LXXIX.2 (1997)
Approximation simultan´ ee
par des produits de puissances de nombres alg´ ebriques
par
Michel Waldschmidt (Paris)
D´edi´e au Professeur J. W. S. Cassels
`a l’occasion de ses 75 ans
1. Introduction. Soit d un entier positif et soit Γ un sous-groupe de type fini de (C
×)
d. L’adh´erence de Γ pour la topologie complexe est un groupe de Lie r´eel et on s’int´eresse `a l’approximation de ses points par des ´el´ements de Γ . Dans ce texte on supposera que les coordonn´ees des
´el´ements de Γ sont des nombres alg´ebriques : Γ ⊂ (Q
×)
d, o` u Q est la clˆoture alg´ebrique de Q dans C. En prenant l’image inverse par l’application exponentielle, on se ram`ene `a l’´etude de l’approximation des points d’un sous-espace vectoriel r´eel de C
dpar des ´el´ements d’un sous-groupe additif Y , form´e de points dont les coordonn´ees sont des logarithmes de nombres alg´ebriques : Y ⊂ L
d, o` u L d´esigne le Q-espace vectoriel form´e des loga- rithmes de nombres alg´ebriques :
L = exp
−1(Q
×) = {λ ∈ C : e
λ∈ Q
×}.
Commen¸cons par le cas r´eel. D’apr`es un r´esultat de Kronecker (voir par exemple [3], [7], th. 442, et [2], chap. 7, §1, n
◦3, corollaire 2 de la proposition 7), une condition n´ecessaire et suffisante pour qu’un sous-groupe de type fini Y de R
dsoit dense dans R
dest que, pour toute forme lin´eaire non nulle ϕ : R
d→ R, l’image ϕ(Y ) ait un rang ≥ 2 sur Z. Ainsi, en posant V = Ker ϕ, pour v´erifier que Y est dense il faut majorer le rang sur Z de Y ∩ V pour tout hyperplan V de R
d.
Consid´erons maintenant un sous-groupe de type fini de C
d. Un th´eor`eme de transcendance, le th´eor`eme du sous-groupe lin´eaire (cf. th´eor`eme 2.1 ci- dessous), permet de majorer la dimension du Q-espace vectoriel L
d∩ V quand V est un hyperplan de C
ddont l’intersection avec Q
dest r´eduite
L’auteur a b´en´efici´e du soutien de la Japan Society for the Promotion of Science : bourse JSPS 96029.
[137]
`a {0}. Pour un hyperplan V de C
dcontenant un ´el´ement non nul de Q
d, le Q-espace vectoriel L
d∩ V est de dimension infinie. Aussi, Y ´etant un sous-groupe de type fini de L
d, pour pouvoir majorer le rang de Y ∩ V pour tout hyperplan V de C
d, on est amen´e `a introduire une hypoth`ese : il faut supposer que Y ne contient pas trop de points dans un mˆeme hyperplan rationnel sur Q.
D´ efinition. Un sous-groupe de type fini Y de C
dposs`ede la propri´et´e (IL) si, pour tout sous-espace W de C
drationnel sur Q de dimension < d, on a Y ∩ W = {0}.
Si y
1, . . . , y
lest une base de Y sur Z, avec y
j= (u
1j, . . . , u
dj), la pro- pri´et´e (IL) signifie que les coordonn´ees u
ijdes y
jsatisfont la condition d’ind´ependance lin´eaire suivante :
• pour tout t = (t
1, . . . , t
d) ∈ Z
d, t 6= (0, . . . , 0), et tout s = (s
1, . . . , s
l) ∈ Z
l, s 6= (0, . . . , 0), on a
X
d i=1X
l j=1t
is
ju
ij6= 0.
On pourrait affaiblir cette condition (IL), en imposant seulement une ma- joration au rang de Y ∩ W en fonction de la codimension de W dans C
d(voir par exemple le §1.3 de [19]), mais cela alourdirait les ´enonc´es. Nous donnerons seulement un exemple dans cette direction (corollaire 2.4).
Quand les nombres u
ijsont tous r´eels, la propri´et´e (IL) s’´ecrit de ma- ni`ere ´equivalente sous la forme multiplicative suivante, avec α
ij= e
uij:
• pour tout t = (t
1, . . . , t
d) ∈ Z
d, t 6= (0, . . . , 0), et tout s = (s
1, . . . , s
l) ∈ Z
l, s 6= (0, . . . , 0), on a
Y
d i=1Y
l j=1α
tijisj6= 1.
Cela signifie que le sous-groupe Γ de G
dm(R) = (R
×)
d, engendr´e par γ
1, . . . . . . , γ
l, avec γ
j= (α
1j, . . . , α
dj) (1 ≤ j ≤ l), qui est de rang l, poss`ede la propri´et´e suivante :
• pour tout sous-groupe alg´ebrique G
∗de G
dmde dimension < d, on a Γ ∩ G
∗(R) = {1}.
Quand les nombres u
ijne sont pas tous r´eels, sous la condition (IL), on peut seulement majorer le rang de Γ ∩ G
∗(C) quand G
∗est un sous-groupe alg´ebrique de G
dm(cf. lemme 4.2).
La question de densit´e soul`eve, nous l’avons vu, un probl`eme d’irrationa-
lit´e. Nous consid`ererons aussi le probl`eme de transcendance qui lui est natu-
rellement associ´e. Plus g´en´eralement, nous d´eduirons le r´esultat suivant
d’une minoration (2.3) de la dimension du Q-espace vectoriel engendr´e par ϕ(Y ).
Th´ eor` eme 1.1. Soient Y = Zy
1+ . . . + Zy
lun sous-groupe de L
dde rang l poss´edant la propri´et´e (IL) et ϕ : C
d→ C une forme lin´eaire non nulle.
(a) Si l ≥ d
2− d + 1, alors un au moins des l nombres ϕ(y
j) (1 ≤ j ≤ l) n’est pas nul.
(b) Si l ≥ d
2− d + 2, alors un au moins des l nombres ϕ(y
j) (1 ≤ j ≤ l) est irrationnel.
(c) Si l ≥ d
2+ 1, alors un au moins des l nombres ϕ(y
j) (1 ≤ j ≤ l) est transcendant.
L’´enonc´e (a) s’´ecrit rang
Z(Y ∩ Ker ϕ) ≤ d
2− d, ou encore rang
Zϕ(Y ) ≥ l −d
2+d. Il entraˆıne donc imm´ediatement (b). Cet ´enonc´e d’irrationalit´e (b) a ´et´e utilis´e par Damien Roy dans [14] pour d´emontrer le r´esultat suivant, r´epondant `a un probl`eme pos´e par Sansuc [15] :
• Soit k un corps de nombres de degr´e d = r
1+ 2r
2sur Q, o`u r
1est le nombre de plongements de k dans R et 2r
2le nombre de plongements non r´eels deux-`a-deux conjugu´es de k dans C. Il existe un sous-groupe de type fini de k
×de rang r
1+ r
2+ 1 dont l’image par le plongement canonique k
×→ (R
×)
r1× (C
×)
r2est dense.
Le th´eor`eme principal de ce texte (th´eor`eme 1.6) repr´esente une premi`ere
´etape vers un analogue quantitatif de ce r´esultat de densit´e de D. Roy.
Consid´erons maintenant un sous-groupe Y = Zy
1+ . . . + Zy
lde type fini et de rang l de R
d. Choisissons une norme | · | sur R
d. Si Y est dense, pour chaque ξ = (ξ
1, . . . , ξ
d) ∈ R
d, la fonction
T 7→ min
t∈Zl
|tj|≤T
|ξ − t
1y
1− . . . − t
ly
l|
tend vers 0 en d´ecroissant quand T tend vers l’infini. La “vitesse” de d´ecrois- sance de cette fonction donne une “mesure” de la densit´e de Y dans R
d.
Deux outils nous permettront d’´etablir une telle estimation. Le premier est un lemme de transfert (que nous allons exposer dans le paragraphe 3), qui permet de ramener la question de densit´e effective `a une minoration de min
1≤j≤lkϕ(y
j)k, quand k · k d´esigne la distance `a l’entier le plus proche et ϕ : C
d→ C est une forme lin´eaire non nulle. La minoration en question d´epend du maximum des coefficients de ϕ : pour ϕ(z) = ϑ
1z
1+ . . . + ϑ
dz
d, on posera
N(ϕ) = max
1≤i≤d
|ϑ
i|.
Le second outil est donc un ´enonc´e d’approximation diophantienne, raf- finement quantitatif du th´eor`eme 1.1 qui fournit les estimations requises pour l’utilisation du lemme de transfert. Pour ´enoncer ces estimations nous introduisons les notations suivantes.
• Soient d, l deux entiers positifs et Y = Zy
1+. . .+Zy
lun sous-groupe de L
dde rang l poss´edant la propri´et´e (IL). On ´ecrit y
j= (u
1j, . . . , u
dj) (1 ≤ j ≤ l) et on pose α
ij= exp(u
ij) (1 ≤ i ≤ d, 1 ≤ j ≤ l). Soit K un corps de nombres de degr´e D sur Q contenant les dl nombres α
ij. On d´esigne par A un nombre r´eel positif satisfaisant, pour 1 ≤ i ≤ d et 1 ≤ j ≤ l,
log A ≥ max{e/D, h(α
ij), (e/D)|u
ij|}.
Enfin soit ϕ : C
d→ C une forme lin´eaire non nulle.
La version quantitative suivante de la partie (a) du th´eor`eme 1.1 sera
´etablie au paragraphe 4 :
Th´ eor` eme 1.2. On suppose d ≥ 2 et l ≥ d
2− d + 1. Alors
1≤j≤l
max |ϕ(y
j)| ≥ N(ϕ) exp{−c
0(D log A)
κ0}, avec
κ
0= κ
0(d, l) = dl
l − d
2+ d et c
0= c
0(d, l) = d
7d3l
d.
On en d´eduira (´egalement au paragraphe 4) un raffinement quantitatif de la partie (b) du th´eor`eme 1.1 :
Corollaire 1.3. On pose N = max{1, N(ϕ)}. Si l ≥ d
2− d + 2, alors
1≤j≤l
max kϕ(y
j)k ≥ N(ϕ) exp{−c
1N
κ1}, avec
κ
1= d(l − 1)
l − d
2+ d − 1 et c
1=
c
0(d, l − 1)d
κ1(D log A)
2κ1si d ≥ 2, D log 2 + (D log A)
2si d = 1.
Au paragraphe 5 nous d´emontrerons la version effective suivante de la partie (c) du th´eor`eme 1.1 :
Th´ eor` eme 1.4. Supposons d ≥ 1 et l ≥ d
2+ 1. Soient β
1, . . . , β
ldes
´el´ements de K, non tous nuls, et soit B ≥ e/D un nombre r´eel tel que log B ≥ max
1≤j≤l
h(β
j).
Alors
1≤j≤l
max |ϕ(y
j) − β
j| ≥ exp{−c
2(D log A)
dκ2(D log B)
κ2}, avec
κ
2= l
l − d
2et c
2=
d
17d3l
dsi d ≥ 2,
10
10(l − 1)
2si d = 1.
A titre de curiosit´e on d´eduira (au paragraphe 5) du cas particulier d = 1, l = 2 du th´eor`eme 1.4 une minoration d’une combinaison lin´eaire de deux logarithmes. Ce n’est pas la meilleure estimation connue (comparer notamment `a [9]), mais elle est cependant d´ej`a assez fine, vu le peu d’effort que nous avons consacr´e `a cet aspect de la question.
Corollaire 1.5. Soient λ
1et λ
2deux ´el´ements de L lin´eairement ind´e- pendants sur Q et soit β un nombre alg´ebrique. On pose α
j= e
λj(j = 1, 2), et on d´esigne par D le degr´e du corps de nombres Q(α
1, α
2, β) sur Q. Soient A et B deux nombres r´eels positifs satisfaisant
A ≥ max{e/D, h(α
1), h(α
2), (e/D)|λ
1|, (e/D)|λ
2|}, B ≥ max{e/D, h(β)}.
Alors
|βλ
1− λ
2| ≥ exp{−10
10D
4(log A)
2(log B)
2}.
Voici maintenant le th´eor`eme principal de cet article, qui fournit un r´esultat effectif de densit´e concernant un groupe multiplicatif form´e de points
`a coordonn´ees alg´ebriques. On le d´eduira des th´eor`emes 1.2 et 1.4 dans le paragraphe 6.
Th´ eor` eme 1.6. Soient r
1et r
2des entiers ≥ 0 avec n = r
1+ r
2> 0.
On pose aussi d = r
1+ 2r
2. Soit Γ un sous-groupe de (R
×+)
r1× (C
×)
r2, engendr´e par des ´el´ements (α
ij)
1≤i≤n(j = 1, . . . , l). On suppose que pour tout a = (a
1, . . . , a
d) ∈ Z
d, a 6= 0, et tout b = (b
1, . . . , b
l) ∈ Z
l, b 6= 0, on a
Y
l j=1Y
ni=1
α
aijiY
n k=r1+1α
akjn+k bj6= 1.
(a) On suppose l ≥ d
2− d + 2, et on pose θ
1= 1
d − d − 1 l − 1 .
Il existe des constantes positives c
3et c
4, ne d´ependant que de d, l et des α
ij, poss´edant la propri´et´e suivante : pour tout ζ = (ζ
1, . . . , ζ
n) ∈ (R
×+)
r1× (C
×)
r2, et pour tout T ≥ c
3max{1, |log |ζ
1||, . . . , |log |ζ
n||}, le syst`eme d’in-
´equations
1≤j≤l
max |t
j| ≤ T et max
1≤i≤n
|ζ
i− α
ti11. . . α
till| ≤ c
4(log T )
−θ1admet une solution (t
1, . . . , t
l) ∈ Z
l.
(b) On suppose l > d
2, et on pose θ
2=
(l − d
2)/l si d ≥ 2,
1 si d = 1.
Alors la mˆeme conclusion vaut avec la borne
1≤i≤n
max |ζ
i− α
ti11. . . α
till| ≤ exp{−c
5(log T )
θ2},
pour une constante c
5qui ne d´epend que de d, l et des α
ij.
R e m a r q u e. La condition l ≥ d
2−d+2 s’´ecrit aussi θ
1> 0. L’estimation obtenue en (a) est assez faible, puisqu’elle s’´ecrit
1≤i≤n
max |ζ
i− α
i1t1. . . α
till| ≤ exp{−θ
1log log T + log c
4}.
Nous verrons d’ailleurs que pour d = 1 elle s’obtient `a partir de l’argument de Liouville (alors que pour d ≥ 2 elle n’est pas triviale). L’estimation obtenue en (b) est sensiblement meilleure : on ne peut pas esp´erer un exposant θ
2sup´erieur `a 1.
Il semble raisonnable de conjecturer que, sous les hypoth`eses du th´eor`eme 1.6 avec l > d, la conclusion peut ˆetre remplac´ee par
(1.7) max
1≤i≤n
|ζ
i− α
ti11. . . α
till| ≤ c
6T
1−(l/d)+εpour tout ε > 0, avec une constante c
6ne d´ependant que de d, l, des α
ijet de ε. Un tel ´enonc´e serait optimal.
2. Transcendance sur les tores complexes. Voici une variante (th´eo- r`eme 2.1 de [20]) du th´eor`eme du sous-groupe lin´eaire. On en trouvera d’autres notamment dans [13]; voir aussi [4] et [21].
Th´ eor` eme 2.1 (th´eor`eme du sous-groupe lin´eaire). Soient d
0et d
1deux entiers ≥ 0 avec d
0+ d
1> 0. Soit V un sous-espace vectoriel de C
d0+d1tel que
V ∩ (Q
d0× {0}
d1) = {0} et V ∩ ({0}
d0× Q
d1) = {0}.
Alors le Q-espace vectoriel V ∩ (Q
d0× L
d1) est de dimension finie major´ee par
dim
Q(V ∩ (Q
d0× L
d1)) ≤ d
1(d
0+ d
1− 1).
Le corollaire suivant nous permettra d’´etablir le th´eor`eme 1.1.
Corollaire 2.2. Soit Y un sous-groupe de type fini de L
det soit ϕ : C
d→ C une forme lin´eaire non nulle. On d´esigne par r la dimension du Q- espace vectoriel engendr´e par ϕ(Y ). Alors il existe un sous-espace vectoriel W de C
d, de codimension d
1≥ 1, rationnel sur Q, tel que
rang
Z(Y /Y ∩ W ) ≤ d
1(d
1+ r − 1).
D ´e m o n s t r a t i o n. Soit W le sous-espace vectoriel de C
dsur C en-
gendr´e par Q
d∩ Ker ϕ. C’est le plus grand sous-espace de C
d, rationnel
sur Q, qui soit contenu dans Ker ϕ. On note d
1la codimension de W dans
C
det on choisit d
1´el´ements de Q
dlin´eairement ind´ependants modulo W .
Leurs images par la surjection canonique C
d→ C
d/W donnent une base de
C
d/W , ce qui fournit une surjection π : C
d→ C
d1de noyau W v´erifiant
π(Q
d) = Q
d1. Soit e ϕ : C
d1→ C la forme lin´eaire d´eduite par passage au
quotient de ϕ. Comme W a ´et´e choisi maximal, le noyau Ker e ϕ = π(Ker ϕ) de e ϕ ne contient pas d’´el´ement non nul de Q
d1. On ´ecrit
e
ϕ(z) = ϑ
1z
1+ . . . + ϑ
d1z
d1, z = (z
1, . . . , z
d1) ∈ C
d1.
D’autre part, on choisit une base ξ
1, . . . , ξ
rdu Q-espace vectoriel engendr´e par ϕ(Y ). On d´esigne d’abord par ψ l’homomorphisme de groupes addi- tifs de Y dans Q
rqui envoie y ∈ Y sur les composantes de ϕ(y) dans la base ξ
1, . . . , ξ
r. On d´esigne ensuite par e Y l’image de Y dans C
r+d1par l’application y 7→ (ψ(y), π(y)). On d´esigne enfin par V l’hyperplan de C
r+d1d’´equation
ξ
1z
1+ . . . + ξ
rz
r= ϑ
1z
r+1+ . . . + ϑ
d1z
r+d1.
On a V ∩ (Q
r× {0}
d1) = {0} car ξ
1, . . . , ξ
rsont lin´eairement ind´ependants sur Q, et V ∩ ({0}
r× Q
d1) = {0} car V ∩ ({0}
r× C
d1) = {0}
r× Ker e ϕ. Par cons´equent, on peut appliquer le th´eor`eme 2.1 avec d
0= r :
dim
Q(V ∩ (Q
r× L
d1)) ≤ d
1(d
1+ r − 1).
On remarque pour terminer que e Y est un sous-groupe de C
r+d1qui satisfait rang
ZY ≥ rang e
Zπ(Y ) et Y ⊂ V ∩ (Q e
r× L
d1),
donc
rang
Z(Y /Y ∩ W ) ≤ rang
ZY ≤ dim e
Q(V ∩ (Q
r× L
d1)) ≤ d
1(d
1+ r − 1).
D ´e m o n s t r a t i o n d u t h ´e o r `e m e 1.1. Sous les hypoth`eses du corol- laire 2.2, si le sous-groupe Y poss`ede la propri´et´e (IL), alors son rang l est born´e par
(2.3) l ≤ d(d + r − 1).
On obtient la partie (a) du th´eor`eme 1.1 en prenant r = 0 et la partie (c) en prenant r = 1.
R e m a r q u e. De la partie (a) du th´eor`eme 1.1 on d´eduit le th´eor`eme des six exponentielles de Lang et Ramachandra ([8], chap. II, §1, th. 1 et [10], p. 67). De mˆeme le th´eor`eme de Gel’fond–Schneider ([6], chap. III,
§2 et [17], chap. II, th. 14) r´esulte de la partie (c) du th´eor`eme 1.1. En
prenant d = 1 dans (2.3) on obtient la version homog`ene du th´eor`eme de
Baker [1], chap. 2, th. 2.1 : des ´el´ements Q-lin´eairement ind´ependants de L
sont Q-lin´eairement ind´ependants. Pour obtenir la version non homog`ene
de ce mˆeme th´eor`eme : toute combinaison lin´eaire non nulle d’´el´ements de
L `a coefficients alg´ebriques est transcendante, il faut faire intervenir des
d´erivations, ce que permet la version plus g´en´erale du th´eor`eme du sous-
groupe lin´eaire (th´eor`eme 4.1 de [21], ou bien les variantes de [13]). A ce
propos, on peut donner une d´emonstration “duale” du corollaire 2.2, util-
isant le groupe alg´ebrique G
lm, avec l = rang
ZY , o` u on remplace les facteurs
G
rapar r d´erivations. Pour cela on consid`ere, dans l’espace tangent C
l, le sous-groupe de rang d engendr´e par les vecteurs lignes de la matrice dont les vecteurs colonnes sont les composantes d’une base de Y sur Z. On con- sid`ere aussi le sous-espace vectoriel de C
l, rationnel sur Q, de dimension r, engendr´e par les vecteurs lignes de la matrice dont les colonnes sont les com- posantes de ξ
1, . . . , ξ
r. Quand on se restreint `a la situation du corollaire 1.5, cette d´emonstration duale s’apparente `a la m´ethode de Gel’fond, tandis que celle que nous avons donn´ee est plus proche du point de vue de Schneider dans sa solution du septi`eme probl`eme de Hilbert.
En utilisant le th´eor`eme de Kronecker cit´e dans le premier paragraphe, on d´eduit du corollaire 2.2 le r´esultat de densit´e suivant :
Corollaire 2.4. Soit Y un sous-groupe de (L ∩ R)
d. On suppose que pour tout entier d
1≥ 1 et tout sous-espace vectoriel W de R
drationnel sur Q de codimension d
1, on a
rang
Z(Y /Y ∩ W ) ≥ d
1(d
1− 1) + 2.
Alors Y est dense dans R
d.
Dans ce corollaire 2.4, la condition sur le rang de Y /Y ∩ W n’est pro- bablement pas optimale, mais elle est naturelle : actuellement les m´ethodes de transcendance ne permettent pas d’´etablir la densit´e dans R
dd’un sous- groupe contenu dans (L ∩ R)
dde rang < d(d − 1) + 2, mˆeme s’il poss`ede la propri´et´e (IL).
D ´e m o n s t r a t i o n. Soit Y un sous-groupe de (L ∩ R)
dqui n’est pas dense. D’apr`es le th´eor`eme de Kronecker, il existe une forme lin´eaire non nulle ϕ : R
d→ R telle que ϕ(Y ) soit de rang < 2 sur Z. Si l est le rang de Y , alors celui l
0du sous-groupe Y
0= Y ∩ Ker ϕ v´erifie l
0> l − 2. Le corollaire 2.2 avec r = 0 donne l’existence d’un sous-espace vectoriel W de C
d, de codimension d
1≥ 1, rationnel sur Q, tel que
rang
Z(Y
0/Y
0∩ W ) ≤ d
1(d
1− 1).
Alors on a
rang
Z(Y ∩ W ) ≥ rang
Z(Y
0∩ W ) ≥ l
0− d
1(d
1− 1) > l − d
1(d
1− 1) − 2, donc
rang
Z(Y /Y ∩ W ) < d
1(d
1− 1) − 2.
3. Lemme de transfert
(a) Une version quantitative du th´eor`eme de Kronecker . On va utiliser
une version quantitative d’un th´eor`eme de Kronecker. Rappelons d´ej`a la
version qualitative — voir [3]; voir aussi [23], chap. II, §4, ainsi que les
travaux de D. Roy [11] et [12] sur les sous-groupes minimaux. Soient m et
n deux entiers positifs, et soient ϑ
ji(1 ≤ j ≤ n, 1 ≤ i ≤ m) des nombres r´eels. On pose
γ
i= (ϑ
1i, . . . , ϑ
ni) ∈ R
n(1 ≤ i ≤ m) et
δ
j= (ϑ
j1, . . . , ϑ
jm) ∈ R
m(1 ≤ j ≤ n).
Ainsi
Γ = Z
n+ Zγ
1+ . . . + Zγ
m⊂ R
net ∆ = Z
m+ Zδ
1+ . . . + Zδ
n⊂ R
msont les sous-groupes engendr´es par les vecteurs colonnes des matrices
1 . . . 0 ϑ
11. . . ϑ
1m.. . . .. ... ... ... .. . 0 . . . 1 ϑ
n1. . . ϑ
nm
et
1 . . . 0 ϑ
11. . . ϑ
n1.. . . .. ... .. . . .. .. . 0 . . . 1 ϑ
1m. . . ϑ
nm
.
D’apr`es Kronecker, Γ est dense dans R
nsi et seulement si ∆ est de rang n + m sur Z. Un lemme de transfert de Khinchine permet de pr´eciser ce r´esultat de la mani`ere suivante (comparer avec le lemme 5.1 de [18]).
Lemme 3.1. Soient ϑ
ji(1 ≤ j ≤ n, 1 ≤ i ≤ m) des nombres r´eels, T et S des nombres r´eels positifs avec T > 1.
(i) On pose η = 2
−n−m((n+m)!)
2et on suppose que pour tout (s
1, . . . , s
n)
∈ Z
n\ {0} v´erifiant max
1≤j≤n|s
j| ≤ S, on a ks
1δ
1+ . . . + s
nδ
nk ≥ ηT
−1.
Alors pour tout ζ ∈ R
n, il existe (t
1, . . . , t
m) ∈ Z
mv´erifiant max
1≤i≤m|t
i|
≤ T , et tel que
kζ − t
1γ
1− . . . − t
mγ
mk ≤ ηS
−1.
(ii) On suppose que pour tout ζ ∈ R
n, il existe (t
1, . . . , t
m) ∈ Z
mv´erifiant max
1≤i≤m|t
i| ≤ T , et
kζ − t
1γ
1− . . . − t
mγ
mk ≤ 1 2(n + m)S .
Alors pour tout (s
1, . . . , s
n) ∈ Z
n\ {0} v´erifiant max
1≤j≤n|s
j| ≤ S, on a ks
1δ
1+ . . . + s
nδ
nk ≥ 1
2(n + m)T . On a not´e k · k :
• la distance `a Z
mdans l’hypoth`ese de (i) et dans la conclusion de (ii),
• la distance `a Z
ndans l’hypoth`ese de (ii) et dans la conclusion de (i).
C’est surtout la partie (i) qui nous sera utile : elle ram`ene la question de densit´e effective `a un probl`eme d’approximation diophantienne homog`ene.
La partie (ii) montre qu’il y a en fait ´equivalence entre les deux questions,
`a des constantes explicites pr`es.
La d´emonstration du lemme 3.1 utilise un lemme de transfert de Khin- chine pour les formes lin´eaires L
1, . . . , L
n, M
1, . . . , M
md´efinies par
L
j(x) = X
m i=1ϑ
jix
i(1 ≤ j ≤ n) et M
i(u) = X
n j=1ϑ
jiu
j(1 ≤ i ≤ m).
Lemme 3.2. Soient C > 0 et X > 1 des nombres r´eels. Soit ζ = (ζ
1, . . . , ζ
n) ∈ R
n.
(A) Une condition n´ecessaire pour qu’il existe t ∈ Z
mv´erifiant
(3.3) max
1≤j≤n
kL
j(t) − ζ
jk ≤ C et max
1≤i≤m
|t
i| ≤ X est que l’in´egalit´e
(3.4) ks
1ζ
1+ . . . + s
nζ
nk ≤ γ max{X max
1≤i≤m
kM
i(s)k; C max
1≤j≤n
|s
j|}
soit satisfaite pour tout s ∈ Z
navec γ = m + n.
(B) Une condition suffisante pour qu’il existe t ∈ Z
mv´erifiant (3.3) est que l’in´egalit´e (3.4) soit satisfaite pour tout s ∈ Z
navec γ = 1/(2η).
D ´e m o n s t r a t i o n. Ce lemme 3.2 n’est autre que le th´eor`eme XVII du chapitre V, §8 de [3].
D ´e m o n s t r a t i o n d u l e m m e 3.1. Pour d´emontrer l’assertion (i), on utilise la partie (B) du lemme 3.2, avec C = ηS
−1et X = T . Soit ζ ∈ R
n. Comme on a (L
j(t))
1≤j≤n= t
1γ
1+ . . . + t
mγ
mdans R
n, il suffit de v´erifier, pour tout s = (s
1, . . . , s
n) ∈ Z
n,
ksζk ≤ 1
2η max{X max
1≤i≤m
kM
i(s)k; C max
1≤j≤n
|s
j|},
o` u sζ d´esigne le nombre r´eel s
1ζ
1+ . . . + s
nζ
n. Cette in´egalit´e est vraie pour s = 0. Comme ksζk ≤ 1/2, elle est aussi trivialement v´erifi´ee pour les s ∈ Z
ntels que max
1≤j≤n|s
j| > S. Il ne reste plus qu’`a consid´erer les s ∈ Z
npour lesquels 0 6= max
1≤j≤n|s
j| ≤ S, et pour ceux-l`a on applique l’hypoth`ese (i) qui donne
1≤i≤m
max kM
i(s)k ≥ η/X.
Pour montrer (ii), on raisonne par l’absurde : supposons qu’il existe (s
1, . . . , s
n) ∈ Z
nv´erifiant 0 < max
1≤j≤n|s
j| ≤ S et
ks
1δ
1+ . . . + s
nδ
nk < 1 2(n + m)T .
On choisit ζ ∈ R
ntel que ksζk = 1/2, et on utilise la partie (A) du lemme 3.2, avec C = (2(n + m)S)
−1et X = T : il n’existe pas de (t
1, . . . , t
m) ∈ Z
mv´erifiant max
1≤i≤m|t
i| ≤ T et
1≤j≤n
max kL
j(t) − ζ
jk ≤ C.
R e m a r q u e. Le th´eor`eme de Dirichlet ([3], chap. I, th. VI, [16], chap. 2, th. 1E) montre que pour tout S r´eel > 1, il existe (s
1, . . . , s
n) ∈ Z
nv´erifiant 0 < max
1≤i≤n|s
i| ≤ S, et
ks
1δ
1+ . . . + s
nδ
nk ≤ S
−n/m.
Donc l’hypoth`ese de l’assertion (i) du lemme 3.1 ne peut pas ˆetre v´erifi´ee avec un nombre T inf´erieur `a ηS
n/m. On v´erifie ´egalement, grˆace au principe des tiroirs, que pour tout entier T ≥ 1, il existe ζ ∈ R
ntel que, pour tout (t
1, . . . , t
m) ∈ Z
mv´erifiant max
1≤j≤m|t
j| ≤ T , on ait
kζ − t
1γ
1− . . . − t
mγ
mk ≥ 1
2 (2T + 1)
−m/n.
Par cons´equent, si l’hypoth`ese de la condition (ii) du lemme 3.1 est v´erifi´ee, alors
S ≤ 1
n + m (2T + 1)
m/n.
Soient E un R-espace vectoriel norm´e de dimension n et soit Ω un r´eseau de E. On note E
∗= Hom
R(E, R) l’espace vectoriel dual de E, et Ω
∗= {ϕ ∈ E
∗: ϕ(Ω) ⊂ Z} le r´eseau dual de Ω (cf. [2], chap. 7, §1, n
◦3). Il r´esulte du th´eor`eme de Kronecker qu’un sous-groupe de type fini Y de E contenant Ω est dense dans E si et seulement si, pour tout ϕ ∈ Ω
∗non nul, on a ϕ(Y ) 6⊂ Z. Nous allons donner une version quantitative de cet ´enonc´e. On fixe un entier m ≥ 1 et on pose encore η = 2
−n−m((n + m)!)
2.
L’´enonc´e qui suit fait intervenir une fonction r´eelle de variable r´eelle F , d´efinie et continue sur un intervalle [S
0, ∞) de R
+, `a valeurs > 1/η. On suppose F strictement croissante et non born´ee : lim
S→∞F (S) = ∞. On d´esigne par F
−1la bijection r´eciproque de F , on pose T
0= ηF (S
0) et on d´efinit une fonction G, continue et croissante sur l’intervalle [T
0, ∞) et `a valeurs r´eelles positives, par
G(T ) = F
−1(T /η) η P
nj=1
|ω
j| .
Lemme 3.5. Soient S
0un nombre r´eel positif et F : [S
0, ∞) → R
+une fonction continue, strictement croissante, non born´ee, `a valeurs > 1/η.
Soient ω
1, . . . , ω
ndes ´el´ements de Ω lin´eairement ind´ependants (sur Z ou sur R, c’est ´equivalent), et soient y
1, . . . , y
mdes ´el´ements de E. On suppose que pour tout ϕ ∈ Ω
∗non nul, si on pose
S = max{|ϕ(ω
1)|, . . . , |ϕ(ω
n)|; S
0}, on a
1≤i≤m
max kϕ(y
i)k ≥ 1/F (S).
Alors pour tout x ∈ E et pour nombre r´eel T ≥ T
0, il existe ω ∈ Ω et (t
1, . . . , t
m) ∈ Z
mv´erifiant
max{|t
1|, . . . , |t
m|} ≤ T et |x − ω − t
1y
1− . . . − t
my
m| ≤ 1/G(T ).
En posant ε
0= S
−10η P
nj=1
|ω
j|, on peut ´ecrire la conclusion sous la forme suivante : pour tout x ∈ E et pour tout ε dans l’intervalle 0 < ε < ε
0, il existe ω ∈ Ω et (t
1, . . . , t
m) ∈ Z
mv´erifiant
|x − ω − t
1y
1− . . . − t
my
m| ≤ ε avec
max{|t
1|, . . . , |t
m|} ≤ ηF (S), o`u S = ε
−1η X
n j=1|ω
j|.
D ´e m o n s t r a t i o n. Pour d´emontrer le lemme 3.5, on ´ecrit y
1, . . . , y
mdans la base ω
1, . . . , ω
nde E : y
i=
X
n j=1ϑ
jiω
j(1 ≤ i ≤ m).
On va utiliser la partie (i) du lemme 3.1. Soit S un nombre r´eel ≥ S
0et soit s ∈ Z
nv´erifiant 0 < max
1≤j≤n|s
j| ≤ S. On d´efinit ϕ ∈ Ω
∗par ϕ(ω
j) = s
j(1 ≤ j ≤ n). Alors
ϕ(y
i) = X
n j=1ϑ
jis
j(1 ≤ i ≤ m).
On a par hypoth`ese
1≤i≤m
max
X
n j=1ϑ
jis
j≥ 1/F (S),
ce qui permet d’appliquer le lemme 3.1. Soit x ∈ E, soit T un nombre r´eel ≥ T
0, et soit S le nombre r´eel d´efini par F (S) = T /η. On ´ecrit x = ζ
1ω
1+ . . . + ζ
nω
navec (ζ
1, . . . , ζ
n) ∈ R
n. Alors il existe t ∈ Z
mv´erifiant max
1≤i≤m|t
i| ≤ T et
1≤j≤n
max ζ
j−
X
m i=1ϑ
jit
i≤ η/S.
Autrement dit, il existe a = (a
1, . . . , a
n) ∈ Z
ntel que
1≤j≤n
max
ζ
j− a
j− X
m i=1t
iϑ
ji≤ η/S.
On pose alors ω = a
1ω
1+ . . . + a
nω
net on utilise la relation η
S X
n j=1|ω
j| = 1
G(T ) .
R e m a r q u e s. 1. Si l’hypoth`ese du lemme 3.5 est vraie pour une fonction F , alors elle est encore vraie pour toute fonction qui majore F . Ainsi il est quelquefois plus simple d’´enoncer la conclusion non pas pour la fonction G elle mˆeme, mais pour une fonction minorant G.
2. Plusieurs types de fonctions F interviendront.
• Le cas le plus favorable est celui o` u l’hypoth`ese est vraie avec F (S) = cS
κpour S ≥ S
0(o` u S
0, c et κ sont trois constantes);
l’exposant κ est alors n´ecessairement ≥ n/m. Dans ce cas on a G(T ) = c
0T
θpour T ≥ T
0avec θ = 1/κ et deux autres constantes T
0et c
0. En particulier on a θ ≤ m/n. Dans ces circonstances, le nombre θ + 1 est le coefficient de densit´e de [19], chap. I, §3; il est major´e par l/n, o` u l est le rang de Ω + Y sur Z. Le lemme 1.3.7 de [19] donne une majoration de ce coefficient introduisant des condi- tions alg´ebriques (comparer `a l’hypoth`ese du corollaire 2.4), et non diophantiennes, sur la r´epartition de Ω + Y dans R
n.
• Si l’hypoth`ese du lemme 2.3 est satisfaite pour une fonction F (S) = exp{c(log S)
κ} avec κ ≥ 1, alors la conclusion est vraie pour une fonction G de la forme G(T ) = exp{c
0(log T )
θ} pour T ≥ T
0, avec θ = 1/κ.
• Enfin, dans les cas moins favorables, on aura seulement F (S) = exp(cS
κ), avec κ > 0, donc G(T ) = c
0(log T )
θavec θ = 1/κ.
(b) Variante r´eelle du lemme de transfert. Le lemme 3.5 est bien adapt´e au cas o` u l’espace r´eel ambiant contient un r´eseau apparaissant de fa¸con naturelle. Quand il n’y a pas de r´eseau naturel, on peut appliquer la variante suivante, dans laquelle | · | d´esigne la norme |x| = max
1≤i≤n|x
i| sur R
n.
Lemme 3.6. Soient y
1, . . . , y
ldes ´el´ements de R
n, S
0un nombre r´eel positif et F : [S
0, ∞) → R
+une fonction r´eelle de variable r´eelle, continue, croissante et non born´ee. On suppose que pour toute forme lin´eaire φ ∈ Hom
R(R
n, R) satisfaisant N(φ) ≥ S
0, on a
1≤j≤l
max kφ(y
j)k ≥ 1/F (S) avec S = N(φ).
Sous ces hypoth`eses il existe des constantes T
0, C
1et C
2positives telles que, si on pose G(T ) = C
1F
−1(C
2T ) pour T ≥ T
0, alors pour tout x ∈ R
net tout T ≥ T
0(1 + |x|), le syst`eme d’in´equations
1≤j≤l
max |t
j| ≤ T et |x − t
1y
1− . . . − t
ly
l| ≤ 1/G(T ) admet une solution t ∈ Z
l.
D ´e m o n s t r a t i o n. Le sous-groupe Y = Zy
1+ . . . + Zy
lest dense dans
R
n: en effet, l’hypoth`ese implique que pour tout ϕ ∈ Hom
R(R
n, R), ϕ 6= 0,
on a ϕ(Y ) 6⊂ Z. En particulier, {y
1, . . . , y
l} contient une base de R
n. Il n’y
a donc pas de restriction `a supposer que y
l−n+1, . . . , y
lsont lin´eairement ind´ependants sur R. On pose m = l − n, ω
i= y
m+i(1 ≤ i ≤ n) et Ω = Zω
1+ . . . + Zω
n. Comme Ω
∗est un r´eseau de Hom
R(R
n, R), il existe un nombre r´eel c
7> 0 tel que, pour tout ´el´ement non nul ϕ de Ω
∗, on ait N(ϕ) ≥ c
7. Soit N
0un entier positif v´erifiant N
0≥ S
0/c
7.
On va utiliser le lemme 3.5. Pour en v´erifier l’hypoth`ese, on consid`ere un
´el´ement non nul ϕ de Ω
∗, et on pose φ = N
0ϕ. Alors le nombre S := N(φ) = N
0N(ϕ) satisfait S ≥ S
0. On a aussi S ≤ c
8max
1≤i≤n|ϕ(ω
i)|, avec une constante c
8qui ne d´epend que de y
1, . . . , y
l. On pose encore e S
0= c
−18S
0, S = max{|ϕ(ω e
1)|, . . . , |ϕ(ω
n)|, e S
0} et on d´efinit une fonction e F : [ e S
0, ∞) → R
+par e F ( e S) = N
0F (c
8S). Alors e
1≤j≤l
max kϕ(y
j)k = N
0−1max
1≤j≤l
kφ(y
j)k ≥ 1
N
0F (S) ≥ 1
N
0F (c
8S) e = 1 F ( e e S) . Les hypoth`eses du lemme 3.5 sont donc v´erifi´ees pour la fonction e F . Par cons´equent, il existe une constante c
9≥ 1 telle que, pour tout T
1≥ c
9et tout x ∈ R
n, il existe t ∈ Z
lavec
1≤j≤m
max |t
j| ≤ T
1et |x − t
1y
1− . . . − t
ly
l| ≤ 1/ e G(T
1), avec une fonction e G de la forme
G(T e
1) = c
10F e
−1(c
11T
1).
On majore max
m+1≤j≤l|t
j| par c
12(T
1+ |x|) et on pose T
0= 2c
9c
12. Pour T ≥ T
0(1 + |x|), on peut appliquer ce qui vient d’ˆetre d´emontr´e avec T
1= T /2c
12. On obtient ainsi le r´esultat annonc´e avec C
1= c
10et C
2= c
11/(2c
12).
(c) Variante complexe du lemme de transfert. Soient r
1et r
2des entiers
≥ 0 avec (r
1, r
2) 6= (0, 0). On pose n = r
1+ r
2et d = r
1+ 2r
2. Pour ξ ∈ R
r1×C
r2on pose |ξ| = max
1≤i≤n|ξ
i|. On d´esigne enfin par z le complexe conjugu´e de z ∈ C.
L’´enonc´e suivant g´en´eralise le lemme 3.6 (qui correspond au cas r
2= 0, n = d = r
1); c’est un analogue quantitatif de la variante complexe du th´eor`eme de Kronecker de [22], th. 5.1 (voir aussi [23], chap. II, §6).
Pour σ = (σ
1, . . . , σ
n) ∈ R
r1× C
r2, on d´efinit ψ
σ: R
r1× C
r2→ R par ψ
σ(ξ) = σ
1ξ
1+ . . . + σ
nξ
n+ σ
r1+1ξ
r1+1+ . . . + σ
nξ
n.
Proposition 3.7. Soient y
1, . . . , y
ldes ´el´ements de R
r1× C
r2et F : [S
0, ∞) → R
+une fonction r´eelle de variable r´eelle, continue, croissante et non born´ee. On suppose que, pour tout σ = (σ
1, . . . , σ
n) ∈ R
r1× C
r2v´erifiant
S := max{|σ
1|, . . . , |σ
n|} ≥ S
0,
on a
1≤j≤l
max kψ
σ(y
j)k ≥ 1/F (S).
Il existe des constantes T
0, C
1et C
2positives poss´edant la propri´et´e sui- vante : si on pose G(T ) = C
1F
−1(C
2T ) pour T ≥ T
0, alors pour tout ξ ∈ R
r1× C
r2et tout T ≥ T
0(1 + |ξ|), le syst`eme d’in´equations
1≤j≤l
max |t
j| ≤ T et |ξ − t
1y
1− . . . − t
ly
l| ≤ 1/G(T ) admet une solution t ∈ Z
l.
D ´e m o n s t r a t i o n. On d´esigne par E l’espace vectoriel r´eel norm´e R
r1× C
r2. On d´efinit une application R-lin´eaire θ : E → R
r1× C
2r2par θ(x, z) = (x, z, z) et un isomorphisme R-lin´eaire χ : E → R
dpar χ(x, z) = (x, <(z), =(z)). On d´efinit encore e y
j= χ(y
j) (1 ≤ j ≤ l). On va v´erifier l’hypoth`ese du lemme 3.6 (avec n remplac´e par d) pour le sous- groupe de R
dengendr´e par e y
1, . . . , e y
l. Pour cela, soit φ une forme lin´eaire non nulle dans Hom
R(R
d, R). On d´esigne par (e
1, . . . , e
d) la base canonique de R
d, on pose e σ
i= φ(e
i) (1 ≤ i ≤ d) et on d´efinit σ = (σ
1, . . . , σ
n) ∈ E par
σ
ν=
e σ
νpour 1 ≤ ν ≤ r
1,
1
2
(e σ
ν− ie σ
r2+ν) pour r
1< ν ≤ n, de sorte que ψ
σ= φ ◦ χ.
L’hypoth`ese de la proposition 3.7 concernant max
1≤j≤lkψ
σ(e y
j)k per- met donc de v´erifier l’hypoth`ese correspondante du lemme 3.6 portant sur max
1≤j≤lkφ(y
j)k. On d´eduit du lemme 3.6 l’existence de constantes e C
1, C
2et T
0telles que, si on pose e G(T ) = e C
1F
−1(C
2T ) pour T ≥ T
0, alors pour tout ξ ∈ E et pour tout T ≥ T
0(1 + |x|) avec x = χ(ξ), le syst`eme d’in´equations
1≤j≤l