériale eis + a-c-cusatif tendait à remplacer èv + d a t i f3 5.

La datation de l'inscription pose aussi des problèmes, car les p e r s o n n e s m e n t i o n n é e s ne sont pas c o n n u e s par ailleurs. L ' h i s t o i r e des carrières du Möns Porphyrites ne nous aide pas beaucoup. Certainement on y a travaillé aux temps de Dioclétien et de Constantin le Grand, quand le p o r p h y r e était très à la m o d e ; mais les trouvailles archéologiques faites sur p l a c e3 6

prou-3 0 Voir la liste des attestations dans le WB, s.v.

31 Cf. par exemple Is. 60, 13; 2 Mac. 1, 29; 2, 18; 8, 17; Mt. 24, 15; Act. 6, 13;

2 1 , 2 8 b.

32 CIJ II 1435; 1436; 1437 (CPJUl p. 140, nos. 1435a, 1436, 1437).

3 3 D . M E R E D I T H , Chr. d'Eg. 2 8 , 1 9 5 3 , p . 1 3 1 - 1 3 3 . J . D U M M E R , op. cit., p . 2 9 4 . A . B E R N A N D , op. cit., p . 7 2 .

3 4 SCAIFE, op. cit., p. 5 8 - 6 1 , où sont rapportées des remarques de A . H . M . Jones. 3 5 E t î + accusatif au lieu de kv + datif apparaît déjà dans le Nouveau Testament (très souvent dans l'évangile de Luc); cf. F. BLASS, A. DEBRUNNER, A Greek Grammar of the New Testament, Chicago 1961, § 205-206. La remplacement de kv + datif par eis + ac-cusatif n'est qu'un aspect du processus de la disparition graduelle du datif dans la langue grecque des époques romaine et byzantine. Sur ce phénomène, voir J . HUMBERT, La dis-parition du datif en grec, Paris 1930.

3 6 M . J . K L E I N , Untersuchungen zu den kaiserlichen Steinbrüchen an Möns

Porphy-rites und Möns Claudianus in der Östlichen Wüste Ägyptens, Bonn 1988, p. 112-113. Nous n'avons pas vu le livre de R. et D. K L E M M , Steine und Steinbrüche im Alten Ägypten paru en 1993.

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82 A. ŁAJTAR - Ε. WIPSZYCKA

vent q u e l ' e x p l o i t a t i o n a c o n t i n u é (au m o i n s s p o r a d i q u e m e n t ) j u s q u ' à la fin du I Ve siècle. La seule d o n n é e qui s e m b l e f o u r n i r une b a s e p o u r u n e datation plus précise que celle q u ' a adoptée A. Bernand ( I Ve siècle), c ' e s t la mention de la χάλασα des c o l o n n e s destinées à Jérusalem. R. Delbrück a p r o p o s é3 7 d ' y voir une allusion aux travaux entrepris par C o n s t a n t i n le Grand et Hélène aux alentours de 335. Cette hypothèse nous paraît possible, mais i n d é m o n t r a b l e .

I . I . E . H o n d i u s3 8 a accepté cette hypothèse, mais à son avis, seules les lignes 2 - 4 auraient été gravées vers 335: la ligne 1 devrait être datée du t e m p s des persécutions et du début du conflit entre les partisans de Mélitios et c e u x de Pierre, é v ê q u e d ' A l e x a n d r i e , c ' e s t - à - d i r e des a n n é e s 3 0 5 - 3 0 6 . C e p e n d a n t , il est totalement i m p o s s i b l e q u ' a u cours des p e r s é c u t i o n s , les autorités, qui surveillaient strictement les chrétiens c o n d a m n é s aux travaux f o r c é s d a n s les carrières, aient permis à ceux-ci non seulement de construire un bâtiment pour leur culte, mais aussi d ' y mettre une inscription indiquant la destination du bâtiment. L ' i d é e de H o n d i u s n ' a été a c c e p t é e par per-s o n n e .

A . H . M . J o n e s3 9 a cru p o u v o i r dater l ' i n s c r i p t i o n assez tard, un peu avant 361, sur la base du fait que dans ces années, Constance II favorisait les m é l i t i e n s c o n t r e A t h a n a s e : la f a v e u r impériale expliquerait q u e les diri-geants des carrières aient permis, en ce m o m e n t , aux mélitiens de construire un lieu de culte dans le M ö n s Porphyrites. Cependant, si nous s o m m e s sûrs q u ' e n 3 0 5 - 3 0 6 , les dirigeants des carrières ne p o u v a i e n t q u ' ê t r e hostiles aux chrétiens c o n d a m n é s aux travaux forcés, nous ne c r o y o n s p a s que les f l u c t u a t i o n s de la politique ecclésiastique de C o n s t a n c e II aient pu détermi-ner le c o m p o r t e m e n t de gens qui vivaient au milieu du Désert A r a b i q u e . Il est p a r f a i t e m e n t p o s s i b l e q u ' à un m o m e n t q u e l c o n q u e du I Ve siècle, un g r o u p e de mélitiens ait construit une église et y ait mis l ' i n s c r i p t i o n en question, sans trop se soucier de ce que les autorités à Alexandrie, voire à Constantinople, pensaient des schismatiques.

*

* *

3 7 R . DELBRÜCK, Antike Porphyrwerke, Berlin - Leipzig 1 9 3 2 , p. X X I V .

38 SEG V I I I 6 4 7 , P . 1 1 4 .

3 9 Dans des notes communiquées à C.H.O.SCAIFE et publiées dans l'article cité de ce s a v a n t , p. 59-60.

(14)

DEUX ΚΑΘΟΛΙΚΑΙΕΚΚΛΗΣΙΑΙ DANS LE MÖNS PORPHYRITES 83 A qui servaient les d e u x églises auxquelles se réfèrent les d e u x inscrip-tions? Certainement au personnel des carrières, aussi bien civil que militaire. N o u s d o u t o n s q u ' e l l e s aient servi é g a l e m e n t aux rares habitants du Désert Arabique, les Sarrasins, car il n ' e s t pas probable q u ' a u I Ve siècle, le chris-tianisme ait été largement accepté par ces tribus vivant en dehors du m o n d e civilisé. Quant aux moines, on ne peut pas exclure qu'il y en ait eu au M ö n s P o r p h y r i t e s , mais il n ' e x i s t e aucun indice ni aucun t é m o i g n a g e de leur présence.

Les d e u x inscriptions ont b e a u c o u p en c o m m u n entre elles. Elles ont été trouvées d a n s la m ê m e zone, elles se rapportent à la construction ou à la restauration de lieux de culte du m ê m e type, elles c o n t i e n n e n t e n f i n la m ê m e expression κ α θ ο λ ι κ ή εκκλησία. L e s d e u x g r o u p e s de c h r é t i e n s qui fréquentaient ces lieux de culte se trouvaient au m ê m e niveau hiérarchique dans l ' o r g a n i s a t i o n ecclésiastique. Les d e u x églises (au sens matériel du mot: les d e u x bâtiments), avec leurs inscriptions, ont coexisté, au m o i n s à partir d ' u n certain m o m e n t , à peu de distance l ' u n e de l'autre.

Quel sens faut-il attribuer à l ' é p i t h è t e καθολική dans ces d e u x inscriptions? Vu le caractère de l'habitat du M ö n s Porphyrites, on ne peut é v i d e m -ment pas penser q u e καθολική εκκλησία désigne ici u n e église principale ou paroissiale. L.A. T r e g e n z a4 0, suivi par A. Bernand, a cru pouvoir suppo-ser q u e l ' e x p r e s s i o n désigne u n e église publique, ouverte à tout le m o n d e , et non s e u l e m e n t aux m e m b r e s d ' u n e c o m m u n a u t é ou à des moines. Cette interprétation est c e r t a i n e m e n t fausse, a n a c h r o n i q u e . Au I Ve siècle, toutes les églises étaient ouvertes à tout le monde. Celles des laures semi-anachoré-tiques ne f o n t pas e x c e p t i o n . N o u s ne c o n n a i s s s o n s pas non plus, p o u r l'antiquité tardive, de cas où une chapelle appartenant à une c o n f r é r i e serait destinée e x c l u s i v e m e n t aux m e m b r e s de celle-ci. C e s h y p o t h è s e s une f o i s écartées, il ne nous reste q u ' à entendre καθολική, dans les deux inscriptions en question, au sens de "Eglise universelle". Vivant dans le désert, les au-teurs des t e x t e s de ces deux inscriptions ont voulu m a n i f e s t e r q u e leur c o m m u n a u t é était une parcelle de l ' E g l i s e e m b r a s s a n t tous les f i d è l e s du Christ: c ' e s t pourquoi ils ont appliqué un t e r m e prestigieux à ce qui n ' é t a i t q u ' u n e m o d e s t e chapelle, dont les d i m e n s i o n s correspondaient aux besoins religieux du petit groupe présent sur place.

On pourrait penser q u e cette interprétation est contredite par ce q u ' E p i -phane de S a l a m i n e nous rapporte au sujet des mélitiens:

4 0 L.A.TREGENZA, 'Notes on the Roman roads and stations in the Eastern Desert', Bulletin of the Faculty of Arts 11 (2), 1949, p.146-150.

(15)

84 A . Ł A J T A R - Ε. W I P S Z Y C K A

"Mélitios et beaucoup d'autres allèrent en exil, ayant été condamnés à

l'exil dans les mines de Phainô [...] Et Mélitios en prison, pendant le

voy-age, dans chaque région et dans chaque localité, en passant, ordonnait des

clercs — des évêques et des presbytres et des diacres — et construisait des

églises séparées. Ceux-ci ne communiaient pas avec ceux-là, ni ceux-là avec

ceux-ci. Et chacun inscrivait sur sa propre église — ceux qui avaient reçu

l'ordination de Pierre et qui avaient les vieilles églises, inscrivaient 'église

universelle', ceux qui avaient reçu l'ordination de Mélitios, inscrivaient

'église des martyrs'"

4 1

.

Ce témoignage concernant les mélitiens a joui pendant longtemps d'une

bonne opinion. Puisqu'Epiphane a séjourné en Egypte, on imaginait qu'il

avait eu l'occasion de recueillir sur place des renseignements dignes de foi

sur les schismatiques. Cependant, Annik Martin a critiqué habilement cette

opinion, en mettant en relief les erreurs commises par Epiphane

4 2

.

En tout cas, même si l'on accepte le témoignage cité ci-dessus, on n'est

pas obligé de penser, sur la base de celui-ci, que les mélitiens n'employaient

jamais, pour parler de leur communauté, l'épithète κ α θ ο λ ι κ ή . Le récit

d'Epiphane se rapporte aux temps des persécutions et au début du conflit.

C'est dans l'atmosphère de cette époque que les mélitiens, voulant insister

sur les souffrances subies et le sang versé par leurs martyrs, ont été amenés à

adopter le terme "Eglise des martyrs". Cela ne veut pas dire qu'ils aient

renoncé à considérer leurs églises comme des parties de l'Eglise universelle.

La notion de catholicité était si profondément liée aux principes de la foi

chrétienne qu'il n'est pas croyable qu'il ait pu exister un groupe rejetant le

terme καθολική εκκλησία.

Ce raisonnement se trouve confirmé par un document ayant trait aux

mélitiens et publié par Brian C. McGing

4 3

. Ce papyrus a été trouvé dans

une jarre enfouie dans les ruines d'un centre monastique de Labia. Deux

autres papyrus qui, avec celui-ci, faisaient partie d'un même ensemble, sont

connus depuis longtemps (SB I 5174 et 5175, respectivement de 512 et de

513). Le texte en question est de 511; c'est un acte par lequel un moine

mélitien, vivant à Labia, donne ses dispositions au sujet d'un μοναστήρων.

4 1 Pan. 6 8 , 1 , 4 ( G C S Epiph. III, 141).

4 2 N o u s regrettons de ne pas pouvoir nous référer à un endroit précis de son livre sur

l ' E g l i s e en E g y p t e au I Ve siècle, qui reste encore inédit. Pour le m o m e n t n o u s r e n v o y

o n s à son article: ' L a réconciliation des lapsi en Egypte. D e D e n y s à Pierre d ' A l e x a n -drie. U n e querelle de clercs', Rivistci di Storia e Letteratura religiosa 22, 1986, p. 261.

(16)

D E U X Κ Α Θ Ο Λ Ι Κ Α Ι Ε Κ Κ Λ Η Χ Ι Α Ι D A N S L E M Ö N S P O R P H Y R I T E S 85

Les témoins de cet acte sont Ара Hol et Tourbos, -πρεσβύτεροι, àyt'a?

καθο-λικής εκκλησίας Μελειτειανών εν ωρω Ααύλα. Les mélitiens, au début du

VI

e

siècle, n'éprouvent donc pas de répugnance à appeler καθολική

εκκλη-σία leur propre église. Ils n'ont d'ailleurs pas une attitude hostile envers les

non-mélitiens: en effet, les trois autres témoins de cet acte sont Anoup,

Pa-moutios et Samba, πρεσβύτεροι ώρθώδοζυ εν ωρω Ααύλα. Des

représen-tants de deux courants qui jadis étaient opposés l'un à l'autre de façon

irré-conciliable, collaborent entre eux sans difficulté. La curieuse expression

"église catholique des mélitiens dans le monastère de Labia" est, elle aussi,

digne d'être notée: elle confirme le soupçon que les mélitiens, après le IV

e

siècle, n'aient plus existé que dans des milieux monastiques.

Revenons-en aux deux églises καθολικαί du Möns Porphyrites. Si nous

avons raison de supposer que les deux églises ont été en fonction à une

même époque, il est facile d'imaginer pourquoi les mélitiens ont tenu à

ap-peler leur lieu de culte καθολική εκκλησία : face aux athanasiens, il

procla-maient hautement que c'était eux, et seulement eux, qui appartenaient à

l'Eglise universelle.

[ W a r s z a w a - K ö l n * ] Adam ŁAJTAR

[Warszawa] Ewa WlPSZYCKA

* Bourse d ' é t u d e s de l ' A k a d e m i e der Wissenschaften und der Literatur zu Mainz, Stipendienprogramm für jüngere polnische Geistes- und Gesellschaftswissenschaftler.

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