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La littérature, la littérarité et le littéraire / I (Entre "Qu’est-ce que la littérature?" essentialiste et "quand est-ce de la littérature?" conditionaliste)

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Wacław Rapak

Université Jagellonne de Cracovie

LA LITTÉRATURE, LA LITTÉRARITÉ ET LE LITTÉRAIRE /1 (ENTRE ,,QU’EST-CE QUE LA LITTÉRATURE?”

ESSENTIALISTE ET „QUAND EST-CE DE LA LITTÉRATURE?”

CONDITIONAL! STE')

„Ecrire, c’est disposer le langage sous la fascination et, par lui, en lui, demeurer en contact avec le milieu absolu, là où la chose redevient image, où l’image, d’allusion à une figure, devient allusion à ce qui est sans figure et, de forme dessinée sur l’absence, devient l’informe présence de cette absence, l’ouverture opaque et vide sur ce qui est quand il n’y a plus de monde, quand il n’y a pas encore de monde”

M. Blanchot, „La solitude essentielle”, dans L 'espace littéraire.

QUELQUES REMARQUES PRÉALABLES

Parmi les précisions terminologiques dont l’objectif est de bien situer notre ré­ flexion sur la spécificité de la littérature, certaines resterontpournous debase de ma­ nière suivie, c’est pourquoi il nous semble utilede lesmettred’embléeen évidence. La toute première, dont l’importance devrait s’accentuer au fur et à mesure de cette pré­

sentation, estqu’un couple de termes nous servirade repèresstables même si, dans la suite, lestermesqui leconstituent serontsûrement sujets àdivers développements sans, néanmoins,se présenter ouvertementcomme la clef de voûtedenotre discussion.Cette

Cette distinction est empruntée à G. Genette, Fiction et diction, Editions du Seuil, coll. Poéti­

que, 1991. Une présentation détaillée de sa théorie sémiotique du style sera faite dans notre „La litté­

rature, la littérarité et le littéraire / II”, suite du présent article.

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attitude peudogmatique, pourrait-on dire, qui va concerner les autrestermes etnotions, s’explique parle caractère récapitulatif beaucoup plus qu’ouvertement théorique dece qui vasuivre.

Littérature et littérarité, le couple terminologique en question, dont l’ascendance formaliste reste manifeste, nous introduit au plus vifde la question littéraire qui, telle unetoile de fond, nepourraitpas ne pas avoir d’implications sur la suite de notre pré­

sentation. Cecoupleouvre non seulement surla spécificité de la littérature, notre sujet de réflexion primitif, mais aussi sur les paradoxes de la littérature moderne et, par conséquent, sur tout ce que ses réalisations artistiques (concrètes) présentent de limi­ trophe et de vague. Il està remarquer immédiatementque le sens de ces dernières épi­ thètes (nominalisées) ne s’épuise pas dans le premierdegré de la métaphore3 et que, par conséquent, le terme de littéraire se cherche un domaine particulier dans l’indécisionterminologique et le flottementdéfinitionnel. Il est à noter au préalableque prises pour repères, la littérature etla littérarité ont ainsi pourobjectif de délimiter no­ tre domainede recherche comme le font desjalons posés pour situer, pour contextuali­ ser et indiquer la directionà prendre. Faite sur le moule de son objet de réflexion - la littérature, la littérarité et le littérairecomme leur avatar (post)modeme -,notretenta­

tive de délimitation suit fondamentalement la logique que Jonathan Culler résume d’une façon fort emblématique pour l’heure actuelle comme un phénomène d’assouplissement dans lesconceptualisationsde la notion delittérarité. Si, derrière le phénomène en question, hésitations terminologiques il y a, c’est que l’essordes litté­

ratures prend toujours divers sens. Après avoirdiscuté la relativité des qualités distinc­ tives de lalittérature, Cullerpropose uneconclusion qui pourlui, danssa présentation de „la littérarité”, reste plutôtponctuelle,maispour nous garde le sens d’une directive.

Cullernote :

Et cette nominalisation n’est pas du tout innocente parce qu’elle traduit une incompatibilité de la terminologie avec le processus littéraire qui exige que la théorie et la critique littéraires proposent de nouveaux concepts pour préciser la nature et le caractère des modifications que la littérature ap­

porte sans cesse. Ce que le passage des belles lettres à la littérature, de la littérature à la littérarité et de celle-ci au littéraire manifeste.

Allusion au vague (vagness) et à l’à-propos de (aboutness) ; traits artistiques modernes ; voir Arthur Danto, La transfiguration du banal. Une philosophie de l’art, traduit de l’anglais par Claude Hary-Schaeffer, préface de Jean-Marie Schaeffer, Editions du Seuil, coll. Poétique, 1989.

J. Culler, „La littérarité”, dans Théorie littéraire (sous la dir. de M. Angenot, J. Bessière, D. Fukkema, E. Kushner), PUF, coll. Fondamental, 1989, p. 32.

Bref, les définitions de la littérarité sont importantes non comme critère pour identifier ce qui relève de la littérature mais comme instruments d’orientation théorique et méthodologique, qui mettent en lumière les aspects fondamentaux de la littérature, et qui finalement orientent les étu­

des littéraires4.

Il devraitdonc aller sansdire que la littéraritéen tant queterme et notion ne prend en aucune mesure une valeur absolue et que, nombre d’ouvrages françaisrécents en ap­ portent lapreuve, elle trouve son équivalent dans (le) littéraire. Nous référant au Dic­

tionnaire des littératures de langue française, à l’article „Littérature”, il nous est pos­

sible de redire au sujet du littéraire qu’en accord avec l’espritde lalangue française et, pour nous, particulièrement en accord avec le caractère de l’objet de notre intérêt,

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La littérature, la littérarité et le littéraire /1 (Entre „Qu’est-ce que la littérature?”... 121

„l’adjectif («qualité ou caractère littéraire») ou sa substantivation («le littéraire») est plus souple, et plus prudent” . Et, par conséquent,ce qui importe aussi pour la suite de notre propos, ce déplacement terminologique marque sémantiquement un refus d’essentialismedont paraît passible-tout au moins pour unepartie de la critique - la notion delittéraritédans son sens formaliste primitif.

On sait que les réflexions des formalistes russes sur l’essence de la littérature, sa differentia specifica, qui aboutissent à la notion de littérarité, suivent deux objectifs majeurs. Peter Steiner, dans „Les étapes du structuralisme”, explicite la double ré­

orientation qu’avait opérée le formalisme au sein des études littéraires au moment de faire ses propositions théoriques fondamentales ainsi :

1. son champ d’action ne s’identifie en aucune manière aux domaines culturels coexistant avec les processus litéraires, mais uniquement à ceux-ci, pour mieux dire : à tous les traits par lesquels la littérature se distingue des autres activités humaines;

2. elle doit rejeter les préceptes métaphysiques qui sous-tendent traditionnellement la théorie littéraire, qu’ils soient philosophiques, esthétiques ou psychologiques, pour s’adresser aux «faits littéraires» sans détours, sans présupposé .

La conséquence directe qui s’en impose est que les analyses des «faits littéraires»

devraient faireabstraction d’éventuels traits évolutifs de ceux-ci pour en dégager des éléments intrinsèques qui leur sont communs, interchangeables parce qu’inchangeables. Dans les approches théoriques et critiques formalistes du texte lit­ téraire,mais aussi dans toutescelles qui suivent l’inspiration formaliste, l’oeuvre con­ stitue un tout fermé sur lui-même et réductible, dans satotalité, auxprocédés formels qui le constituent.Onse souvient de l’importance capitale qu’a eue pour laconstitution du groupe la publication de l’articlede Victor Chklovski „L’Art comme procédé” dont le titre garde une valeur emblématique pour toute la mouvance formaliste jusqu’aujourd’hui. Setrouvantau centre des activités artistique, d’un côté, critique, de l’autre, le conceptdeprocédé, révolutionnaire à l’époque, contestédans la suite, a sans doute fait repenser l’art en termes de praxis, où le sens étymologique(d’action)réap­

paraîtrait, ou d’une tekhnê aux connotations „artisanales” qui feraient penser un peu plus à la poétiqueplatonicienne qu’à la Poétique d’Aristote. Vue de cette manière, la littérature, que le concept de procédéoppose, en quelque sorte, à la réalité et, en même temps, l’en dégage, manifeste son statut d’activité technique qui transforme le (soi- disant) naturel delaréalité enl’artificiel desoeuvres d’art littéraire. En tant que praxis, elle devient «.artis factum'»- «fait littéraire» auquel la linguistique impose le statut de discours optimal oùle travaildel’auteur, difficilement définissable , consiste à faire un

J.-P. de Beaumarchais, D. Couty, A. Rey, Dictionnaire des littératures de langue française.

Bordas, Paris, 1984, p. 1313.

P. Steiner, „Les étapes du structuralisme”, dans J. Bessière, et alii, Histoire des poétiques, PUF, coll. Fondamental, 1997, p. 435.

7Les concepts tels que «disparition élocutoire du poète» mallarméen ou «la mort de l’auteur» de Blanchot et de Barthes suffisent pour que la complexité de l’acte créateur littéraire s’impose.

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usage optimal du langage afin que celui-ci - intentions auctorielles et résultats artis­ tiquesen une relation la plus réussie possible - fasse du senset manifeste son sens .

La catégorie de la littérarité, dont la définition classique de Roman Jakobson, par ailleurs largement tautologique , reste centréesur „ce qui fait d’une oeuvre donnée une oeuvre littéraire” , explicite - telle demeure son utilité - outre la spécificité desoeu­

vres littéraires qu’elle désigne, leurautonomie par rapport à laréalité et auxautres ty­ pes de communication linguistique. Elle met en évidenceque les oeuvres littéraires ne se laissentjamais réduire totalement aux objectifs cognitifs, expressifs, argumentatifs ou autres. Les théoriciens de la littérature élargissent cette autonomie jusqu’au phéno­ mène de l’autotélicité explicitéeen substance comme unetendance de la littérature à trouversa finalité en elle même. Avec les moyens verbaux qui leur sont propres, les oeuvres littéraires non seulement constituent mais construisent leur propre référent (contexte)interne. L’importancedes moyens verbaux - laquelle, on le sait, n’ajamais été remiseen question- se voitêtre, avec le formalisme, valorisée au point de vouloir faire de l’oeuvre littéraire («artisfactum'»- «fait littéraire»)principalement une forme.

Évidemment, il ne s’agit que de la tendance générale qui a pour nous, tout d’abord, avant d’être examinée in situ, la valeur d’instrument d’orientation. C’est dans ce contexte théorique qu’intervient une intention pleinement artistique - à attribuer à l’auteur(même s’ilest anonymeet/ou collectif) - laquelle, sous son nom russe «приём остранениея», a-pour la première fois dans la réflexion sur l’art littéraire - traduit l’idéedu procédé de désautomatisation (ou de défamiliarisation, ou desingularisation).

Lerôle du procédé en question est derendre au lecteur étrangerce quilui est connu de par son expérience et de par la conscience qu’il a de la réalité. 11 nous semble que l’emblème de „l’artcomme procédé”trouve en la désautomatisation-défamiliarisation- singularisation sa réalisation fondamentale et que les conséquences de cette nouvelle prise de conscience théorique ont dû -noussemble-t-il - influer sur la pratique litté­

raire dans satotalité.

C’estprécisémenten elle que PeterSteiner discerne nettementunedivergence de vues au sein du groupeformaliste qui a conduitles uns à valoriser leversant linguisti­

que de cette singularisation qu’est la désautomatisation, les autres à insister sur la re­

constitution de l’ordre de la «fable» (histoire/fiction dans son intégralité événemen­

tielle, causale et chronologique du début à lafin) en l’ordre du «sujet» (disposition de ce matériau dans le texte concret selon la linéarité de sa construction narrative). Sans entrer dans les détails de l’évolution de la pensée formaliste, limitons-nous à rappeler

L’expression fait (le/du) sens, elle devient (le/du) sens ou, autrement, la forme participe aussi bien de la signifiance que de la signification.

Ce qu’il ne faut pas prendre pour une critique ; nous suivons tout à fait sérieusement le sens de la formule de Henri Meschonnic, prononcée il y a des années pendant un cours à la Romane de l’Université Jagellone de Cracovie, disant que „rien de plus rassurant qu’une tautologie”. Derrière, timidement, se dégage l’un des éléments de cette instabilité du concept de littérature à l’heure ac­

tuelle.

R. Jakobson, Questions de poétique, Seuil, 1973. Le concept date, on le sait, des années 20 du XX' siècle. Jakobson, dans T. Todorov, 1965, p. 37.

P. Steiner, „Les étapes du structuralisme”, dans J. Bessière et alii, Histoire des poétiques, op. cit.

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La littérature, la littérarité et le littéraire /1 (Entre „Qu’est-ce que la littérature?”... 123

que,dans la présentation deSteiner, par exemple, le passage se faitd’un modèle méca­ niste(àdominante „procédurale”; pour dire ainsi)par un modèle organiciste (à domi­ nante fonctionnelle) jusqu’à un modèle systémique. Le fond enest que l’intentionnalité appliquéeau procédé - cequi ouvrira,chez Jakobson, onle sait,sur leprincipe organi­ sateur de lapoésie - a été complétée par la fonctionnalité dont laMorphologie du conte de Vladimir Propp nous fournit un exemple désormais canonique. 11 n’est pas sans im­ portanceque cette conception de la littérarité qu’est la domination de la fonction poéti­ que (esthétique) - derrière laquelle l’autotélicité est présente - déplace l’intérêtporté à la fonction vers la substance langagière. Et, pour l’expliciter, ilnous est possible de re­ courir encore une fois à l’article „Littérature” du Dictionnaire des littératures de lan­

gue française qui le présente en ces termes :

C’esl dire que la «littérarité» ne saurait être envisagée comme une essence présente ou ab­

sente, mais plutôt comme une charge plus ou moins grande qui, de l'intérieur, hisse le texte du statut de discours à celui de modèle de discursivité, du statut de message (phénomène unique et transitoire, impermanence absolue) à celui de «code», à condition de voir en ce concept un pou­

voir instable, une créativité virtuelle momentanément figée en une séquence de mots et sans cesse réactivée en un flux mouvant par la lecture .

La substance et le «code» entretiennent des relationsspécifiques dont l’objectif princi­ palestla créativité engendrant une infinie richesse decodes.

Derrière tout ce qui précède, ilest d’ailleurssous-entendu que lesbelles lettres - où l’ancienneté que véhicule l’épithète „belles”, devenant critèreartistique etesthétique à partir de la fin du XVIIe siècle, anticipe, c’est-à-dire, entame etempiète, sur une auto­ nomisation du phénomène littéraire sur le terrain commun et large de la littérature - comportent divers aspects intrinsèques pour lesquels les causes extrinsèques ont leur poidstantdans l’évolution du phénomène lui-mêmeque dans lesthéorisations de celui- ci1213. De toute évidence, dans ces dernières la spécificité littéraire qui n’arrêtepas de se chercher passe par divers concepts dont le premier, la célèbre fonction poétique, ne semble, aujourd’hui, plus poserdeproblèmes. D’apparence restrictive, ceconcept clas­ sique qui dit ,,1’accent missur le message pour son propre compte”trouve des emplois deplus en plus larges par rapport aux idées primitives de son auteur. Ce qui semblait réservé audiscours(signe) poétique - lafonctionest nommée poétique - est de plus en plus souvent appliqué et, disons-le tout de suite, parfaitement applicable au discours (signe) littéraire. Cela pour des raisons dont des explicationsque fournissent l’histoire et lacritique littérairedu XXe sièclepassent parles phénomènes tels que lapoétisation du roman, les formes littéraires (romanesques; Bakhtine) hybrides, la baroquisationde la prose, la littératurede l’épuisement,etbien d’autres.

12 Article „Littérature”, dans J.-P. de Beaumarchais, D. Couty, A. Rey, Dictionnaire des littératu­

res de langue française, op. cit., p. 1312-1313.

Pour l’évolution et les théorisations comptent les rapports historiques entre «ancien»

d’Antiquité et «ancien» d’hier, ancien d’hier et nouveau, ancien d’hier et moderne, et leur consé­

quence : l’accélération de l’histoire, entre perfection et perfectibilité, et leur effet de progrès, dans les développements de la modernité qu’esquisse H. R. Jauss dans „La «modernité» dans la tradition litté­

raire et la conscience d’aujourdui”, dans Pour une esthétique de la réception, traduit de l’allemand par C. Maillard, préface de J. Starobinski, Gallimard, coll. Bibliothèque des Idées, 1978.

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***

„L’écrivain témoigne de la vitalité du signe”

Edmond Jabès, Le Livre du Dialogue

UNE INTERPRÉTATION AUTONYMIQUE DE LA LITTÉRATURE

Ayant la spécificité de la littérature et les paradoxes du littéraire en vue, uneautre approche de la littérarité, non dénuée d’intérêt, nous s’impose. Impliquée par tous les développementsdu premier formalisme et de ses suites, cette approchea unemoindre notoriétémaisune utilité qui noussemblemériter uneprésentation détaillée et suivie.

L’articledeJosette Rey-Debove - dontle titre „Notes sur uneinterprétationautonymi- que de la littérature : le mode du «comme je dis»” ,14 quoique long, est très éloquent - érige une critique partielle et nuancéedes positions jakobsoniennes,principalementde leur orientation substantielle, en un point de départ programmatique:

Que la littérature soit avant tout une forme, ou que l’accent soit mis sur la forme, ou que le signifiant y joue un rôle primordial constituent des manières de parler extérieures au texte (méta- textuelles). Plutôt que d’envisager ce qu’EST la littérature, nous nous attacherons à déceler ce que SIGNIFIE le texte littéraire en général, considéré de ce point de vue, puisque l’être d’un texte est de signifier*15 *.

J. Rey-Debove, „Notes sur une interprétation autonymique de la littérarité : le mode du

«comme je dis»”, Littérature, n° 4, déc. 1971, p. 90-95.

15 Ibid., p. 90.

Elle écrira plut tard, dans Le Métalangage. Etude linguistique du discours sur le langage, Ar­

mand Colin, Paris, coll. U, série «Linguistique», 1997, p. VI, „ (...) rapidement est un adverbe qui signifie «vite»; et dans cette phrase, rapidement se trouve être un nom masculin sujet du verbe être, situation tout à fait étonnante”.

Expression en relation arbitraire avec Contenu ou, en d’autres termes, S"nt(Sé).

La réflexion sur l’être de la littérature que l’auteur se propose aborde initialement la question de l’autonymie, dite et redite fondement du métalangage, qui, sous forme de signe et/ou de mot, se signifie elle-même, signifiant et signifié . Cela revient à dire que, autrement que dans toutes lesformules non-autonymiques oùl’expression reste en relation „ordinaire” avec le contenu - Josette Rey-Debove résume cet ensemble déno- tatif de signification parE(C)17 * * -, le modèle métalinguistiqueautonymique équivaut à la formule E(EC) [=Sant(SanlSe)] où - on le voit - lecontenu C [(Se)] inclut, et, d’une

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La littérature, la littérarité et le littéraire / 1 (Entre „Qu’est-ce que la littérature?”... 125

certaine manière,répète18 le signedans satotalité : (EC) [(SantSe)]19. Avec l’exemplede l’autonymie qui est le sien - „Hugo emploie faucille d’orpour désigner la lune” - J.

Rey-Debove tient à expliciter que faucille d'or de Hugo „signifie non pas «faucille d’or» dénotatif mais «le terme faucille d'or dont le signifiant est (faucilled’or) et le si­

gnifié ‘faucille d’or’». Le signifiant est associé au signifié qui n’est autre que le signe lui-même qui assure la cohésion seulement comme une entité totale. C’est ce que l’auteur nomme la mise entre parenthèses du contenu qui se désigne lui-même comme signe (C=(EC)) [S'^S^'S6)]. Par ailleurs, cet emploi autonyme en mention a deux conséquences importantes dont la première est l’impossibilité de substitution et de sy­ nonymie („un signe autonyme n’a pas de synonyme”) et la seconde est une certaine ressemblance de structure (et une ressemblance sémiotique) des traits de l’autonymie avec l’onomatopéeE(E) pour laquelle le contenu équivaut à l’expression (E=C), tandis que, pour le terme faucille d’or autonyme E(EC) le contenu C équivaut à ‘faucille d’or’2 , ce dernier „nom métalinguistique est [seulement] homonyme del’occurence” , l’homonymie étant faculté de la réflexivité métalinguistique. Il est à remarquer que, contrairementà la ressemblance que garantit l’homonymie, le fait d’être homonymes, comme c’est bien le cas de «faucille d’or» et faucille d'or, il ne peut être question d’identité entre eux car il existe une différencede structure entre le «faucille d’or» dé­ notatif E(C) et le faucille d’or autonyme E(EC), comme il en existe toujours une de base entre lesigneenusageet le signe en mention.

„C’est le nom métalinguistique de l’occurrence. Le nom métalinguistique est homonyme de l’occurrence”, op. cit., p. 90. L’inclusion et la répétition qui l’accompagne font penser à la mise en abyme du mot/ du signe/ du texte, procédé littéraire par excellence.

En d’autres termes, le passage se fait du schéma classique Sa"‘(S') au S,nl(S,,“Se), pour ce der­

nier le Se complexe correspond au signe lui-même (S,nlSe).

J. Rey-Debove, op. cit., p. 91.

21 Ibid., p. 90.

22„L’autonymie est un système sémiotique qui fonctionne pour toutes les séquences du langage qu’il nominalisé, unités de la première et de la seconde articulation (la syllabe ro, la rime amment, le suffixe ard, le mot lune, l’expression faucille d'or, la phrase il va venir, la fable Un loup se désalté­

rait...) et même «figures» bloomfeldiennes (les mots sans savoir que)”, ibid., p. 91.

Il ne l’est pas chez le Jakobson des Essais de Linguistique générale avec qui notre auteur dis­

cute. Pour cette discussion nous renvoyons à l’article évoqué.

Si, àsuivre l’auteur, l’autonymie se constitue en un système sémiotique, elle le fait soit métalinguistiquement par rapport au code, soit intratextuellement par rapport au message22 dont les séquencespeuvent se signifier dans leurs emplois autonymes, donc en mention, comme le faitaussi, par exemple, le discours rapporté en style direct qui est ici, chezJosette Rey-Debove, autonyme23. L’exemple proposé en est „11 m’a dit :

«Je viens»”où - autrementque pour le style indirect - la substitution reste impossible.

Comme il est facile de s’en douter, l’auteur émet tout de suite une importante restric­ tion qui devraitfaire comprendre que, contrairementà ce qu’on pourrait croire, lalitté­ rature - même si elle signifie sonpropresigne - n’est pas une séquence autonyme„car la séquence autonyme nepeutse manifester que dans un contexte métalinguistique qui l’enferme et lui confère ce signifié”. Il s’ensuit que, pour Josette Rey-Debove toujours, la littérature, quoiqu’ellesesignifieelle-même, signifiant et signifié, ne se simplifierait

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pas dans laforme ,7Je (l’auteur)dis : «Cette faucille d’or dans le champ des étoiles»/, non plus que [dans] la forme /lesmotscettefaucille d’ordans le champ desétoiles!"

qui rélèveraient respectivement d’un métalangagecritique et/ou linguistique24.

24 Ibid., p. 91.

25En usage ordinaire (dénotatif) vs en mention (de manière auto-référentielle; emploi autonyme), l’auteur dit ailleurs : „prenez un signe, parlez-en, et vous aurez un autonyme”.

„Le signifiant est associé au signifié qui n’est autre que le signe lui-même”; cf. supra. Cette in­

sertion ou inclusion que nous nommons mise en abyme fonde un écart entre le signifiant, le plus sou­

vent phonique, et le signifié qui signifie étant toujours signe.

Selon l’hypothèse qu’avance notre auteur, la connotation autonymique réalise un modèle sémiotique plus complexe par rapport àl’autonymie. Sacomplexité tient prin­

cipalement au fait qu’elle est l’effet d’une interpénétration de l’emploi „ordinaire”25 - E(C) [=Sant(Sé)J - et de l’autonymie - E(EC) ^“'(S“"^)]. Pour bien expliciter son raisonnement, J. Rey-Debove recourt à la proposition : „Par le temps qu’il fait, nous n’aurons guère cette nuit de «faucille d’ordansle champ des étoiles!»”. Dans son opti­

que, la formule complexe, et originale, E(C(EC) [=Sanl (Se(San,Se)] - notons au passage une mise en abyme que cette formule manifeste - répondrait à un effet d’interpénétration faisant du sens,voulant dire à peu près ceci : „nous (n’aurons guère cette nuit de) faucille d’or dans le champ des étoiles, comme dit Hugo”. Le faucille d’orautonyme dont le contenu C [Se] est un signe [(C=(EC)) ou Se=(Sai‘tSc)] n’épuise pas la totalité de son sens dans l’homonymie du nom métalinguistique mais arrive à connoteret, par conséquent, à intégrer le sensdu «faucille d’or» dénotatif (C).

Sur cettevoie le terme faucille d’or autonyme (EC) (où, répétons-lepour nous ras­

surer, „le signifiantest (faucille d’or) et le signifié ‘faucille d’or’”)nese signifie plus lui-même, commedans le premierexemple proposé („Hugo emploie faucille d'orpour désigner la lune”), mais, avec le second exemple - „Par le temps qu’il fait, nous n’aurons guère cette nuit de «faucille d’or dans le champ des étoiles!»” -se connote autonymiquement. Il est àremarquer qu’à partir du premier exemple proposé, le fau­

cilled’or en emploi autonymeréalise une autonymie réflexive car cetexemplede mé­ talangage autonymique, le faucille d'or comme „nom métalinguistique [qui est] homo­

nymedel’occurence”, permet unrenvoià l’extérieurque, par exemple,„Hugoemploie uneexpression métaphorique pour désigner la lune” n’aurait pas permis à cause de sa non-réflexivité. Tout ceci pour cette raison qu’autrement que letermefaucille d’or ré­ flexif, le terme expression métaphorique non-réflexif ne saurait jamais être sujet à un emploi connotatif.

A la lumière de ce qui précède, la connotation autonymique E(C(EC) [=Sanl (Se(San,Se)] a ceci departiculier qu’elle réintègre le langage-objet (système sémiotique) de l’autonymie - dont la nature est citationnelle -dans le langage-instrument lequel propose „ordinairement” uneréférence à l’extérieur de lui-même. Il s’ensuit donc que se connoterautonymiquement, le propre de la littérature, le facteur déterminant de la littérarité, veut dire se constituer simultanément en usage et en mention. A en tirer quelques conclusions provisoires, il nous faut dire cela : si, pour l’autonymie métalin­ guistiqueE(EC) [SanI(SantSe)], le contenuC [Se] est un signe, en tant que S^'-signe [ou S^Vsigne)]26, l’autonymie a pour le contenu Csonpropre signe.Si, pour laconnotation généralement symbolisée par EC(C) [S^'S^S6)], c’est l’expression E[S3"'] qui corres­

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La littérature, la littérarité et le littéraire /1 (Entre „Qu’est-ce que la littérature?”... 127

pond au signeEC [S^'S6], plus justement EC|(C2), en tant que signe-Se [ousigne(Se)1.

elle apourl’expression le signeEC| lequel connote le contenu C2 [éclair connotantra­ pidité] Si, en fin de compte, pour la connotation autonymique E(C(EC))

[S^ys^S^'S6)], c’est le signeautonyme (EC) qui devientsigne „ordinaire” E(C), et à l’inverse, en tant que E(C(EC)) [ou Sanl(Sé(signe)1, Signe-signe complexe et réflexif donc, elle connote et dénote. De toute évidence, le signifié ainsi conçu fait l’„ordinaire” - E(C) - parce qu’il réfère à l’extérieur de lui-même mais, en même temps, il recourtàune formulation de nature citationnelleautonymique - E(EC) - la­ quelle il assimile. La logique de la connotation autonymique cumule, selon le mot de l’auteur, le langage-instrument de l’emploi „ordinaire” et le langage-objet de l’autonymie :

27 J. Rey-Debove, op. cit., p. 92.

28 Ibid., p. 95.

29Voir „Problèmes de définition”, partie introductive de cet ouvrage, spécialement p. 18-19 ; C.

Kerbrat-Orecchioni, La Connotation, Presses Universitaires de Lyon, 1977, 3' éd. 1984.

J. Rey-Debove, op. cit., p. 92.

E(C) [=San,(Sé)j+E(EC) [=Sanl(SanlSć)] = E(C(EC)[=Sant(Sé(San,Sé)J.

La formule apparemment sophistiquée d’au-dessusquenous reconstruisons à partir des éléments proposés montre bien, nous semble-t-il, cette coexistence où „le langage-objet est réintégré(et non enchâssé) dans le langage-instrument”27, ce qui amènera J. Rey- Debove à laconclusion de la fin deson article que „La littérature participe à la fois du métalangage et de la connotation”28. Il s’ensuit donc que se connoter autonymique- ment, le propre de lalittérature dans cette conception, le facteur déterminant de la litté­ rarité, veutdire se constituer simultanément en usage eten mention.

Cela n’épuise cependant pas le fond des propositions de Josette Rey-Debove. Quel­

ques autres particularités du type de connotation qu’elle théorise s’ajoutent. D’abord, ses remarques visent àsituer la connotation autonymiquepar rapport à la connotation dans son acception générale. Cettedernière est notéed’abord EC(C), puis EC|(C2), ce qui - si notre lecture est bonne - traduirait le sens devenu courant du concept de connotation, tel qu’on peut le trouver dans La Connotation de Catherine Kerbrat- Orecchioni29. Pour ce qui est de la connotation autonymique, elleest notée au départ - on le saitdéjà - E(C(EC) [=Sanl(Se(SantSe)]. Puisque „les E et les C ont constamment la même valeur qui tient à la réflexivité du phénomène autonymique”30, la connotation autonymiquetrouverait finalement laformule adéquateavec ECi(C2) où - c’est bien là que se manifeste la véritabledifférence entre les deux types de connotation - C2=EC.

Qu’est-ce à dire? Contrairement à la connotation autonymique - EC](EC) -, la connotationECi(C2) n’a pas cette propriété d’auto-référence quecomporte et véhicule le contenu connoté C2,équivalant àl’autonymie de la totalité du signe EC et non pas au contenu connoté C2 qui reste seulement identique àlui-même. Pour nous hasarder une fois encoreà une conclusion schématique, nous résumons ce qui précède ainsi:

connotationECi(C2)vsconnotation autonymique ECi(EC) (puisqueC2=EC) La particularitécomplémentaireque même le titre de l’article appelle, est le mode du «comme je dis». D’après l’hypothèse que nous présentons ici le plus fidèlement possible, le mode du «commeje dis» se situe à côté de deux autres dont le premier,

(10)

«comme il dit», trouvenaturellement son exemplification dans : „nous (n’auronsguère cette nuit de) faucille d’or dans le champ des étoiles, comme dit Hugo” dont la méca­

nique, recours et citation dece que ditetcomment dit Hugo, est dite intertextuelle. Le second mode, celui de «comme on dit», faitvisiblement penser à tout type d’emploi connotatif autonymique des unitésdu code linguistique et idéologique; pource dernier les locutions figées, les dictons et les proverbes pourraient servir d’exemples parlants.

Par contre, le mode du «comme je dis» reste de l’ordre du discours rapporté maisde nature autocitationnelle, „en citations de soi même”31, écrit l’auteur.

Ibid., p. 92.

Ibid, p. 93.

Ibid., p. 93.

Les explications fournies jusqu’à ce moment de la présentationde l’hypothèse ont permis àl’auteurde passerdela logique de l’autonymie à celle de la connotationauto­

nymique pour spécifier en fin de compte que la littérature rapporte le connoté auto­

nymique sur le mode du «comme je dis». Si, comme le soutient Josette Rey-Debove,

„La littérature participe à la fois du métalangage et de la connotation” et elle le fait

„constamment sur le modedu«comme je dis»”, ceci, cette hypothèse, a l’avantagede permettre de rendre compte de „plusieurs autres hypothèses éparses bien connues, qu’elle rassemble”32. La première est que La littérature met l'accent sur le signifiant, ce qui - en accord avec l’hypotèse de l’interprétation autonymique de la littérarité et, particulièrement, avecla logique de la connotation autonymique ECi(EC) - reviendrait à dire que,telle une mise en abyme, le signifié réintègre le signifiant et aveclui latota­ lité du signe. Une telle interpénétration autonymique - l’exemple en est ici „bohème”

et „poème” - ouvre sur une signification „ordinaire” de chacun de deux signes se­ condée par la signification de la connotation autonymique que réalise la rime „oème”

que les deux signes ont en écho (phoniquement d’abord et/ou graphiquement) et en commun (sémantiquement mais aussi sémiotiquement). Surcette voie „bohème aide à comprendre poème”33. 11 est clair que l’on retrouve ainsile fond des formulations clas­ siques de Jakobson qui font voir dans la domination de la fonction poétique l’organisation propre au texte littéraire.Sous cetaspect, celui-ci devient un signe moti­ vé, opposé donc à l’arbitraire habituel des relations entre le signifiant et le signifié. Il està noter qu’ainsi la connotation autonymique ECi(EC) souscritau non-arbitraire de la signification littéraire relevant spécifiquementde l’expression. C’est àce proposque Marie-Laure Bardèche, qui étudie l’impact de la répétition sur le statut de l’oeuvre lit­ téraire, icide Francis Ponge,remarque que:

Ainsi, c’est en jouant sur l’emploi autonymique du signe «cruche» que Ponge met en lumière le double défaut du signe : «défaut» au sens mallarméen du terme, qui tient à l’inadéquation du si­

gnifiant au signifié (l’aspect arbitraire de la relation Sa-Sé), et défaut tenant à la fonction in­

strumentale du signe, usé par son emploi «immémorial», qui l’a vidé de sa richesse proprement sémantique pour le réduire à sa seule fonction de désignation. Mais c’est aussi la répétition de ce même mot, dans des emplois différents, qui permet de lui rendre son épaisseur sémantique (...).

Le mot «cruche» est employé tantôt en usage ordinaire, comme signe dénotatif (...), tantôt de ma­

nière auto-référentielle, en mention, c’est-à-dire que l’expression, graphique ou phonique, est as­

sociée à un contenu qui n’est autre que le signe (le mot) lui-même («pas d’autre mot qui sonne

31 32 33

(11)

La littérature, la littérarité et le littéraire / I (Entre „Qu’est-ce que la littérature?”... 129

comme cruche»). Ainsi le verbe «sonner» ne s’applique-t-il pas qu’au signifiant, il s’applique à la totalité du signe, à la cohésion sémiotique entre signifiant et signifié .

La citation que nous venons de proposer, même si elle ouvre sur un cas particulier*35 rend encore plus évidentque les connotations autonymiques, conçues par Josette Rey- Debove, ont un statutet une utilité critique particuliers. Ne sont pas étrangèresà cette utilité critique les conclusions que tire de la connotativité autonymique de Rey-Debove Catherine Kerbrat-Orecchioni pour qui - sans que, chez elle, la littéraritésoit miseen relationavec la connotation autonymique - celle-ci „n’est autre que cette connotation par allusion, qui relève à la fois

” M.-L. Bardèche, Francis Ponge ou la fabrique de la répétition, Lausanne-Paris, Delachaux et Niestlé, coll. Science des discours, 1999, p. 57-58.

35 Où Ponge jongle entre la connotativité autonymique permanente de la totalité du texte et la connotativité autonymique sporadique.

C. Kerbrat-Orecchioni, op. cit., p. 129. Ainsi donc, la connotation autonymique appartient ici aux „valeurs associées” qui sont dites «associations in absentia» et exemplifiées par les connotations par contiguïté référentielles et les connotations par allusion, intertextualité et ironie.

La sémiostylistique de Georges Molinié repose sur des exigences épistémologiques qui sont :

„(...) préserver l’autonomie du monde et du sémiotique (ce que paraît satisfaire la théorie de la diffé­

renciation du monde et du mondain, (...) préserver la spécificité de la sémiose verbale, (...) préserver la portée sémiotique des autres systèmes de mondanisation, sans les secondariser par rapport au ver­

bal, et sans davantage les aligner sur ce dernier (...)”, Sémiostylistique. L’ejfet de l'art, PUF, coll.

Formes sémiotiques, 1998, 19-20.

B. Vouilloux, ..Les styles face à la stylistique”, Critique, n° 641, octobre 2000.

• de la connotationpar association, et

• de la connotation énonciative, dans la mesure où ces citations plus ou moins fidè­ les d’un locuteur réel ou virtuel, que signalent en général les guillemets fonctionnant comme connotateur, instaurent une distance entre le sujet d’énonciation etson énoncé, dont il refuse la totale paternité”36. Le littéraire de la fonctionpoétique jakobsonienne se trouve secondé du métalinguistique autonymique porteur de „richesse proprement sémantique” à se faire manifester si telleest l’intention auctorielle.

Parmi les conséquences du fait que la littérature met l'accent sur le signifiantil y ena une qui aide à bienvoir la spécificité de la littérarité conçue souscet angle. C’est le casde latraduction littérairedontl’objectif général n’est pas de reconstituerla rela­

tion „ordinaire” E(C) [=Sanl(Se)j avec le contenu (C) du texte de départ mais, tout au contraire, la reconstitution de la relation autonymique E(EC) [=Sanl(SanlSe)] avec le (C(EC). Selon le modèle autonymique où „un signe autonyme n’apas de synonyme”, l’impossibilitéde substitutionqui y estincluse prive latraduction qui ne ferait que pa­ raphraser de prétention à la littérarité. Rey-Debove recourt à Michael Riffaterre citéqui fait autorité quand il dit que „la linguistiquepeutanalyser n’importequel typede mes­

sage mais (...) la stylistique ne s’occupe que des structures qui n’admettent aucune substitution”. Sur ce terrain,si rencontre il ya, c’est unerencontreentrestructuralisme, sémiotique, stylistique et, finalement, sémiostylistique37. L’article de Bernard Vou- illoux „Lesstyles face à la stylistique”38 fournitune présentation compétente de cette rencontresurunfond historique bien décrit et nuancé.

(12)

La seconde hypothèse qui dit que la littérature est toujours connotative s’explique en bonne partiepar tout ce qui précède et concerne la logique et le double fonctionne­

mentdela connotation autonymique. Avec les référencescritiques qui sontlessiennes, notre auteur propose d’opérerune distinction entre les „connotations «mondaines»” -

„connotations de la substance du contenu” - et les „connotations langagières” -

„connotations de la forme du contenu, et de l’expression”. D’après Rey-Debove „la connotationautonymiquerend comptedes secondes, les seules qui caractérisent la lit­ térature (commeconstantes) et qui soient propres au système linguistique, opposé aux autres systèmes signifiants où la «self reference» joue le rôle de l’autonymie”39. Pour ce qui est des autres systèmes signifiants, on aurait certainement àdiscuter; le seul cas de René Magritte et du Magritte réfléchi parMichel Foucault dans Ceci n'est pas une pipefait naître nombre de controverses. Néanmoins, même si la«self reference»auto­

nymique compte indiscutablement parmi les enjeux de la littérature, il importe pour nous que, précisément en tant qu’enjeu, cette autoréférence sert de prétexte à divers jeux. Avec la troisièmehypothèsestatuant que la littérature use abondamment de mé­

taphores nous avons affaire à ce que l’auteur nomme „une métaphore continue”, concept emprunté, et qui, dumoment oùl’on laqualifiede constante, prendune valeur de connotation autonymique. De la métaphoreà lamétaphore „continue”, qualifiéede constante, s’étendant donc sur la totalité du texte littéraire, le signe connotatif EC(E) passe ausigne autonymique E(C(EC)où l’emploi de lamétaphore à connotation auto­

nymique se généralise au mode du «comme je dis». L’idée en serait la création de la littérature-métaphore qui tout en connotant dénote - comme dans „nous (n’aurons guère cette nuit de) faucille d’or dans le champ des étoiles” -àcette restriction près qu’au lieu de la citation- comme dit Hugo -on devrait avoirune «métaphore vive»40 dontceluiqui la crée etqui la développe continûment(l’auteur-écrivain-poète) fait em­ ploi41 en (auto)citation de lui-même,c’est-à-dire sur le mode du «comme je dis».

39J. Rey-Debove, op. cil., p. 93.

40En accord avec les idées de Paul Ricoeur de l’ouvrage portant ce titre.

Un emploi créateur, artistique.

J. Rey-Debove, op. cit., p. 93.

Si l’hypothèse suivante se résume ici àceci que la littératureprésenteune relation code/message qui n 'est pas celle dulangage ordinaire, la conséquence en est que la connotation autonymique qui fonde la spécificité de la littératurefait ensorte de ne (se) référer à laréalité qued’une façonindirecte,subjective,d’en créer un simulacre indivi­ duel, lequel devient son référent interne. Celaétant, les signes internes qui renvoient à eux-mêmes- la domination de la fonction poétique dans son avatar jakobsonien qui déterminel’organisation propre du texte (poétique) littéraire agitsans faille- manifes­

tent autonymiquement (et defaçon toujourscontinue) leur statut métalinguistique. Ain­

si donc, de par la double nature des signes littéraires, la relation code/message s’avère équivoque. Autrement que le code du discours E(C) - les signes et „le monde(valeurs de vérité pouruneculture donnée dans une languedonnée)” - et celui du discours mé­ talinguistique E(EC) - les signes et le langage -, le code du discours E(C(EC)) des énoncés littéraires met en relation „le signe et le «monde modelé par le signe», qui permettait de générer unénoncé littéraire sur un modèlede «compétancepoétique»”42.

(13)

La littérature, la littérarité et le littéraire /1 (Entre „Qu’est-ce que la littérature?”... 131

Selon l’hypothèse qui s’y dessine, la relation code/message que présente la littérature s’avère complexe dans la mesurequ’on a à faireau phénomène d’une entité langagière (verbale) ambiguëoù message - code (ou/et, inversement code- message43) cherchent à (se) proposer et, finalement, àformer unecoexistence originale, pourrait-on dire, une harmonie relative, entre le langage et le métalangage, à cette restriction fondamentale près que dans cette conception de la littérarité, la valeur sémiotique de connotation au- tonymique reste cependant subordonnéeà la valeur de dénotation. A ce titre, dans le cas du «monde modelé par le signe», employer un signe et le citer à la fois suppose donc l’existence d’une hiérarchie qu’il nous faut néanmoins imaginer non seulement dynamique mais relative à cause de sa complexité sémiotique. Le discours littéraire E(C(EC)) - qui n’est, rappelons-le, ni le S^'-signe [ou Sanl(signe)1 autonymique, ni le signe-Se [ou signe(Se)1 connotatif, mais le Signe-signe. - chercherait donc à signifier E(C(EC)) tout en connotant en même temps son propre signifiant EiCfEC)). Ainsi ré­ alisée, la présencedu signifiant-signe dans le signifié constitue le fond de lasignifica­ tion littéraire, et, si nousy voyons bien, le principeconstitutif du code de la littérature.

L’emploidu langage connotant le signifiant-signecrée un code àchaque fois, à chaque oeuvre autre. Tel serait le prix de l’originalitéartistiquemoderne.

„[La littérature] est caractérisée tantôt comme un message sans code, tantôt comme un code sans message c’est-à-dire que le message s’identifie au code”, ibid., p. 94.

44 Ibid., p. 94-95.

45 Ibid, p. 94.

46A la lumière de possibles conclusions de cette conception de la littérarité la connotation auto­

nymique, qui limite la littérature à son essence langagière, la dégage du coup de ses apories du type de la concrétisation phénoménologique de chez Ingarden.

47 Ibid., p. 95.

La cinquième hypothèse qui dit, ou plutôt redit -la référence reste explicite - que le discourslittéraireprojette l’axe paradigmatiquesurl’axe syntagmatique part du prin­

cipesémiotique du«mondemodelé par le signe», évoqué précédemment,pour nuancer les propositions classiques deJakobson et les ajuster à la conception de la connotation autonymique. J. Rey-Debove le fait habituellement par le biais de la linguistique du métalangage où „le paradigme métalinguistique, avecsesdéfinitions différentielles du signe, (...) organise letexte, et(...) permet de dégagerdesstructures formelles”44 45. Cela étant, le Se-signe qui apour contenu son propre signe, qui „organise le texte” tout en connotant le signe, amène Josette Rey-Debove à conclure que la „littérature, en connotant le signe, reverse le discours sur le signe dans le discours sur le monde”43.

«Reversement»,transcription ou arrangement, tout porte àadmettreque la relation en­

tre le signe etle«mondemodelé par le signe» fait de lalittérature un «creuset» qui fait fondre les signes et le monde. Nous dirions volontiers en une formule synthétique qu’elle parle des signes commedu monde et du monde comme des signes46. La projec­ tion de l’axede la sélection surl’axede la combinaison revêt ici une telle forme. Pour compléter ladéfinition de la littérarité, nous retrouvons la logique classique de l’ordre paradigmatique analogique de la sélection (de nature linguistique) et de l’ordre syn­ tagmatique contigu de la combinaison (de nature sémantique). Sur le premier ordre clôturantlediscours - J. Rey-Debove nomme ce phénomène «finitionstructurale»- se superposele second des „champs sémantique ouverts”47.

(14)

L’hypothèse numéro six reste doublement explicitée. D’abord par son intitulé qui dit que la littérature est le lieu privilégié dela «subversion dusignifié par le signifiant et du sujetpar le langage», ensuite par la référence à Jacques Lacan pour la seconde

«subversion»''8. Le complément naturel en est la dernière hypothèse rappelantque La littérature est un discours de l’homme sur l'homme où celui-ci en tant que sujet de l’énonciation sur le mode du «comme je dis» «subvertit»-consciemmment ou/et, par­ tiellement, inconsciemment- le double code linguistique (S^'-S6) et sémio-culturel (Se- référence). D’après ce qu’endit l’auteur de l’article commenté, c’est le Sé qui estsujet à la véritable «subversion» qu’opère le sujet de l’énonciation littéraire de par les connotations personnelles cju’ilimpose au signe, d’oùrelève ce qu’on appelle commu­ nément la vision dumonde 9 quecrée - expression et contenu - l’oeuvre littéraire don­ née.

Cette seconde «subversion» ne saurait se limiter, nous semble-t-il, à une psychologisation sur laquelle portent l’inconscient et le subconscient dans la version lacanienne ou toute autre. Même si leur rôle, quoique difficile à préciser, restent incontournable dans les univers littéraires les plus luci­

des et rationnelles.

49Voir A. Herschberg Pierrot, Stylistique de la prose, Paris, coll. Belin Sup Lettres, Editions Be- lin, 1993 ; pour l’auteur la connotation autonymique est „l’emploi de mots cités pour désigner le monde, citation qu’on accompagnerait d’un «je dis», «comme on dit», ou «comme il dit»”, p. 101.

J. Rey-Debove, Le Métalangage. Etude linguistique du discours sur le langage, Le Robert, 1978, la 2e éd. revue et augmentée, Armand Colin, coll. U, série «Linguistique» , Paris, 1997.

J. Rey-Debove, La linguistique du signe. Une approche sémiotique du langage, Armand Colin, coll. U, série «Linguistique» , Paris, 1998.

L’article „Notes sur une interprétation autonymique de la littérature : le mode du

«comme jedis»”, de 1971, fondateurpour la thématiqueque nousesquissonsici,n’est pas ledernier mot del’auteurà ce sujet.Josette Rey-Debove y revientencore, quoique seulementde façon ponctuelle, en 1978, eten 1997, dans Le Métalangage. Etude lin-

pas être prispour un véritable développement des hypothèsesprécédentes. Us sont des rappels des principaux éléments et arguments dont l’objectif est plutôt d’insister sur certainsaspects duproblèmede lalittérarité conçue par lebiais de la connotation auto­ nymique afin de mieux le situer au sein de la problématique du métalangage, celle-ci fondamentale dans la recherche de Rey-Debove, et de mieux en saisir le fond et l’utilité. Ce qui nous semble plus accentué dans ces rappels, c’est que la connotation autonymiqueoffreunepossibilité de quitter le terrainsolidedes interprétations du phé­

nomène littéraire uniquement formalistes ou, autrement dit, centrées sur la forme.

Même si l’on pense la littérature en termes d’objets verbaux, elle necessede signifier d’une manière qui lui est spécifique. La dire forme doublementsignifiante entraîne la mise en évidence de son statut connotatif-autonymique. Elle se signifie et signifie le monde qu’elle modèle.A la différence de la fonction poétique, elle aussi forme signi­ fiante, la connotation autonymique - forme doublement signifiante (Signe-signecom­

plexe et réflexif [E(C(EC)) ou Sanl(SéisigneJ13- agit de façonà ceque la formemette en évidence (et en abyme) la complexité desa signification,où lecontenu et la forme, répétés enquelquesorte, manifestent leur solidarité paradoxale. * 49

(15)

La littérature, la littérarité et le littéraire /1 (Entre „Qu’est-ce que la littérature?”... 133

Nous avons vu que, chez Josette Rey-Debove, la connotativitéautonymique fonde le littéraire sur lestatutmétalinguistique des signes.L’oeuvre littéraire connote les si­ gnes et, tout en les connotant, attire l’attention sur leur statut de signe dont - écrit l’auteur -

la dénotation n’est pas métalinguistique, et qui s’est trouvé correspondre à la double sémiotique de Hjelmslev dont je n’avais pas imaginé d’application en linguistique, et aux pseudo-object sen­

tences de Camap. Ce système intermédiaire entre le langage et le métalangage a une grande puis­

sance explicative dans la sémiotique du discours (...) .

Le système de la connotation autonymique s’avère donc non seulement doublement sémiotique - („le signifiant est un signe et le signifié est un signe” ) - mais fonde son principe surl’intermédiaireentre l’emploi „ordinaire” et autonyme. L’allusion aux pseudo-objectsentences de Camapaide àbien saisir lecaractère de l’intermédiaireen question lequel prend la forme des pseudo phrases : „These sentences are syntactical sentences in virtue of theircontent, though they are disguised as object-sentences” . Ce «déguisement»qui dénotecependant d’abord le monde,fondateur du système de la connotation autonymique, invite à évoquer du moins les assertions feintesde lathéorie des actes de langage de John Searle et les quasi-jugements de laconception phéno­ ménologique de l’oeuvre d’art littéraire de Roman Ingarden, sans néanmoins oublier que chez le vieilAristote de la Poétique «le possible» et «le vraisemblable» cachaient déjà une«feintise», la dissimulation n’étant pasétrangère à lasimulation.

Etre en même temps en usage et en mention équivaut à une tellethéorisation où la littérature prise dans son ensemble signifie des signes selon un modèle qui n’oppose pas, qui n’oppose plus la connotativité et le métalangage. Les deux sémiotiques qui s’ensuivent trouvent ici une formulation légèrement modifiée par rapport à l’article nous servant de base.Nous la reproduisons:

(...) la littérature parle du monde, mais signifie des signes déterminés comme connotés de fa­

çon continue, sur le mode de Comme je dis. La forme apparaît non seulement en tant que signi­

fiant, mais comme signifié connotatif, selon la formule E|(Ci(E1 C|))): «la notion de forme a obte­

nu un sens nouveau, elle n’est plus une enveloppe, mais une intégrité dynamique et concrète, qui a un contenu en elle-même, hors de toute corrélation» (Eikhenbaum, in Todorov, 1965, p. 44). * * * * * * * *

J. Rey-Debove, Le Métalangage. Etude linguistique du discours sur le langage, op. cit., p. 336-337.

53A la lumière de l’exergue de l’ouvrage cité, il s’agit de Prologomènes de Hjelmslev où celui-ci postule l’adjonction „à l’étude des sémiotiques dénotatives une étude des sémiotiques connotatives et des métasémiologies”.

54 Ibid., p. 342.

55 Ibid., p. 254.

Voir R. Ingarden, L'oeuvre d'art littéraire, L’Age d’Homme, coll. Slavica, Lausanne, 1983, traduit de l’allemand par Philibert Secretan, section II, chap. 5.

,,N’a-t-on pas opposé, au contraire, la littérature comme système connotatif (Todorov, 1965, p. 23) au métalangage, et constaté que toutes les langues disposaient de ces deux sémiotiques inver­

ses ?”; J. Rey-Debove, Le Métalangage. Etude linguistique du discours sur le langage, op. cit., p. 287.

(16)

L’hypothèse de la connotation autonymique va plus loin; le texte en se connotant, ne signifie pas seulement son expression, mais son propre contenu au niveau métalinguistique, ((C|)), l’un n’allant pas sans l’autre .

La conséquence de cette hypothèse qui n’a pas été évoquée précédemment est la re­

dondance qui - similarité et/ou opposition - nedéploie passa signification surle signi­ fié, ni sur le signifiant, comme c’est le cas du langage ordinaire, mais sur le signifié connoté.

En termesd’approche sémiotiquedu langage, la littérarité qui relève dusystème de la connotationautonymique etqui est „un emploi du langage connotant le signifiant”5859 met ainsi en valeur une solidarité spécifique de l’expression et du contenu60 61auquel s’ajoute cet autre contenu que devient l’expression. Si Josette Rey-Debove souligne que „cette connotation de signe («cette chose ainsi nommée, dite»)rend comptede la conscience langagière à l’encodage et restitue l’expression langagière au décodage, pas seulement le contenu ordinaire” , c’est, entre autres, pour situerle phénomène de la littéraritépar rapportau langage (lediscours littéraire est optimal, mais à chaqueœuvre autrement optimal), ce qui voudrait certainement dire qu’à chaque création (œuvre d’art littéraire, acte d’écriture, acte littéraire62 *, discours littéraire, énonciation écrite, etc.) la littérarité se trouve confrontée toutd’abord, et essentiellement, à l’entièreté du langage pour, chaque fois, l’assumer autrement sans se préoccuper vraiment de conventions externes à l’essence verbale. C’est dans cette perspective que se situent nombre d’approches comme, par exemple, celle de Tzvetan Todorov qui, dans Les genres du discours ,partduconstat que „(...) à laplace de la seule littérature apparais­

sent maintenant de nombreuxtypes de discoursquiméritent au même titre notre atten­ tion” et évoqueàcette intention Northrop Frye de L'Anatomie de lacritique constatant que «Notre univers littéraire s’est développéen un univers verbal» et que «[notre] ex­ périence littéraire n’est que le bout visiblede l’iceberg verbal»64. Sans, pourl’instant, entrer dans les détails d’une discussion qui semble indispensable, limitons-nous à re­ dire avec Jean-Marie Schaeffer -c’est son postulat qui fait depuis référence65 - la né­

58 J. Rey-Debove, ibid., p. 288.

59 Ibid., p. 96.

J. Rey-Debove l’explicite ainsi : „L’écrivain a très peu de choix au niveau de l’expression si ses intentions de contenu sont précises” et, en note en bas de page, „Les seuls domaines lexicaux où l’écrivain choisit l’expression d’une façon non solidaire du contenu sont les noms propres des per­

sonnages qu’il construit et les mots inventés par lui (par ex., dans les oeuvres de Michaux, de Sol- lers)”, La linguistique du signe: une approche sémiotique du langage, op. cit., p. 81.

61 Ibid., p. 81.

Notons au passage que J.-M. Schaeffer bâtit son système relationnel (relatif) des quatre logi­

ques génériques (propriété communicationnelle, règle, classe généalogique et classe analogique) sur

„l’idée que l’acte littéraire, et plus globalement l’acte linguistique, est un acte sémiotique complexe”

d’où il conclut sur une la pluralité des logiques génériques ; voir Qu'est-ce qu’un genre littéraire ?, Editions du Seuil, coll. Poétique, 1989, p. 184.

T. Todorov, Les genres du discours, Editions du Seuil, 1978.

64 Ibid., p. 25.

J.-M. Schaeffer, „La stylistique littéraire et son objet”, Littérature, n° 105, mars 1997 ; ce nu­

méro est thématique et pose Questions de style.

(17)

La littérature, la littérarité et le littéraire /1 (Entre „Qu’est-ce que la littérature?”... 135

cessité, pour lastylistique littéraire, de ne pas se définir„en opposition à la stylistique de la langue” au profit d’une vision générale du style. La littérarité conçue par Rey- Debove semble se prêter à yproposer d’éventuels développements intéressants66.

66 „Dans le texte littéraire, et spécialement le texte poétique, où l’expression personnelle (Comme je dis) se donne libre cours, construisant son propre code, le discours s’opacifie et impose ses signes au décodeur. Cette «conscience métalinguistique», qui est en fait une SIGNIFICATION, était pour Valéry l’essentiel de la communication poétique, comme le rappelle Alain Rey : „C’est que le sens, communément et couramment, est une attente de sa propre mort, un sursis avant la compréhension, cette transformation de l’homme au moyen de la négation du signe (...). 11 suffit au contraire d’une incompréhension, inquiétude, besoin...., et le langage est rappelé" J. Rey-Debove, Le Métalangage.

Etude linguistique du discours sur le langage, op. cit., p. 288.

J. Rey-Debove, La linguistique du signe: une approche sémiotique du langage, op. cit., p. 63.

68 Ibid., p. 250.

Voir T. Todorov, „Poïetique et poétique chez Lessing”, dans Les genres du discours, Editions du Seuil, coll. Poétique, 1978, et B. Vouilloux, „Pour introduire à une poïétique de l'informe”, Poéti­

que, 98, 1994.

J. Rey-Debove, „Notes sur une interprétation autonymique de la littérarité : le mode du

«comme je dis»”, Littérature, n° 4, déc. 1971, P- 90-95.

71 Il est à noter que C. Kerbrat-Orecchioni, dans un passage consacré à la conception de J. Rey- Debove, constate que la connotation autonymique „(...) n’est autre que cette connotation par allusion, qui relève à la fois de la connotation par association, et de la connotation énonciative, dans la mesure où ces citations plus ou moins fidèles d’un locuteur réel et virtuel, que signalent en général les guil­

lemets fonctionnant comme connotateur, instaurent une distance entre le sujet d’énonciation et son énoncé, dont il refuse la totale paternité”, C. Kerbrat-Orecchioni, La Connotation, Presses Universi­

taires de Lyon, 1977, 3e éd. 1984, p. 129.

72„(...) ces énoncés présentent un trait commun: en un point de leur déroulement, le dire se repré­

sente comme n’allant plus «de soi», le signe, au lieu d’y remplir, transparent, dans l’effacement de soi, sa fonction médiatrice, s’interpose comme réel, présence, corps - objet rencontré dans le trajet du

Pour ce qui est d’autres spécificités de «cette chose ainsi nommée, dite», l’auteur tient encore à rappeler que l’efficacité de la littérarité - c’est-à-dire le rapport entre l’intention et les résultats -restede natureesthétique. Cela étant, la véritéde la littéra­ ture est sa qualité esthétique qui „appartient au contenu comme à l’expression (alors qu’il n’y ade vérité que du contenu)”, les deux étant continuellement solidaires car concourantàl’apparition de la„vérité métalinguistique de signe total en tant qu’objet iconique”67. Comme la vérité d’un portrait, la véritédu langage littéraire àconnotation autonymique, dont parle J. Rey-Debove, est donc celle du signifié connotatif dont la littérarité au sens proposé est un code particulier, et individuel, et, parconséquent, ori­ ginal, qui „ouvrele code sur les codesnouveaux dela pensée etde l’expression”68. De­

venir son propre code, se le constituer comme activité de l’oeuvre littéraire, prise pour sadifferentia specifica, ce àquoi - des formalistes à la poïétique contemporaine69 - l’accord estquasi unanime, fait desconnotations autonymiques qui, depuis l’article de Josette Rey-Debove70, disent la propriété du langage littéraire, le noyau dur de la litté­ rarité71.Cette co-présence qui nous paraîtd’importance capitale pour la compréhension duphénomène littéraire où la formeelle-même devient et faitdouble sens, serait le de­ gréultime du caractère constitutif du phénomène en question, qui pour J. Rey-Debove prend lenomde subversion et pourune autre linguiste- JacquelineAuthier-Revuz qui s’est inspirée de laconception de Rey-Debove - celui de «non-coïncidences» du dire72

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se constituant autour des (et conscient des)„modalitésselon lesquelles un énonciateur manifeste et redouble les «non-coïncidences» qui affectent son dire, toujours traversé par les discours des autres, hésitant devant l’écartentreles mots et les choses ou devant l’opacité des mots eux-mêmes”73.

dire et qui s’y impose comme objet de celui-ci - ; l’énonciation de ce signe, au lieu de s’accomplir

«simplement», dans l’oubli qui accompagne les évidences inquestionnées, se redouble d’un com­

mentaire d’elle-même”, J. Authier-Revuz, Ces mots qui ne vont pas de soi. Boucles réflexives et non- coïncidences du dire, Larousse, coll. Sciences du langage, 1995, tome 1, p. II.

Cité selon Marie-Laure Bardèche, Francis Ponge ou la fabrique de la répétition, Lausanne- Paris, Delachaux et Niestlé, coll. Science des discours, 1999, p. 149.

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